Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

[visible par les non-inscrits] Ici, on peut poser des questions (techniques ou non) sur l'écriture, les outils qui y sont dédiés et plus largement, sur le monde du livre !
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Liseuse_Ambulante
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Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Liseuse_Ambulante »

Bonjour les grenouilles et bonne année à toutes! :)

Ça fait plus un an que je n'étais pas revenue sur la mare, et pour cause : je n'ai pas écrit depuis tout ce temps. La cause : j'ai un souci niveau écriture qui dure depuis plusieurs années, et en réfléchissant, je me suis dit qu'en parler ici avec vous m'aiderait peut-être à enfin trouver une solution.

Spoiler alert : ça mélange vie perso et écriture, mais je vais essayer de la faire courte et neutre.

En 2023, j'ai abandonné mon dernier manuscrit en cours de correction suite à un évènement familial très difficile. J'ai bien tenté de le reprendre, mais impossible, j'étais comme révulsée par ce texte. J'ai beaucoup réfléchi au problème et j'ai découvert le pattern qui se passait (et qui se reproduit en boucle depuis plus de 6 ans).

J'ai compris que dans tous les romans de l'imaginaire que je commence, j'investis énormément de ma vie personnelle (consciemment ou inconsciemment). Que ce soit des événements, des personnes, des relations, des leçons que j'ai apprises, etc. Sur le moment, ça contribue à faire que j'adore mon texte.

Puis les mois passent, je termine le premier jet, je commence les corrections... et là, PAF! Il a un drame ou un changement important dans ma vie réelle : décès, rupture, déménagement, peu importe. Résultats : 1) Ça me coupe l'envie d'écrire pendant un certain temps (car occupée à gérer autre chose); 2) Ça me fait changer de vision sur mon manuscrit.

Je m'explique : quand je veux enfin reprendre mon manuscrit après m'être remise, je ne supporte plus d'y voir les trucs personnels que j'y ai mis et qui ont changé avec la situation vécue. C'est devenu faux et douloureux. J'ai essayé de retravailler les événements ou personnages qui n'étaient plus désirés, mais c'est à s'arracher les cheveux et douloureux, car imprégnés dans tout le texte. :psychocoah: Du coup... J'abandonne et je passe à une autre histoire... (tout aussi personnelle mais sur un autre sujet :roll: ). Le plus frustrant, c'est que je vais très bien dans ma vie, j'ai fait la paix avec mon passé avec de l'aide, mais je n'ai juste pas envie de replonger dans un manuscrit qui appartient à la moi du passé qui ne savait pas ce que je sais aujourd'hui.

:mage: Les solutions tentées pour me sortir de cette spirale infernale :
  • J'ai essayé d'écrire des textes moins personnels, voire pas du tout (des nouvelles, des contes). Ça marche, je vais jusqu'au bout du processus, mais je n'ai aucun attachement pour ces textes. Je m'en fiche complètement. Alors pas le goût de tenter sur un roman. Quand j'ai un projet que j'aime, je pense toujours au message ou aux sentiments que j'aimerais insuffler dans le roman, et c'est indéniablement lié à ma vie personnelle.
  • J'ai envisagé d'écrire et corriger sur une plus courte période de temps pour court-circuiter les dramas, mais impossible : déjà j'aime prendre mon temps pour découvrir l'univers, les persos, et aussi je n'ai que quelques heures le week-end pour écrire.
  • J'ai essayé d'écrire des romans (de l'imaginaire ou pas) sur un sujet donné de ma vie, pour faire un genre de déballage une bonne fois pour toute et que ça ne revienne plus dans mes autres romans. Échec. Autant m'inspirer, c'est cool, autant me focuser sur un truc triste personnel, c'est pas mon genre d'écriture (ennui total!).
Voilà, voilà, c'est l'histoire... Est-ce que vous connaissez ce sentiment? Est-ce que ce genre d'abandons vous arrive aussi? Auriez-vous des idées pour sortir de ce cercle vicieux? Des commentaires? Des claques sur la tête?

Écrire me manque terriblement, mais je suis lasse de me dire que ça finira peut-être encore à la poubelle...

Merci beaucoup de votre temps ! :wow:
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Léonore
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Léonore »

À la base, les textes que tu as abandonnés, tu voulais en faire quoi une fois qu'ils auraient été finis de corriger ?
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Pi. »

Je ne peux pas dire que je connaisse ça, mais une partie de ce que tu décris est normal et légitime. Après un coup dur, il y a forcément une déprime qui s'installe et qui peut se prolonger en dépression si on y est sensible. Si depuis 6 an tu accumules les tuiles ou les changements importants, ça ne m'étonne pas que tu aies du mal à reprendre tes textes. Si en plus ils contiennent des éléments personnels liés à cette période, il est logique que tu te protèges en évitant de replonger ta mémoire à des moments difficiles (ou des moments positifs mais qui sont terminés)

Personnellement, je me suis mis à écrire dans un période stabilisée, mais je pense que je réagirais comme toi en zone de turbulence.

