la morale dans la littérature jeunesse

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Ayaquina
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Ayaquina »

En tout cas, c'est clair que la littérature jeunesse est souvent bien sombre, surtout la littérature anglaise. Après, la façon dont c'est amené, le style, jouent énormément.
Je me rappellerai toujours comment, l'air de rien, le roman de D. W. Jones parle d'une jeune fille "bien sous tous rapports" qui est littéralement en train d'assassiner son petit frère à petit feu dans "Ma soeur est une sorcière".
Sur le fond, c'est carrément horrible, la gamine est un monstre d'égoïsme et on ne peut pas dire qu'elle le paye vraiment ! Au contraire !
(donc pour la morale, on repassera)
Pourtant le roman est léger et joyeux.
Oui, je pense qu'effectivement la façon comme on jongle avec tout ça est essentielle. C'est ce qui me prend la tête d'ailleurs. Je pense que n'importe quel parti pris est défendable tant que tu maîtrises ton point de vue et que tu assumes tes opinions. Ce fil refléte, je pense ma propre indécision sur cet aspect. C'est pourquoi en discuter m'est si précieux. ^^
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Luminelya
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Luminelya »

Ayaquina a écrit :
Ursula dans la Petite Sirène (sa mort m'a toujours paru très violente...)
écoute, cet exemple tombe bien. Mes filles adorent la petite sirène. Tu considères comme violente cette scène et pourtant... je suis sûre que si tu demandes à un enfant, il n'aura même pas l'impression que c'est violent. Par contre, le jour où je leur ai lu l'histoire d'Ondine, la véritable histoire, la fin était insupportable à leurs yeux. Donc la violence n'est pas toujours là où on l'attend. Ce qui est violent dans cette histoire est le fait que l'héroïne meurt et l'acceptation de cette réalité est terrible pour un enfant et c'est ce que Walt Disney a voulu rectifier. Je ne dis pas que ce n'est pas bien, hein ! C'est aussi ce qu'on fait avec le loup de nos jours, on essaie de réparer la trace qu'on laissé dans notre inconscient les histoires de nos grand mères en faisant des héros loups gentils ou un peu nigauds. Ce sont des partis pris différents.
Je suis tout à fait d'accord, c'est bien ce que j'ai voulu pointer : la mort de la méchante, fût-elle violente pour un regard d'adulte (La Petite Sirène fait partie des dessins animés que je n'ai pas découverts enfant, mais adolescente), semble justifiée et acceptable. Sa monstruosité est punie. C'est sûr que la version d'Andersen est bien plus traumatisante, notamment parce que, à l'inverse, la vertu n'est pas récompensée : la sirène préfère se sacrifier plutôt que de tuer le prince... Au final, elle donne sans recevoir.
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Roanne
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Roanne »

Merci pour les explications Aya, je comprends mieux ton "petit souci" (plein de posts entre temps, mais je parle ici de celui où tu m'expliques ton problème perso).
Ca me rappelle celui de Tolkien avec Bilbo le Hobbit :
Spoiler: montrer
Au départ, Bilbo devait tuer mais Tolkien a estimé que ça ne le faisait pas vu que c'est un être doux et bon... donc c'est un homme (Beorn je crois) qui tue.
Ayaquina a écrit :Je me méfie de cette idéalisation de "l'enfant sauvage" parce qu'elle exacerbe chez l'adolescent une force "facile" qui est celle de la domination. Mais bon, je parle sans savoir... il faudrait que je lise la série pour comprendre comment elle traite son aspect.
Tu pourrais lire le 1er tome pour commencer, ça me ferait plaisir d'en discuter avec toi.
Parce qu'il y a vraiment des éléments intéressants dedans.
Ce qui est flagrant : mon côté "adulte" a effectivement grimacé face à ce qui est le parti pris du roman, puis j'ai réalisé que c'était vraiment trop fun pour des jeunes, j'aurais ADORE lire ça ado, du coup j'ai bridé le politiquement correct et je me suis éclatée avec ce roman.
Ce qui est très intéressant, c'est justement de découvrir l'ambivalence des gamins, surtout James. Sa morale est limite dès le départ : sa mère vit de trafics, il doit se débrouiller, il s'en prend plein la figure par son "oncle" et des gars plus costaud, donc se venge sur plus faible que lui... bref, c'est un délinquant en puissance... et pourtant il a bon fond, il est intelligent, il aime jouer, il adore sa petite soeur (qui n'est pas un tendron non plus ^^). C'est donc là-dessus que James va devoir composer. On lui offre une occasion pour s'en sortir, il va la saisir.
Et j'ai trouvé la fin particulièrement bien justement parce qu'il vit en direct les effets de la "réussite" de sa mission, qui sont loin d'être tous "positifs". Donc il se questionne. On lui avait dit qu'on ne fait pas d'omelette sans casser d'oeufs, là il en voit l'application concrète.
Puis c'est un roman d'espionnage et d'actions pour ados bien ficelé, ce qui ne gâche rien. Je ne me suis pas ennuyée une minute en le lisant.
Vous n'aimez pas Noël ? ça tombe bien, nous non plus ! Du coup, avec Chapardeuse, nous vous invitons sur Wattpad pour (re)découvrir le Noël cataclysmique de Claire et Chan.

