Que pensez des écrivains qui écrivent sur l'acte d'écrire?

[cedricg]

Bonjour,

j'ai souvent l'inspiration qui me vient sur des textes parlant de l'acte d'écrire. Un peu comme La Part des ténèbres de Stephen King, ou l'excellent mais déroutant Nuit de l'oracle de Paul Auster. Ma question est de savoir si cela intéresse les lecteurs qui ne sont pas eux même écrivain, ou qui tout au moins n'aspirent pas à l'être.

Il est normal qu'un auteur ait envie de parler de l'écriture, c'est sa vie. Mais qu'en est il des lecteurs?
Et vous, avez vous déjà eu des inspirations de ce genre?

Cédric

[cedricg]

Je suis le seul à être concerné? Ca n'inspire clairement pas grand monde. Nous ne sommes pas tous des masochistes égocentriques?

[Mel]

Tout dépend de la façon d'amener le sujet je pense. Si c'est pour se regarder le nombril, ce n'est pas la peine mais s'il y a une véritable réflexion, ça peut être très intéressant.
Tu as une idée précise?

[Léonore]

plop

[cedricg]

Quand je parle d'égocentrique, c'est un peu de la provoc, mais je me demande si cela n'est pas perçu ainsi par les lecteurs. Moi même quand je tombe sur un livre qui parle d'un écrivain, j'ai la sensation que je suis intéressé parce que je souhaite en devenir un.

Pas d'idée précise (en dehors des livres sus-mentionnés), mais quand Paul Auster nous décrit le choix du carnet de son personnage, ou quand King décrit la matérialisation du double de l'auteur dans La part des Ténèbres, ou dans un livre plus récent où il met en scène la veuve d'un auteur (Histoire de Lisey), je me pose la question.

[Mel]

je ne les ai pas lus (d'où une question peut être débile) mais est ce que ce n'est pas plutôt une réflexion sur l'auteur que sur l'écriture?

[cedricg]

C'est dans les trois cas la mise en scène de l'auteur. Paul Auster fait une mise en abîme qui parle beaucoup de l'acte créatif pour moi, même si le personnage est étudié. King parle en effet de l'auteur, mais généralement (comme souvent chez lui) pour nous faire partager ses peurs, ses problèmes, ses souffrances.

[Maden]

C'est une idée précise et suivant ce qu'on en fait on peut même lui donner un nom : la métafiction.

Cela va bien au-delà de l'écrivain qui parle de l'écriture, c'est souvent bien plus subtil et ça se retrouve partout (une scène dans laquelle un personnage écrit une lettre à un autre personnage peut comporter un commentaire métafictionnel par exemple), bref, l'écriture n'a pas besoin d’être le thème principal du roman.

D'ailleurs, si on y est attentif, on remarque que King et Auster en fourrent dans tous leurs romans ou presque ! Souvent, le lecteur n'a pas besoin de le remarquer ou le relever. Ce sont des passages ou des scènes qui peuvent paraître banales mais qui en disent long sur le travail de l'auteur, l'écriture, la fiction, l'art... si on s'y intéresse.

Petit article wiki : http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9tafiction

Personnellement, ça m'intéresse beaucoup et j'y pense souvent dans mes textes. Surtout ne t’inquiète pas, tu es loin d’être le seul concerné

[cedricg]

S'il y a même un nom pour cela, je suis rassuré. Je vais étudier cela, ayant quelques nouvelles qui partent sur ce sujet.
Ma question demeure : est-ce que ça intéresse le lecteur qui n'a aucun velléité d'écrire?

[Anonyme_Quatre]

En fait, King se met carrément en scène dans la Tour Sombre, ce qui m'avait beaucoup beaucoup perturbée. Je ne savais pas comment l’interpréter alors ça m'a désarçonnée : il est fou ou orgueilleux ?
Sinon, je pense que pour les lecteurs non écrivains, c'est un travail comme un autre, et on le retrouve dans d'autres médias (comme les jeux vidéo avec Alan Wake il me semble, un jeu de tension où le personnage est un auteur), mais souvent, l'acte d'écrire est envisagé comme important, plus que le métier ou le passe-temps du personnage, et ça en fait un acte presque fantastique (au sens littéraire du terme).
Je sais pas si je suis clair

[Mélanie]

En fait, King se met carrément en scène dans la Tour Sombre, ce qui m'avait beaucoup beaucoup perturbée. Je ne savais pas comment l’interpréter alors ça m'a désarçonnée : il est fou ou orgueilleux ?

