La mare aux nénuphars

Par ailleurs, je parlais de ma logorrhée, il s'agissait donc d'auto-dérision concernant la piètre qualité de mes textes...

J'avais compris que tu cherchais à améliorer cela, mais je crois qu'on est d'accord puisque :

Déjà écrire clairement, de manière compréhensible et créer une ambiance, c'est déjà pas mal à mon goût, ça me demande bien assez de travail.
Je ne vois pas où est l'obligation de cette quête de beauté dont on parle ici.

Pour moi, c'est déjà l'essentiel de la justesse et (pour moi) beauté de la phrase.

Je ne m'occupe que d'efficacité. Je ne prends pas en compte la "beauté" et n'ai en fait aucune idée de ce qu'est la beauté d'une phrase, c'est une question que je ne me pose pas.
Par contre, le justesse de la forme par rapport à la scène décrite (plié la forme au fond), c'est une obsession.

Je pense qu'on repère davantage les belles phrase à la lecture qu'à l'écriture. Parce qu'en essayant d'en écrire, parfois ça ne marche pas, et d'autres fois on peut en écrire sans même s'en rendre compte.
A la lecture, en revanche, une belle phrase nous arrête tout de suite en plein milieu d'un paragraphe.

Ca ce n'est pas faux
Des fois quand je me relis à voix haute je me dis : "Ha mais c'est pas mal du tout ça (au niveau de la musique, des sons, du rythme, etc)"

Je vais donc éviter tant que possible de faire de belles phrases car un arrêt dans la lecture, même en bien, ce n'est jamais bon. Cela éjecte le lecteur hors du texte.

Hm, ça ne sort pas de la lecture je trouve. Quand tu es toi-même l'auteur, que tu te rends compte que le texte coule bien, ben justement tu t'en rends compte et tu as cette petite fierté qui fait plaisir.
Mais le lecteur lui, au contraire, ça ne le fera pas sortir de sa lecture

Moi non plus je ne le ressens pas comme quelque chose qui m'éjecte de ma lecture. C'est autre chose, finalement. On s'arrête pour admirer une phrase, son panache, son style. Et ça fait du bien. C'est un plaisir esthétique. C'est une émotion.

Pour Mervin peake, en effet, c'est assez dur à lire, je trouve. Disons que ce n'est pas une lecture "facile". Pareil pour Julien Gracq par exemple. Mais alors quel souffle, quelle puissance !

D'une certaine manière, c'est comme au cinéma ou dans un spectacle où tu es soufflée par la beauté de la mise en scène. C'est important aussi.

Arya a écrit :Moi non plus je ne le ressens pas comme quelque chose qui m'éjecte de ma lecture. C'est autre chose, finalement. On s'arrête pour admirer une phrase, son panache, son style. Et ça fait du bien. C'est un plaisir esthétique. C'est une émotion.

Pour Mervin peake, en effet, c'est assez dur à lire, je trouve. Disons que ce n'est pas une lecture "facile". Pareil pour Julien Gracq par exemple. Mais alors quel souffle, quelle puissance !

D'une certaine manière, c'est comme au cinéma ou dans un spectacle où tu es soufflée par la beauté de la mise en scène. C'est important aussi.

+ 1, et je dois ajouter que j'adore ça. Je la relis plusieurs fois, je m'en délecte, parfois je la note ; en tout cas, un livre moyen peut me marquer longtemps si j'y trouve un ou deux très beaux passages, stylistiquement parlant. C'est à travers le style qu'un auteur peut m'atteindre vraiment, en me montrant la scène à travers ses yeux et en y ajoutant quelque chose de plus.

Je crois qu'on a tous un style, il tient au choix des mots, au rythme, à l'intensité, à la façon dont on organise ses descriptions, ses dialogues, ce sont tous ces choix que nous faisons consciemment ou non qui donnent notre voix au texte. Les répétitions et tous les autres défauts qu'on élimine au relecture, c'est juste du bruit à mon sens. Je trouve ça normal et sain qu'il y a ait des belles phrases, que certains aiment écrire "richement", d'autres "efficacement", etc. Ca reflète bien la diversité dans l'écriture, et il n'y a pas de style meilleur qu'un autre du moment qu'il est lisible et qu'il trouve son public.