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Ayaquina
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Ayaquina »

Je suis tout à fait d'accord, c'est bien ce que j'ai voulu pointer : la mort de la méchante, fût-elle violente pour un regard d'adulte (La Petite Sirène fait partie des dessins animés que je n'ai pas découverts enfant, mais adolescente), semble justifiée et acceptable. Sa monstruosité est punie. C'est sûr que la version d'Andersen est bien plus traumatisante, notamment parce que, à l'inverse, la vertu n'est pas récompensée : la sirène préfère se sacrifier plutôt que de tuer le prince... Au final, elle donne sans recevoir.
Oui... finalement, Walt Disney c'est la moralité symbolique contre la véritable moralité, celle de l'intangible, du réel qui se pose à nous (plus proche des contes et légendes) :cruel: La morale c'est une vrai prise de tête. :wamp:

@Roanne : oui ton roman m'interpelle beaucoup. (faudrait juste que je me donne le temps de lire ce que je n'ai plus fait depuis... je ne sais pas quand tant je consacre tous mes instants perdus au cycle :wamp: :wamp:
Je crois que ce qui me pollue, c'est mon côté éducateur. Freud dit que l'éducation est un métier impossible, je crois que c'est vrai parce que justement la volonté d'éduquer, de moraliser agit la plupart du temps en sens inverse de celui qu'on veut produire. Porté à l'extrême, la moralité est la mère de la psychose et de la schizophrénie. La barrière est donc extrêmement délicate. Quand je disais au début que je ne sais pas écrire un texte amoral, (et non pas immoral, cette fois) c'est que cette question est tellement fondamentale en moi, qu'elle vient systématiquement toquer à ma porte grignotant ma liberté d'auteur. Pourtant, je déteste m'ériger en détenteur de la morale, personne ne fait mieux que les dictateurs en la matière et je déteste le bien pensant. Mais pour avoir grandi dans un pays libertaire (post dictatorial), avec des parents libertaires et avoir toujours côtoyé un univers peu moral (pas avec mes parents, hein? ^^ ), et bien finalement j'ai un rapport très dur envers cette question.
Des gamins fils de trafiquants, loulous et gamins des bidonvilles, violence sous tout rapport, est tout sauf étranger à mon vécu. Je défends plus que tout une parole qui ne soit pas tronquée à leur sujet d'ailleurs. Il n'y aurait rien de pire que d'édulcorer ce monde ou le décrire pour mieux le moraliser, à moins d'en montrer l'humanité qui se tapit derrière cette façade "gros dur". Mais en faire l'éloge me semble la pire des chimères et une démagogie dans laquelle s'engouffrent beaucoup d'auteurs fascinés par la transgression et qui me gêne encore plus.
La question étant on ne peut plus casse gueule pour moi, j'évite comme la peste de la côtoyer de près. Mes héros et mes histoire sont donc l'antithèse de tout ça. ^^ Mais quoi qu'il en soit, la question de la morale me rattrape toujours et toujours :lol:
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Zygomatique
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Zygomatique »

Sujet ô combien délicat...
Pour jouer le compromis, je dirais que la violence, qui fait partie de la vie, peut-être évoquée, mais pas explicitée avec tous les détails de tripes ensanglantées comme pour les adultes.
Après nos chers bambins ne peuvent pas être surprotégés... Et comme le disait quelqu'un plus haut, il faut aussi rendre les persos humains...

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Ayaquina
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Ayaquina »

Et comme le disait quelqu'un plus haut, il faut aussi rendre les persos humains...
Et ce n'est déjà pas une mince affaire ^^
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Zygomatique
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Zygomatique »

Non, d'ailleurs, autre sujet : comment rendre les personnages humains/ attachants?
J'avais lu un espèce de tuto sur le sujet sur le net, faudrait que je le retrouve, il était très intéressant.

