Je suis d'accord. Comme tu le dis, cela dépend beaucoup du point de vue adopté :timioko a écrit : ↑ven. mai 10, 2019 6:22 amC'est un peu plus compliqué que ça quand même, non ? Si j'écris une histoire sur ma mamie, de son PV, il lui est arrivé des choses, des faits, qu'elle met sur le compte du divin/ de la sorcellerie. Il y a effectivement deux actions : faire une demande puis guérir/ voir le problème résolu. Un PV omniscient pourra donner une autre explication, un PV interne intégrera la preuve de l'existence de la Magie.
Pour la question de base je dirais que la frontière elle est dans la volonté de l'auteur. Veux- tu faire un roman historique en parlant des croyances de l'époque, veux-tu t'inspirer de l'histoire et des croyances pour en faire autre chose, veux-tu que le lecteur y croit, ou qu'il soit perdu sans savoir si tu l'a entraîné dans de l'imaginaire ?
- externe, avec un narrateur omniscient qui peut montrer que les croyances du personnage ne sont que des croyances, auquel cas on reste dans l'historique.
- ou interne, où on ne sort pas la vision du monde qu'ont les personnages, vision qui peut pleinement intégrer la croyance en l'efficacité de rites religieux, magiques, ou de pratiques de voyance, d'astrologie, de pseudo-sciences, etc. Dans ce cas, on bascule dans l'imaginaire, ou dans ce que j'aime appeler l'historico-fantastique : des histoires merveilleuses, mais où le merveilleux ne fait que refléter le plus fidèlement possible les croyances internes à la communauté humaine d'un lieu et d'une époque données qu'on met en scène.
Ce sera plus clair avec des exemples. L'exemple typique récent de l'historico-fantastique, pour moi, c'est le cycle Rois du monde de Jean-Philippe Jaworski, qui se déroule en Gaule préromaine autour du VIIe siècle avant J.-C. Mais, à la lecture, c'est de la fantasy. Le personnage passe pour mort après une bataille, sauf qu'il n'est pas mort. Rien d'irrationnel là-dedans. Sauf que tous les personnages, à commencer par le narrateur, réagissent en fonction de leur culture, de manière irrationnelle, en mettant en jeu des puissances surnaturelles : en gros, le personnage a beau être vivant, il est considéré par les autres (et se considère lui-même) comme pas vraiment revenu du royaume des morts, et il doit accomplir un rite, une quête, etc. pour revenir parmi les vivants pour de bon. Même chose dans les chapitres montrant ses souvenirs d'enfance et de jeunesse : il rencontre quelqu'un dans une forêt qui est peut-être un géant, qui a peut-être des pouvoirs, mais la narration brouille complètement les pistes, à dessein, et le résultat relève bien plus du merveilleux que du réalisme au sens où on l'entend habituellement. A mon sens, c'est le pinnacle du réalisme historique : on prend en compte l'irrationnel et l'imaginaire collectif de la culture où se déroule l'histoire. Mais structurellement, plus rien ne distingue ça d'un roman de fantasy.
Entre les deux, il y a toujours une zone floue.