La meilleure solution serait que les événements extérieurs te laissent en paix, mais tu n'as pas d'influence dessus. :ronge:

Et avec un texte très ancien (genre celui d'il y a 6 ans), est-ce que l'effet de rejet est toujours aussi intense ?
Parce qu'une idée de base peut évoluer sur le fond, si ton vécu a évolué. Tu peux toujours reprendre un ancien canevas et le faire évoluer vers le toi actuel.

Plein de :heart: :heart: :heart: :heart: en attendant que tout s'arrange pour toi.
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Kaouraintin
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Kaouraintin »

Hello

Je vois assez bien ce dont tu parles. Pendant très longtemps, j'écrivais seulement des poèmes, que je réalisais en une demi-journée, et que j'évitais de relire ensuite (car ils me mettaient mal à l'aise) ou que je perdais (solution de facilité).
Ce qui m'a lancé dans l'écriture plus "long terme", dirons-nous, ce fut d'écrire des récits de voyages dans lesquels je mettais le moins de patos possible. J'essayais de rester le plus pragmatique possible, un peu comme dans les récits d'exploration du XIXe siècle, où l'auteur souhaitait que vous puissiez refaire le même voyage à l'aide de ses notes. Grâce à cette discipline, j'ai produit des textes que je peux encore relire aujourd'hui avec plaisir.

Après ça, je me suis mis à la fiction, et ce qui s'est passé, c'est que j'ai utilisé instinctivement le point de vue externe, qui me permet de garder de la distance avec les événements du récit. Certaines BL ont mentionné que ça produisait un texte un peu froid, mais j'ai réalisé plus tard que c'était tout simplement la seule façon à l'époque que j'avais pour pouvoir gérer le récit, du point de vue émotionnel.
Je travaille doucement à passer sur un point de vue interne, mais ça a ses limites, j'ai récemment abandonné un texte qui me prenait trop aux tripes.

Bref, tout ça pour dire que je pense que c'est un sentiment normal, et qu'une idée de travail serait de te donner des contraintes de point de vue, afin de doser ton implication dans ton récit.

Sur ce, courage ! (et viens jouer dans le Port Incertain, c'est cool, et ça permet de continuer à écrire même si on ne gagnera pas le prix Hugo avec ça! :yata: )
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tam
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par tam »

Alors les coups durs irl qui impacte mes écrits ça oui je connais. Un seul projet a résisté à tout ça. C’est mon projet insubmersible, inviolable. Il m'accompagne depuis l'adolescence et mute avec moi ... sauf les personnages . Même si des fois je me loupe et que je n'arrive pas à retranscrire tout ce qu'ils pensent, ils sont solides et ont leur vie propre. Des fois j'ai des "chocs" émotionnels par rapport à ce qu'ils vivent parce que ça fait écho mais je les vois comme des amis. Finalement je pense que c'est la clef en ce qui me concerne. Mieux que les thèmes que tu développes, je pense que s'attacher à l'identité profonde des personnages et peu importe leurs défauts et leurs qualités, tant qu'ils sont, comme nous, en proie à leur chemin de vie, permet de me détacher émotionnellement de mes écrits.
Je ne sais pas si ça fera sens pour toi et si cela te sera utile mais bon je laisse ça ici tel quel. Pour être le plus clair possible : voir ses personnages en tant que tels avec leur vie. Pas la tienne.

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Liseuse_Ambulante
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Liseuse_Ambulante »

Léonore a écrit :
mer. janv. 03, 2024 7:25 pm
À la base, les textes que tu as abandonnés, tu voulais en faire quoi une fois qu'ils auraient été finis de corriger ?
Sur la quantité, il y a deux manuscrits que j'aurais peut-être essayé de publier, si les corrections et les BL avaient confirmé que ça valait la peine (mais comme ils ne sont pas arrivés jusque-là...). Les autres histoires, c'était plus pour m'amuser et développer des idées qui me travaillaient.
Modifié en dernier par Liseuse_Ambulante le jeu. janv. 04, 2024 1:24 am, modifié 1 fois.
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Liseuse_Ambulante »

Pi. a écrit :
mer. janv. 03, 2024 7:31 pm
Je ne peux pas dire que je connaisse ça, mais une partie de ce que tu décris est normal et légitime. Après un coup dur, il y a forcément une déprime qui s'installe et qui peut se prolonger en dépression si on y est sensible. Si depuis 6 an tu accumules les tuiles ou les changements importants, ça ne m'étonne pas que tu aies du mal à reprendre tes textes. Si en plus ils contiennent des éléments personnels liés à cette période, il est logique que tu te protèges en évitant de replonger ta mémoire à des moments difficiles (ou des moments positifs mais qui sont terminés)

Personnellement, je me suis mis à écrire dans un période stabilisée, mais je pense que je réagirais comme toi en zone de turbulence.