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Celia
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Celia »

Zygomatique a écrit :Non, d'ailleurs, autre sujet : comment rendre les personnages humains/ attachants?
J'avais lu un espèce de tuto sur le sujet sur le net, faudrait que je le retrouve, il était très intéressant.
En observant le monde et en acceptant que sa propre vision du monde n'est pas l'unique et n'est pas la vérité absolue.
Ca paraît bateau dit comme ça, mais c'est en le comprenant que je réussis à développer des personnages forts (ce n'est pas de la gueule, je sais que je le fais bien, donc je vais pas jouer aux fausses modestes)
Je pars du principe que si on n'individualise pas ses personnages, on risque de se trouver à utiliser des caricatures (le flic, l'ado, le délinquant, etc) et donc soit à les déshumaniser (ils n'ont aucun intérêt humain puisqu'ils ne sont qu'une fonction narrative), soit à les rendre peu attachants envers le lecteur (encore une fois parce qu'ils ne sont qu'une fonction)
Par exemple, j'ai besoin d'un flic dans une scène de nouvelle. Il ne va apparaître que cinq ou dix lignes, donc pas la peine d'écrire une biographie sur lui. Mais en même temps, j'ai besoin qu'il ait du volume sinon son opposition avec mon héros ne va avoir aucune tension et le lecteur n'en aura rien à faire. Alors ce flic ne va pas être juste un flic, mais ce sera aussi quelqu'un qui a son uniforme taché sur l'épaule parce qu'il a nourri son gamin avant d'aller bosser, quelqu'un qui n'aura aucune patience non pas parce que c'est un flic caricatural bête et méchant, mais parce qu'il n'arrive plus à dormir la nuit, quelqu'un qui pensera que mon héros est suspect parce qu'il en a marre de voir les coupables sortir de son poste sans être arrêtés.
Tout ça, je ne suis pas obligée de le dire dans le texte. Mais je le sais, et donc il est plus facile lorsque j'écris de dépasser la fonction et de faire rencontrer au lecteur un vrai personnage humain.

Je pense que pour la violence, c'est pareil.
La violence n'est pas unique mais multiple : dans ses formes, dans ses conséquences, selon le personnage qui va la porter ou celui qui va la recevoir (ou celui qui la porte et la reçoit également)
Quand on arrive à construire un personnage complexe, la façon dont il va user ou non de la violence, et dont il va y réagir sera différente de celle de son voisin, de son compagnon d'arme ou de son ennemi.
Du coup, cette individualité dans la réaction humanise le personnage, à mon avis. Et le fait de caractériser autant ces situations permet également, selon moi, d'éviter toute apologie de la violence : c'est le personnage qui en use, pas l'auteur, et cela se sent dans le texte ; un personnage va prendre son pied en tuant, mais il y aura assez de distance et d'humanisation pour que le lecteur sache qu'il ne s'agit pas d'apologie.

Enfin j'ai l'impression de faire très donneuse de leçon mais c'est la façon dont j'ai construit ma propre écriture aux fils des ans (maintenant j'ai l'impression plutôt de faire ma vieille rabacheuse ^o^)
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Zygomatique
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Zygomatique »

Je suis parfaitement d'accord avec toi Celia sur la construction des personnages, et d'ailleurs, merci de partager ton expérience.
Concernant la violence, l'humaniser est là pour moi tout le problème justement, quand on s'adresse à des bambins.
Ca lui donne tout son intérêt, dans le sens où ça peut la rendre attractive.

D'ailleurs, où se situe la limite lorsqu'on parle de violence en jeunesse ?
Ne pas impressionner, bouleverser, faire peur ?
Ne pas inciter ?

Dans les deux cas, humaniser la violence à travers les persos abonde dans le sens inverse, mais ce n'est que mon point de vue.
Modifié en dernier par Zygomatique le mar. août 14, 2012 12:39 pm, modifié 1 fois.