Par contre, il me semble dangereux de rechercher un style particulier avec des effets et de tomber dans quelque chose de complètement artificiel et de forcé, parce que ça, le lecteur risque de le sentir et de ne pas aimer.

Syven a écrit : Par contre, il me semble dangereux de rechercher un style particulier avec des effets et de tomber dans quelque chose de complètement artificiel et de forcé, parce que ça, le lecteur risque de le sentir et de ne pas aimer.

Je vais être constructive : +1.

Il est impossible, selon moi, d'écrire un roman qu'avec de belles phrases et c'est une mauvaise idée de chercher la beauté partout. Je cherche la beauté d'une phrase que dans les moments clés, les moments forts. Et c'est super facile de tomber dans le ridicule, le cliché ou le darling dans ces passages.

Je suis d'accord avec Syven, on a tous un style sans avoir `a se forcer mais un travail un peu plus approfondi sur certaines phrases/passages me semble nécessaire.

Maden a écrit :on a tous un style sans avoir `a se forcer

Cela me semble une évidence. A partir du moment où l'on aligne des mots, on écrit déjà avec un certain style, horrible parfois, mais qui ne nous demeure pas moins propre.

La question est plus de savoir s'il faut faire des efforts particuliers pour transcender son style ou se contenter de le laisser aller au fil de l'eau. Comme le dit Maden, il est impossible de forcer son style sur un roman complet. Penser à sortir le meilleur de nous-même à certains moments, pourquoi pas, mais il y a un risque de dénaturation (comme un acteur qui sur-joue).

Par contre, et cela est un autre sujet, traquer les répétitions, les maladresses, s'inspirer de ses lectures,... amène naturellement à une amélioration, ou plutôt une maturation, de notre style (celui qui coule de source, le seul qui transparait à travers tout un roman). Être pointilleux avec soi-même au fil de l'écriture, sans forcément chercher à écrire un chef d'œuvre, est donc primordiale.

Sans parler de se forcer ou d'essayer d'avoir le style d'un autre, il est par contre tout à fait possible de "magnifier" son style, surtout grâce aux remarques de lecteurs. Quand un lecteur me dit qu'il a particulièrement apprécié une phrase, j'essaye de comprendre pourquoi, et de réutiliser de temps en temps le procédé que j'avais utilisé dans cette phrase sans même m'en rendre compte. De même, lorsqu'on me fait remarquer une tendance à - par exemple - utiliser trop d'adverbes, ou faire des phrases trop longues, je tente de me soigner !
Cela ne dénature pas le style qu'on a, disons qu'on le débarrasse autant qu'on peut de ses imperfections et qu'on fait ressortir ce qu'il a de meilleur.

Après, je suis totalement d'accord que le fond doit prévaloir sur la forme : perdre en intensité dramatique sous prétexte qu'on veut absolument trouver une formulation poétique, c'est ridicule. Sauf quand on a une plume géniale, comme Oscar Wilde dans le portrait de Dorian Gray, seul livre où je me suis presque arrêtée à toutes les phrases tellement j'étais fascinée par sa prose, sans pour autant perdre en intérêt pour le récit.

Intéressant ce fil !

En ce qui me concerne, la question du style m'angoisse quelque peu : il y a beaucoup de dialogues dans mon roman,
j'ai l'impression d'avoir une plume assez fonctionnelle. En fait, je ne fais pas de "folies" car mon univers est tellement
exotique, et mes personnages tellement barrés, que j'ai peur de perdre le lecteur en route. Donc j'ai l'impression
d'avoir un style banal (ce qui est probablement faux, mais je manque de recul !).

Je ne me suis jamais posé la question du style quand j'écris. Je trouve que c'est quelque chose de naturel qui se développe par la pratique. De la même manière qu'on apprend à se connaitre par les épreuves de la vie quotidienne, on développe son style par les épreuves d'écriture, comme si c'était indissociable de l'expérience ( je peux être totalement à côté de la plaque mais pour moi c'est ça ).