La meilleure solution serait que les événements extérieurs te laissent en paix, mais tu n'as pas d'influence dessus. :ronge:

Et avec un texte très ancien (genre celui d'il y a 6 ans), est-ce que l'effet de rejet est toujours aussi intense ?
Parce qu'une idée de base peut évoluer sur le fond, si ton vécu a évolué. Tu peux toujours reprendre un ancien canevas et le faire évoluer vers le toi actuel.

Plein de :heart: :heart: :heart: :heart: en attendant que tout s'arrange pour toi.
Merci Pi! T'inquiètes, tout s'est arrangé et je suis dans une bonne passe stabilisée (c'est pour ça que je veux en profiter pour retrouver l'écriture de façon saine et durable).

Mes plus vieux textes étaient tournées vers la dystopie (influencés par les Hunger games et autres séries que je lisais à l'époque :mrgreen: ). C'est plus du tout ma cam', maintenant. Mais je pourrais peut-être essayer de sauver le canevas de mes projets plus récents, ou m'en inspirer sans les trucs non désirés. Ça rejoindrait l'idée de Tam, qui parlait de s'accrocher aux personnages. J'ai sûrement des personnages ou des bouts d'univers ou de scénarios "sauvables" que je pourrais réinjecter dans un contexte moins sensible... Il faut que je creuse la question :perplexe:
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Liseuse_Ambulante »

Kaouraintin a écrit :
mer. janv. 03, 2024 8:17 pm
Hello

Je vois assez bien ce dont tu parles. Pendant très longtemps, j'écrivais seulement des poèmes, que je réalisais en une demi-journée, et que j'évitais de relire ensuite (car ils me mettaient mal à l'aise) ou que je perdais (solution de facilité).
Ce qui m'a lancé dans l'écriture plus "long terme", dirons-nous, ce fut d'écrire des récits de voyages dans lesquels je mettais le moins de patos possible. J'essayais de rester le plus pragmatique possible, un peu comme dans les récits d'exploration du XIXe siècle, où l'auteur souhaitait que vous puissiez refaire le même voyage à l'aide de ses notes. Grâce à cette discipline, j'ai produit des textes que je peux encore relire aujourd'hui avec plaisir.

Après ça, je me suis mis à la fiction, et ce qui s'est passé, c'est que j'ai utilisé instinctivement le point de vue externe, qui me permet de garder de la distance avec les événements du récit. Certaines BL ont mentionné que ça produisait un texte un peu froid, mais j'ai réalisé plus tard que c'était tout simplement la seule façon à l'époque que j'avais pour pouvoir gérer le récit, du point de vue émotionnel.
Je travaille doucement à passer sur un point de vue interne, mais ça a ses limites, j'ai récemment abandonné un texte qui me prenait trop aux tripes.

Bref, tout ça pour dire que je pense que c'est un sentiment normal, et qu'une idée de travail serait de te donner des contraintes de point de vue, afin de doser ton implication dans ton récit.

Sur ce, courage ! (et viens jouer dans le Port Incertain, c'est cool, et ça permet de continuer à écrire même si on ne gagnera pas le prix Hugo avec ça! :yata: )
Merci Kaouraintin, c'est super intéressant ce que tu proposes (et je comprends tout à fait le coup des poèmes; cet été, j'ai brûlé un vieux carnet de poèmes sans même relire. Rien de plus chargé en patos qu'un poème, je trouve).