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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par fleur-de-lyss »

Roanne a écrit :
Et pourtant, c'est une excellente série jeunesse, qui connait un succès international et je comprends tout à fait pourquoi les ados en sont fan !
Franchement, pour ceux qui croient que le jeunesse doit être édulcoré, ça pourrait leur filer une bonne baffe salutaire.
Là, ce sont des ados qui se battent, se cassent le nez, peuvent se montrer vulgaire, faire de grosses c*******... dont ils doivent assumer les conséquences.
James, le héros qui n'a que 11 ans au début du roman, a appris la débrouille avec sa mère qui trafiquait. Ça se pose là.
Et pourtant ce n'est pas tout blanc / tout noir et le côté moral est justement bien présent, c'est d'ailleurs ce qui m'a plu à la fin du tome 1 que j'ai lu ce week-end et je n'en dirai pas plus pour ne pas spoiler.
Puis gros plus du roman : on échappe aux atermoiements de héros bouffés par leurs états d'âme. Ça aussi, je pense, ça plait aux ados.
Les jeunes héros sont loin d'être idiots, ils ont tous un passif assez lourd, participent à des missions dans lesquelles ils peuvent risquer leur vie (ou celle d'autres personnes) et pourtant ils restent des ados, qui savent rire et faire la fête. J'ai beaucoup aimé cette approche que j'ai trouvé en fait assez réaliste (on ne sombre pas tous dans la dépression au premier coup dur).
+1 Roanne! Ayant 17 ans, je confirme que la littérature édulcorée parce que réservée à un public jeune est exaspérante au possible! Depuis que j'ai treize ans, je farfouille les bibliothèques pour éviter ce genre de livres. J'en ai cependant dévoré pas mal malgré tout... Je ne suis pas du genre à banaliser la violence ni rien mais je sais qu'elle nous entoure et je veux comprendre comment des jeunes de mon âge peuvent tuer.
Et puis, même l'école nous encourage parfois à lire des livres avec des héros sombres. Mon frère a dû lire le livre d'un commandant nazi qui était loin d'être rongé par le remord. Moi j'ai dû lire "la nuit des enfants roi", qui n'est pas non plus un exemple à suivre mais qui est pourtant très souvent présent dans les listes de lectures scolaires. Nous ne sommes pas des psychopathes pour autant. On sait faire la part des choses entre réel et fiction.
Car chaque coeur s'imagine ainsi avoir tressailli avant tout autre sous une foule de sensations qui ont fait battre ceux des premières créatures et feront palpiter encore ceux des derniers hommes et des dernières femmes. Guy de Maupassant

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Ayaquina
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Ayaquina »

Enfin j'ai l'impression de faire très donneuse de leçon mais c'est la façon dont j'ai construit ma propre écriture aux fils des ans (maintenant j'ai l'impression plutôt de faire ma vieille rabacheuse ^o^)
Pô du tout, c'est hyper intéressant ce que tu dis. ;)
+1 Roanne! Ayant 17 ans, je confirme que la littérature édulcorée parce que réservée à un public jeune est exaspérante au possible! Depuis que j'ai treize ans, je farfouille les bibliothèques pour éviter ce genre de livres. J'en ai cependant dévoré pas mal malgré tout... Je ne suis pas du genre à banaliser la violence ni rien mais je sais qu'elle nous entoure et je veux comprendre comment des jeunes de mon âge peuvent tuer.
Et puis, même l'école nous encourage parfois à lire des livres avec des héros sombres. Mon frère a dû lire le livre d'un commandant nazi qui était loin d'être rongé par le remord. Moi j'ai dû lire "la nuit des enfants roi", qui n'est pas non plus un exemple à suivre mais qui est pourtant très souvent présent dans les listes de lectures scolaires. Nous ne sommes pas des psychopathes pour autant. On sait faire la part des choses entre réel et fiction.
Attention, pour ma part, je ne parle pas d'édulcorer la violence ! On en revient à la scène de la petite sirène qui meurt dans Ondine et Ursula qui meurt de façon violente. Lequel est le plus violent, je ne sais pas, mais lequel est le plus constructif, probablement celui d'Ondine qui n'a pas d'intention punitive et expiatoire vis à vis du méchant, ce qui perso m’énerve plus que le côté édulcoré. Il ne s'agit pas de cacher la violence, il s'agit de ne pas la banaliser, c'est totalement différent. Je suis fascinée pas l'esprit d'un psychopathe, parce que je ne crois pas à la monstruosité, nous sommes tous fait de la même matière. Je crois que j'aurais adoré être profiler. Mais pas à cause de leur violence, mais parce qu'ils incarnent les limites de ce qui fait notre humanité, notre proposition sociale. Il n'y a pas de morale sans société, sans loi. Un personnage est moral ou immoral par rapport au contexte dans lequel il évolue. Pour un ado, la question de la morale (me semble-t-il) est une question globale, lié à ses propres limites, mais également à sa place dans la société, son identité politique (dois-je obeir, m'insurger, etc.). Donc la question est loin de se réduire à la violence pure. Elle est intrinsèque à ce qui fait notre individualité autant que notre capacité à s'adapter à un société.
Bon je me calme. :wamp: Tu vois, tu as l'impression d'être une rabacheuse, Célia, moi je ne sais pas aborder cette question sans partir dans de grandes considérations, :mrgreen:
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fleur-de-lyss
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par fleur-de-lyss »