C’est vrai, j’avais aussi eu une réaction mitigée. Mais, je trouve aussi que ça fait sens avec le reste du récit.

En tant que lectrice, je ne crois pas que ça me gênerait. Un écrivain reste un être humain, avec ses aspérités et ses contradictions, et c’est ça qui fait le principal intérêt d’un roman.
Ensuite, je changerais peut-être d’avis si ça tourne à l’auto-fiction. C’est un genre qui me met un peu mal à l’aise.

Je me demande quand même si c’est pas une thématique que tu retrouveras davantage dans la blanche que dans l’Imaginaire.

[cedricg]

je vois ce terme de blanche sans en deviner le sens depuis que je suis ici. Si ce n'est pas de la drogue, qu'est-ce?

[Mélanie]

je vois ce terme de blanche sans en deviner le sens depuis que je suis ici. Si ce n'est pas de la drogue, qu'est-ce?

C’est la littérature générale, sans éléments de fantastique.
Le terme vient du nom d’une collection de Gallimard, si je me souviens bien.

[Milora]

Je rejoins les avis postés jusqu'ici...

Côté réception par le lecteur, je dirais que, de toute façon, on peut lire un roman sur un peintre sans savoir soi-même dans quel sens se tient un pinceau. On peut lire et aimer des histoires de valeureux chevaliers ou de mages aux grands pouvoirs, sans en être un soi-même. Du coup, si c'est bien mené, je ne vois pas ce qui empêcher un lecteur d'apprécier un texte qui parle d'écriture d'un texte. En plus, un lecteur aime lire, et lire et écrire c'est proche. Même s'il n'écrit pas lui-même, il aura sans doute plus d'affinité avec quelque chose qui parle de l'écriture qu'avec quelque chose qui parle de la réparation d'une moto (il peut tout à fait aimer par ailleurs la mécanique, hein, mais ce ne sera pas le fait d'aimer lire qui impliquera ce goût. Je sais pas si je suis très claire )


Sinon, pour l'aspect prétentieux, comme disait Mel, ça dépend de comment c'est fait. J'ai pas lu les livres de Stephen King dont vous parlez, mais quand, en classe, on étudie les Confessions de Rousseau, où si je me souviens bien il raconte pourquoi il écrit (donc ça correspond à ce que tu évoques), je pense qu'on a été nombreux à le trouver imbuvable tant il semble imbu de lui-même.
Mais d'autres fois, c'est juste intéressant, voire passionnant, quand l'auteur arrive à le faire passer l'intérêt de raconter l'écriture.
Et puis il y a tous les cas où l'écriture est juste un support à l'intrigue. Je veux dire qu'il ne s'agit pas de montrer quelqu'un qui écrit ou de mettre en scène l'auteur ; mais par exemple de montrer une évolution psychologique d'un personnage qui en vient à prendre la plume (l'intérêt, là, n'est pas qu'il écrit, mais c'est une sorte de mise en abîme du texte où on s'aperçoit que c'est écrit par le personnage - je sais pas comment dire) ; ou encore toutes ces histoires où le personnage du récit fictif sort du texte ou celui de l'auteur devient obsédé par son texte ou hallucine, etc. etc. Là ça parle d'écriture, mais l'écriture c'est juste une péripétie, ça n'a rien d'égocentrique ni de contemplatif...

[Crazy]

En fait, King se met carrément en scène dans la Tour Sombre, ce qui m'avait beaucoup beaucoup perturbée. Je ne savais pas comment l’interpréter alors ça m'a désarçonnée : il est fou ou orgueilleux ?

Je n'ai pas vraiment eu ce sentiment-là : j'ai eu l'impression que son alter ego romancé était dépeint sans aucune complaisance, voire avec une touche de mépris.