Je n'ai jamais essayé de point de vue externe, étant une lectrice habituée à l'interne et l'appréciant beaucoup. Mais tu ne donnes envie d'essayer! Aurais-tu des romans de fantasy/fantastique écrit d'un point de vue externe à me conseiller éventuellement? Comme lire, c'est se former :)

Bon courage pour tes essais en point de vue interne! :pompom:
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Liseuse_Ambulante
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Liseuse_Ambulante »

tam a écrit :
mer. janv. 03, 2024 11:54 pm
Alors les coups durs irl qui impacte mes écrits ça oui je connais. Un seul projet a résisté à tout ça. C’est mon projet insubmersible, inviolable. Il m'accompagne depuis l'adolescence et mute avec moi ... sauf les personnages . Même si des fois je me loupe et que je n'arrive pas à retranscrire tout ce qu'ils pensent, ils sont solides et ont leur vie propre. Des fois j'ai des "chocs" émotionnels par rapport à ce qu'ils vivent parce que ça fait écho mais je les vois comme des amis. Finalement je pense que c'est la clef en ce qui me concerne. Mieux que les thèmes que tu développes, je pense que s'attacher à l'identité profonde des personnages et peu importe leurs défauts et leurs qualités, tant qu'ils sont, comme nous, en proie à leur chemin de vie, permet de me détacher émotionnellement de mes écrits.
Je ne sais pas si ça fera sens pour toi et si cela te sera utile mais bon je laisse ça ici tel quel. Pour être le plus clair possible : voir ses personnages en tant que tels avec leur vie. Pas la tienne.
Merci Tam, tu m'as donné beaucoup à réfléchir. Dans un de mes projets sur lequel j'avais au moins deux ans, les personnages étaient devenus un peu comme des amis, comme tu le décris. Et en y pensant aujourd'hui, certains pourraient peut-être l'être encore et vivre leur petite vie, peu importe l'univers. En y pensant à l'instant, je pourrais peut-être creuser pour les sauver de l'abandon et les réinjecter dans un contexte moins sensible.

J'ai d'autres personnages, par contre, qui étaient trop inspirés de personnes réelles aujourd'hui perdues. Ceux-là, je crains que, même si j'aimais les écrire à l'époque, ils ne puissent pas avoir leur vie propre. Il faudrait peut-être que j'apprenne à moins m'inspirer de mes proches pour mes futurs personnages.

En tout cas, je vais réfléchir sérieusement à tout ça. Merci! :croise:
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Léonore
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Léonore »

Liseuse_Ambulante a écrit :
jeu. janv. 04, 2024 1:02 am
Léonore a écrit :
mer. janv. 03, 2024 7:25 pm
À la base, les textes que tu as abandonnés, tu voulais en faire quoi une fois qu'ils auraient été finis de corriger ?
Sur la quantité, il y a deux manuscrits que j'aurais peut-être essayé de publier, si les corrections et les BL avaient confirmé que ça valaient la peine (mais comme ils ne sont pas arrivés jusque-là...). Les autres histoires, c'était plus pour m'amuser et développer des idées qui me travaillaient.
D'accord, donc dans le lot il y a quand même des textes que tu destines à faire lire à autrui.
Partant de là, je vais te poser des questions, des questions dont je n'ai pas envie de lire les réponses. Des réponses qui n'appartiennent qu'à toi.

Pourquoi désires-tu exposer ta vie personnelle dans tes textes ? Parce que c'est ça qui fait que tes textes t'intéressent, ça j'ai compris, mais justement, qu'est-ce qui fait que c'est cette condition qui te motive ?
Liseuse_Ambulante a écrit :
mer. janv. 03, 2024 4:25 pm
Il a un drame ou un changement important dans ma vie réelle : décès, rupture, déménagement, peu importe.
[...]
Je ne supporte plus d'y voir les trucs personnels que j'y ai mis et qui ont changé avec la situation vécue. C'est devenu faux et douloureux.
En quoi ces choses personnelles sont devenues "fausses" ? La situation à changé, oui. Mais c'est toujours le cas pour tout, rien est éternel. Par contre les histoires écrites le sont toujours à un instant T.
Par exemple, imaginons qu'il y aie deux personnages très amoureux dans une de tes histoires et que tu t'es inspirée de ton couple d'alors pour l'écrire. Si toi et ta/ton compagne/compagnon vous vous êtes séparés, en revanche l'histoire écrite n'a pas changée. Et peut-être même que c'est une bonne histoire. Mais pourquoi toi tu as besoin que ça représente ta réalité de maintenant ? Comme une sorte d'absolu intemporel qui ne peut de toute manière pas exister ?
Liseuse_Ambulante a écrit :
mer. janv. 03, 2024 4:25 pm
Le plus frustrant, c'est que je vais très bien dans ma vie, j'ai fait la paix avec mon passé avec de l'aide, mais je n'ai juste pas envie de replonger dans un manuscrit qui appartient à la moi du passé qui ne savait pas ce que je sais aujourd'hui.
Il me semble plutôt que si, c'est justement de ça dont tu as envie, sinon tu ne serais probablement pas ici à demander notre aide, précisément à ce sujet. Et donc ma question c'est, pourquoi tu continues de le faire ? Qu'est-ce que ça t’apporte ? Attention, ce n'est pas une question rhétorique à laquelle j'attendrais un "oui tu as raison, ça ne m'apporte rien." Non, ce n'est pas ça. C'est vraiment de chercher à te demander, "Et si je parvenais à finalement reprendre ce texte et a le retravailler comme j'en ai envie, si j'atteignais mon idéal, qu'est-ce que j'aurais accompli ?" "Qu'est-ce que, pour moi, ça changerait ?"