Oui je vois ce que tu veux dire. En fait, je ne répondais pas par rapport à ton cas précisément. Ma réaction n'était pas ciblée du tout, simplement générale. :)
Je sais que tu veux aborder la violence avec un certain équilibre. D'ailleurs, j'ai réfléchi un peu plus à ton cas et je pense que le meilleure moyen de la faire sortir de l'histoire "indemne" est sans doute de la faire grandir. J'imagine que tu mets en scène une adolescence. Elle est donc à la limite entre l'enfance et l'âge adulte. Si tu la fait franchir cette limite dans le courant de l'histoire, elle peut gagner suffisamment en maturité pour gérer la situation. Je crois. ^^
J'ai l'impression que si tu la considère moins comme une enfant, tu peux t'accorder plus de liberté sur son équilibre psychique. tu peux aussi la faire grandir après l'histoire; comme Harry Potter dans l'épilogue. Ca t'aide? :)
Car chaque coeur s'imagine ainsi avoir tressailli avant tout autre sous une foule de sensations qui ont fait battre ceux des premières créatures et feront palpiter encore ceux des derniers hommes et des dernières femmes. Guy de Maupassant

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Eva
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Eva »

C'est un débat très intéressant. Ca m'a fait réfléchir au livre le plus sombre que j'ai pu lire, enfant (comprendre moins de 13 ans). En trouvant le vainqueur, j'ai été surprise. Surprise de me souvenir à quel point ce livre était sombre et violent, sans que ça m'ait empêché de l'apprécier.

Le livre en question s'appelle "Mon bel Oranger", de José Mauro de Vasconcelos. Il ne s'agit pas de littérature de l'imaginaire. Au contraire, c'est en partie autobiographique et c'est son réalisme qui le rend particulièrement sombre. Les "méchants" sont la misère et une famille qui pense que battre (parfois jusqu'à le blesser) un enfant de 5 ans est une méthode éducative normale... L'histoire est racontée par l'enfant en question, avec un mélange de lucidité et de rêve, de sensibilité et d'endurcissement, d'acceptance et de rejet de sa situation. Les coups et la douleur ne manquent pas, la fin est triste et amère.

Et pourtant, c'est bien un livre proposé à la jeunesse, à partir de 11 ou 12 ans. Je l'ai lu sans en être traumatisée, en comprenant la portée des malheurs du narrateur (quoique peut-être pas autant que je pourrais la comprendre maintenant, si je le relisais aujourd'hui). J'ajouterai même que la lecture passe sans qu'on s'appitoie ou qu'on en lâche le livre d'horreur parce que l'enfant a une telle force de caractère qu'il nous aide à surmonter ses épreuves avec lui.

Du coup, je pense qu'on peut effectivement aborder la violence de façon réaliste et nuancée avec les jeunes adolescents : sans utiliser un méchant caricatural (qu'on peut punir sans état d'âme) et avec un héro qui doit vivre les conséquences de ses actes.

Mais bon, j'imagine que ça ne va pas t'aider à trouver le ton juste, Ayaquina. Tu peux peut-être laisser le temps à ton héroine de "guérir" après un épisode un peu traumatique ? Lui donner quelques instants de retour à la normal, où elle retrouve ses marques, avant un nouveau conflit, si tu vois ce que je veux dire. Et bien sûr, faire attention à ne pas aller trop loin (mais là, ça dépend tellement de la situation...)
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Ayaquina
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Ayaquina »