Voilà. J'espère que ma modeste contribution te permettra d'avancer dans ton écriture. Et si jamais je me suis complètement plantée dans mon interprétation de ton problème, fait juste comme si je n'avais rien dit. ;)
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par tam »

Liseuse_Ambulante a écrit :
jeu. janv. 04, 2024 1:35 am
tam a écrit :
mer. janv. 03, 2024 11:54 pm
Alors les coups durs irl qui impacte mes écrits ça oui je connais. Un seul projet a résisté à tout ça. C’est mon projet insubmersible, inviolable. Il m'accompagne depuis l'adolescence et mute avec moi ... sauf les personnages . Même si des fois je me loupe et que je n'arrive pas à retranscrire tout ce qu'ils pensent, ils sont solides et ont leur vie propre. Des fois j'ai des "chocs" émotionnels par rapport à ce qu'ils vivent parce que ça fait écho mais je les vois comme des amis. Finalement je pense que c'est la clef en ce qui me concerne. Mieux que les thèmes que tu développes, je pense que s'attacher à l'identité profonde des personnages et peu importe leurs défauts et leurs qualités, tant qu'ils sont, comme nous, en proie à leur chemin de vie, permet de me détacher émotionnellement de mes écrits.
Je ne sais pas si ça fera sens pour toi et si cela te sera utile mais bon je laisse ça ici tel quel. Pour être le plus clair possible : voir ses personnages en tant que tels avec leur vie. Pas la tienne.
Merci Tam, tu m'as donné beaucoup à réfléchir. Dans un de mes projets sur lequel j'avais au moins deux ans, les personnages étaient devenus un peu comme des amis, comme tu le décris. Et en y pensant aujourd'hui, certains pourraient peut-être l'être encore et vivre leur petite vie, peu importe l'univers. En y pensant à l'instant, je pourrais peut-être creuser pour les sauver de l'abandon et les réinjecter dans un contexte moins sensible.

J'ai d'autres personnages, par contre, qui étaient trop inspirés de personnes réelles aujourd'hui perdues. Ceux-là, je crains que, même si j'aimais les écrire à l'époque, ils ne puissent pas avoir leur vie propre. Il faudrait peut-être que j'apprenne à moins m'inspirer de mes proches pour mes futurs personnages.

En tout cas, je vais réfléchir sérieusement à tout ça. Merci! :croise:
Pour compléter avec la réflexion sur comment prendre de la distance avec nos écrits (ce qui peut être utile), j'ajouterai que lire des ouvrages traitant de l'écriture : construire des personnages, des récits (structures, scénarios), etc... permet aussi de démonter les mécanismes à l'oeuvre dans un texte et du coup ça aide beaucoup à se placer sur un plan purement technique et donc à prendre de la hauteur, à moins se laisser déborder par l'affect. Le dernier que j'ai lu n'était pas sur l'écriture mais le métier de comédien, et j'ai adoré voir comment un acteur pouvait s'y prendre pour insuffler la vie à un personnage par plein de petits détails qui s'avèrent pertinents et essentiels :)

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Gwendal Biguegé
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Gwendal Biguegé »

Bonjour Liseuse_Ambulante !

Il y a déjà eu beaucoup de choses de dites, donc je vais peut-être faites des redites, mais ton sujet m'intéresse alors je voulais tout de même apporter mon regard.

Avant toute chose, je souhaite essayer de t'aider, mais il convient malgré tout de bien prendre en compte qu'il s'agit de mon propre regard, et que de fait nous ne fonctionnons pas forcément pareil. Alors si tu ne retrouves pas dans ce que je dis, et bien tu jettes ! Personne n'est pareil, et surtout sur des sujets si sensibles.