Oui je vois ce que tu veux dire. En fait, je ne répondais pas par rapport à ton cas précisément. Ma réaction n'était pas ciblée du tout, simplement générale. :)
Je sais que tu veux aborder la violence avec un certain équilibre. D'ailleurs, j'ai réfléchi un peu plus à ton cas et je pense que le meilleure moyen de la faire sortir de l'histoire "indemne" est sans doute de la faire grandir. J'imagine que tu mets en scène une adolescence. Elle est donc à la limite entre l'enfance et l'âge adulte. Si tu la fait franchir cette limite dans le courant de l'histoire, elle peut gagner suffisamment en maturité pour gérer la situation. Je crois. ^^
J'ai l'impression que si tu la considère moins comme une enfant, tu peux t'accorder plus de liberté sur son équilibre psychique. tu peux aussi la faire grandir après l'histoire; comme Harry Potter dans l'épilogue. Ca t'aide? :)
en fait, mon perso est un très mauvais exemple parce qu'elle fonctionne à l'envers, iihihih. Elle est trop morale au départ et trop adulte parce qu'elle refuse toute violence en elle. Cela la conduit à devenir phobique :wamp: Elle doit donc accepter de gérer une certaine dose de violence pour grandir, mais pas dans le sens murir, plutôt devenir elle-même avec ses contradictions. En fait, ce n'est pas tant par rapport au perso que je me pose la question mais plutôt à l'aboutissement de l'histoire. Je veux un Happy end mais je ne veux pas faire moral, alors c'est là où j'ai un problème avec les méchants meurent, les bons gagnent... :wamp: :wamp: :wamp: :wamp:
Le livre en question s'appelle "Mon bel Oranger", de José Mauro de Vasconcelos. Il ne s'agit pas de littérature de l'imaginaire. Au contraire, c'est en partie autobiographique et c'est son réalisme qui le rend particulièrement sombre. Les "méchants" sont la misère, l'alcool, une famille qui pense que battre (parfois jusqu'à le blesser) un enfant de 5 ans est une méthode éducative normale... L'histoire est racontée par l'enfant en question, avec un mélange de lucidité et de rêve, de sensibilité et d'endurcissement, d'acceptance et de rejet de sa situation. Les coups et la douleur ne manquent pas, la fin est triste et amère.
Ce roman est juste mon plus beau souvenir d'enfance, mon livre fétiche, mon bel oranger ou "meu pé de laranja lima", le deuxième est du même acabit, "os capitaes d'areia (edit : Capitaine des sables) de Jorge Amado. ça parle des enfants des rues qui vivent clandestinement dans les rues de Bahia.
Ce sont les deux livres qui m'ont donné envie d'écrire. ça me fait tout drôle que tu cites mon bel oranger :P Le premier est une auto biographie, le deuxième est juste le plus grand écrivain Brésilien :wamp: Ils traitent merveilleusement bien leurs personnages avec une vérité douloureusement touchante, mais là encore, il ne s'agit pas de violence gratuite, mais de condition sociale, donc de réalité.
Modifié en dernier par Ayaquina le mar. août 14, 2012 2:59 pm, modifié 3 fois.
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Re: la morale dans la littérature jeunesse

Message par Ayaquina »

Mais bon, j'imagine que ça ne va pas t'aider à trouver le ton juste, Ayaquina. Tu peux peut-être laisser le temps à ton héroine de "guérir" après un épisode un peu traumatique ? Lui donner quelques instants de retour à la normal, où elle retrouve ses marques, avant un nouveau conflit, si tu vois ce que je veux dire. Et bien sûr, faire attention à ne pas aller trop loin (mais là, ça dépend tellement de la situation...)
Oui, je vois très bien ce que tu veux dire.
J'ai bien réfléchi au fur et à mesure du débat, et plus ça va, plus je me dis que mon problème dépasse le traitement de mon personnage, je crois que le problème devient : est-ce que je veux en faire un roman à message (moral) ou pas. Le premier impliquerait que j'ai la capacité à gérer un message fort or ce n'est pas le cas. Je déteste les messages, j'ai des idéaux très fuyants. :wamp: :cruel:
Je crois que c'est Célia qui l'a dit, mais il faut que j'arrive à faire en sorte de ne pas avoir à endosser les actes de mon héroïne et des autres persos et que je laisse au lecteur la place pour le faire. Je dois me contenter de faire vivre au méchant sa vie de méchant en l'humanisant (comme disait Silène) et faire vivre sa vie de héros à mon perso principal sans le charger d'un message universel qui me pèse (bêtement puisque personne ne me demande rien ^^ ).
Pour le vécu de mon perso face à la violence je crois avoir également trouvé assez de réponses ici pour bien gérer.
Je vous remercie pour votre participation au débat, elle m'a permis de bien remuer tout ce qui me bloquait et de décanter plein de choses.
N'hésitez pas à élargir le débat ou à le faire changer de direction. Vos interventions sont super riches et ça fait du bien de parler de tout ça. ^^
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