Donc pour ma part je trouve ça dommage d'abandonner des personnages et des histoires qui s'inspirent de proches ou d'évènement que tu as vécus suite à des nouveaux évènements qui t'ont bouleversé. C'est il me semble faire subir à tes personnages des choses qu'ils n'ont pas vécues. Il est normal que ton ressenti transparaisse par eux, mais tu te sers de personnes connues seulement pour créer tes personnages, pas pour les faire évoluer en fonction des évènements qui arrivent à leurs inspirateurs. D'abord ce n'est pas cohérent si tes personnages évoluent suite à des choses qu'ils ne vivent pas. Mais surtout je trouve ça triste de faire subir les mêmes tourments aux personnages qu'aux modèles ! L'écriture est à mon sens un bon moyen de s'évader et de décider soi-même de ce qu'il advient et de comment tournent les évènements. C'est justement dans cet espace que tu peux choisir ce qui arrive à tes personnages. Tu peux les y protéger des tourments qui arrivent aux modèles qui les ont inspirés. Il y a beaucoup de moi dans chacun de mes personnages (en vérité chaque personnage possède une ou plusieurs facettes de ma personnalité en général), pour autant une fois que les personnages sont posés ils se détachent de moi ou de leur modèle. C'est un plaisir de pouvoir les manier justement comme j'aurais voulu être, ou comme j'aurais souhaité que réagissent leurs inspirateurs. J'ai des personnages inspirés d'amis perdus de vue, et au contraire retrouver ces personnages me permet de garder un lien intemporel avec des éléments de personnalité qui me plaisaient, peu importe si les liens réels sont rompus.

Je pense que les personnages représentent une vision de quelqu'un ou quelque chose à un instant T. Ils évolueront ensuite en fonction de ce qui leur arrive à eux. Des réactions ou évènement dans ta vie ont rendu difficiles les relations avec le modèle ? Tant pis, libre à toi justement de préserver les personnages justement pour profiter un peu de ce que tu aurais plutôt attendu pour toi dans la réalité. Bien des choses tristes peuvent nous amener à évoluer, et il est bon parfois de garder son espace d'écriture pour imaginer un monde meilleur plutôt que de reproduire systématiquement la réalité !

Cela peut paraitre bizarre, mais tes réflexions m'ont fait penser aux tatouages. Beaucoup de gens ont peur d'avoir un tatouage de peur qu'en évoluant ils ne soient plus en accord avec les symboliques qu'ils ont gravé dans leur peau. Je peux le comprendre. Pour ma part, qui adore les tatouages, je ne cherche pas à les rendre intemporels mais simplement la marque de choses que j'ai aimé ou de valeurs qui me plaisent à l'instant ou je choisi mon motif. Mon avis pourra changer dans le temps, il n'en restera pas moins qu'à un moment donné dans ma vie, j'aurais pensé ou aimé ceci ou cela, et cela restera un fait. C'est pareil pour tes personnages. Les modèles ont changé et des évènement marquant sont arrivés, peu importe, tes personnages eux restent le reflet de ce que leur modèle a été à l'époque. Libre à toi de les faire évoluer à partir de là mais sans lien avec le réel.

Pour en revenir à l'écriture proprement dite, c'est justement en essayant de modifier tes persos après coup qu'ils vont sembler faux. Ils ne peuvent pas avoir évolué en fcontion de choses qu'ils n'ont pas vécus. Quand on observe des adolescents (je fais beaucoup ça à la salle de sport), on peut avoir l'impression qu'ils sont faux et que leurs réflexions sont irrationnelles. En fait cela est simplement le reflet de leur expérience émotionnelle trop courte. Eux sont bien réelles, mais leur donner trop de sagesse les rendrait faux, alors qu'ils correspondraient mieux à notre ressenti d'adulte. Au contraire, conserver les personnages tels que tu les as créés est le meilleur moyen de les rendre vrais ! Si tu veux qu'ils évoluent ensuite, fais le grâce à l'histoire, cela leur donnera l'expérience nécessaire pour justifier leur évolution. Cela peut aussi te permettre de les faire réagir comme tu aurais souhaité que cela se passe, c'est une bonne façon d'apaiser ta conscience comme dans un exercice psy !

Moi j'adore mes personnages, beaucoup sont justement des idéaux que j'aimerais atteindre (pourtant ils ont plein de défaut). S'ils me dépassent, sont meilleurs que moi, ou ne réagissent pas comme ça, et bien tant mieux ! Cela me donne juste l'envie de changer moi, car mes personnages reflètent ce que je souhaite, je les écris dans des moments de calme, alors que moi-même je suis contraint de réagir à chaud à la vie, et souvent je ne me plais pas du tout ! Alors franchement, si des personnages devaient être comme moi je suis, je crois que j'achèterai 2 exemplaires de mon bouquin : un pour mon psy, ça lui faciliterai bien la tâche, un autre pour le brûler, parce que j'ai déjà assez de mal à me supporter en vrai, je ne vais pas me forcer avec ce que j'écris !

Je crains que ce que j'ai dit ne soit pas très clair, j'ai peur de ne pas avoir aidé du tout, mais bon j'ai essayé au moins, après mon cerveau est tortueux et ne correspond malheureusement pas à la façon d'être de grand monde, mais c'est fait de bon coeur, alors désolé et bon courage !
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Soah
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Soah »

Hey !

Ce qui suit n'est que mon opinion et ne reflète que mon expérience mais, pour moi, l'écriture est quelque chose de très personnel et donc, d'intime. Quoi qu'on y fasse, il y aura toujours une partie de nous dans nos textes et ce, même si on ne s'en rend pas compte au premier abord. Nous avons toustes des thématiques récurrentes dans notre travail, des choses qui nous plaisent plus que d’autres en terme de genre et de développement. De fait, lorsque l'on corrige un manuscrit que l'on a souvent mis longtemps à écrire puis à reposer, ça peut coincer : entre le moment où l'on a posé le point final du premier et le début des corrections, nous ne sommes pas la même personne. Nos écrits sont comme des Polaroïds, des fragments d'un instant i sur lequel, eh bien, il n'est pas évident de revenir.

Un bon texte, une bonne histoire, à mes yeux, est avant tout une oeuvre sincère. Ainsi, mettre une part de soi - de ses joies, de ses peines et de sa souffrance - est une façon de rendre un texte "vrai".
Je mets ceci est spoiler, puisqu'il s'agit d'une expérience personnelle qui n'a pas vocation à intéresser tout le monde :
Spoiler: montrer
J'ai perdu ma mère jeune, à l'aube de mes quatorze ans. Et, il y a quelques années, j'avais entrepris de raconter l'expérience de mon deuil au travers d'un court roman mettant en scène un personnage que je qualifierais de "self-insert" et un chat parlant qui, ma foi, était l'adulte que j'étais lors de la rédaction. Dans ce roman, rien n'était inventé, tout était vrai. Au final, même si j'avais proposé ce roman à une ME dans l'euphorie d'avoir terminé un texte et de l'avoir retravaillé, je suis bien contente d'avoir pris un vent puisqu'aujourd'hui, je réalise que c'était une histoire thérapeutique. En 2023, j'ai été diag TSA notamment et j'ai appris par la même occasion que les personnes neuroA ne faisaient pas l'expérience du deuil comme les personnes neuroT.
Bref, même si aujourd'hui tu es en paix avec ton passé, le toi de l'époque ne l'était peut-être pas et se servait de ces histoires pour expurger quelque chose qui avait besoin de l'être. Attention, c'est la minute psy de comptoir mais : tu n'es plus la personne qui a écrit ces textes et, de fait, ce n'est peut-être pas l'histoire en elle-même que tu juges mais peut-être toi-même ?

Et puis, même si on a tendance à l'oublier : toutes les histoires ne sont pas destinées à aboutir, à exister. Peut-être qu'en écrivant avec l'objectif d'achever quelque chose dans un but particulier (publication - que ça soit sur le web ou en ME/AE -, quota de mots... etc) plutôt que pour le simple plaisir d'écrire, cela te bloque ? Après tout, nous sommes notre premier public et si nous écrivons c'est pour voir naître le livre que nous voudrions lire mais qui n'existe pas encore, ne crois-tu pas ?

J'espère que mon message aura pu apporter un peu d'eau à ton moulin ! Bon courage.

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NellyParker
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par NellyParker »

C'est intéressant de voir les différents ressentis et les différentes stratégies pour mener des récits à bout malgré la charge émotionnelle qui va avec. Je viens aussi partager mon point de vue sur la question, et je tiens à dire que même si je peux aller à contre courant de ce qui a été dit avant, je pense que chaque intervention sur ce fil est légitime, ce que je m'apprête à dire n'est que le fruit de mon expérience personnelle.

Je pense tout d'abord que s'inspirer de personnes ou d'événements de notre vie réelle, même inconsciemment, est inévitable. L'écriture c'est un partage d'une partie de soi qu'on le veuille ou non. Et si l'écriture était parfaitement impersonnelle, ça en deviendrait triste à mon avis. Par ailleurs, on évolue avec le temps, il est donc normal que ce qu'on a écrit une semaine, un mois, ou une année auparavant ne résonne pas de la même manière quand on le relit. Tout cela est inévitable, et c'est quelque chose qu'il faut garder à l'esprit avant de se lancer.

Ensuite la deuxième chose importante, c'est de savoir pourquoi on écrit. Si on écrit pour le plaisir, si nos écrits n'ont pas vocation à être partagé, alors ce n'est pas grave de ne pas les terminer et de se laisser porter par ce qui nous fait vibrer sur le moment. Si on écrit pour soi mais pas forcément pour le plaisir, c'est pareil, il n'y a pas de pression à se mettre pour terminer quoi que ce soit. Quand on écrit pour soi, peu importe la raison, il peut être plus difficile de revenir sur des choses qui ne nous parlent plus ou moins, alors on va avoir tendance à abandonner ses vieux textes, et ce n'est pas forcément une fatalité.

Maintenant si on écrit dans le but d'être lu, c'est différent. On peut vouloir divertir, aider les autres, et même, soyons fous, changer le monde à travers nos écrits. Quoi qu'il en soit, pour pouvoir être lu, il faut réussir à aller au bout du processus, et parfois ça veut dire faire des concessions. Ça veut aussi dire prendre des décisions. Même si un thème ou un personnage risque de ne plus nous plaire avant la fin, il faut savoir à un moment décider de ce que l'on veut garder ou non, de ce qu'il faudra modifier en corrections ou non. Parfois ça veut dire écrire un passage même si on a pas envie sur le moment parce que c'est nécessaire à l'intrigue. Ça veut dire qu'il faut réussir à prendre sur soi et continuer à avancer dans l'écriture même les jours où le cœur n'y est ou quand on est pas dans le bon état d'esprit. Au début c'est dur, parfois même décourageant, et il y a même des moments où on perd temporairement le plaisir d'écrire, mais avec le temps, on s'habitue, ça devient de moins en moins difficile de se replonger dans le texte. En général une fois que la lassitude initiale (ou dans ton cas j'imagine que ce serait plutôt une forme de dégoût) est passée, je me rends compte que finalement ce n'est pas aussi terrible que ce que je pensais. Et puis j'ai aussi appris à me mettre dans l'ambiance que je veux retranscrire, si mon état d'esprit n'est pas le bon, je me débrouille pour le modifier. Il y a des trucs tout bêtes qui peuvent aider à ça, avoir des petits rituels avant de commencer à écrire, écouter des musiques qui correspondent à l'ambiance de la scène en cours, se mettre à la place des personnages avant chaque scène pour mieux retranscrire leurs émotions et leur regard sur le monde, ect.

Écrire pour les autres c'est un vrai travail, et ce n'est pas toujours facile. C'est rare de réussir à écrire pour les autres dès le début, il faut souvent des années avant de trouver le moyen d'écrire régulièrement sur le même projet sans le lâcher. Il m'a fallu quatre ans avant d'aborder l'écriture sérieusement, cinq ans de plus avant de réussir à me fixer sur un projet et m'y tenir, et trois ans de plus pour terminer le premier jet. Si bon nombre d'auteurs mettent une dizaine d'années avant de sortir leur premier roman, c'est parce que l'apprentissage de l'écriture est un processus long et personnel pour lequel il n'y a pas de raccourci, ni de recette miracle. La seule chose qu'on peut faire c'est continuer à écrire en essayant de nouvelles méthodes jusqu'à ce qu'on trouve celle qui nous convienne.

Pour finir, je dirais qu'il faut apprendre aussi à relativiser. On a souvent tendance à être plus dur avec nos propres écrits qu'avec ceux des autres, justement par ce que c'est personnel. Et en particulier quand un texte date un peu, on a tendance à voir ressortir les choses qui nous plaisent moins que ce soit nos défauts ou les choses dont a fini par se lasser ou ne plus aimer de la même façon. Par moments, faire une pause, prendre du recul et essayer de voir le texte comme s'il était de quelqu'un d'autre, ça peut aider à voir que finalement ce n'est pas si mal. Avoir un regard extérieur sur le texte, pas une bêta lecture, juste un regard de quelqu'un qui s'y intéresse, ça peut aussi aider.

J'espère que tu finiras par trouver ta bonne façon d'avancer.
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Gwendal Biguegé
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Re: Gros questionnement sur l'abandon de manuscrits et l'investissement de soi dans ses textes

Message par Gwendal Biguegé »

Je ne sais pas si ça se fait, mais je laisse juste un petit message pour saluer tant de sagesse ! :rougit:

Je suis tout à fait d'accord avec Nellyparker et avec nombreuses autres interventions ici-même, et si je laisse ce message, c'est surtout pour remercier toutes les petites grenouilles et Liseuse_Ambulante pour ce sujet, parce qu'il en ressort qu'il y a beaucoup de bonnes choses à prendre, pour moi en tout cas ! Et j'espère aussi pour Liseuse_Ambulante, parce que c'était quand même elle qui appelait à l'aide ! :mrgreen: En tout cas on te soutient. :chocolat:
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