Avant de vous répondre, juste l'instant "pub" pour vous dire que lundi j'ai publié un article où je me suis amusée à comparer la création d'un jardin et celle d'une histoire, anecdotes personnelles à l'appui :
Métaphore fleurie sur l'écriture.
nothoi a écrit : ↑lun. juil. 19, 2021 11:45 am
Après, j'accorde une attention / importance bien plus grande au passé du personnage (éducation, impact socio-économique, traumatisme, entourage, famille, univers) qu'aux archétypes. Pour moi, c'est le premier facteur qui va déterminer une bonne part des actions du personnage - (une alpha en off m'avait cependant reproché d'avoir une approche un peu déterministe de mes personnages).
Les archétypes (ce que j'ai compris de tes explications, en tout cas ; donc j'ai pu me tromper) vont plutôt matérialiser des dynamiques internes (curiosité, besoin de comprendre, d'être aimé ou de protéger les autres) du personnage.
C'est une approche super intéressante aussi ! Et, en effet, je vois les archétypes tout à fait comme la matérialisation des dynamiques internes.
Le truc que je trouve encore plus intéressant, c'est que je me rends compte que tout le travail que tu fais sur le passé du personnage, il n'est pas absent chez moi. Par contre, il se fait de manière très inconsciente et instinctive. Mes personnages réagissent clairement en fonction de tous ces éléments de leur passé, mais je ne ressens pas le besoin de faire un travail conscient et réfléchi sur ça parce que ça me vient naturellement. Là où les nuances qu'apportent les archétypes ne sont pas quelque chose qui me vient très naturellement.
Et je vais dans ton sens : un bon personnage, c'est la combinaison des influences extérieures (le passé) et des influences intérieures (les archétypes). Pour un même passé, deux personnages d'archétypes différents réagiront différemment. Mais de la même manière, deux personnages de même archétype peuvent l'incarner de manière totalement différente en fonction de leur passé. (Je pense par exemple à mon héroïne Lizzie, qui appartient à l'archétype héroïne/guerrière. Elle en a les traits de caractère, comme le courage, la discipline et la résistance. Mais de par son BG, c'est surtout à travers son rapport à la harpe que cet archétype s'exprime, parce que c'est sur cette voie qu'on l'a encouragée dans sa famille à aller.)
Bref, tout ça pour dire qu'il n'y a pas une approche plus valide qu'une autre.
Il faut surtout trouver les outils qui nous aident par rapport aux points sur lesquels on est à l'aise et ceux où on a besoin de s'appuyer sur quelque chose pour aller plus loin.
Elikya a écrit : ↑lun. juil. 19, 2021 1:51 pm
Par contre, j’avoue que les archétypes ne me parlent pas du tout, je préfère Truby.
Je crois que ça serait très intéressant (si tu es d'accord
) qu'on rédige un jour un article croisé autour de notre approche de ce que propose Truby et de pourquoi j'en trouve une partie très artificielle là où, à toi, ça t'est très utile.
Il me semble que ça serait une excellente démonstration du fait qu'il n'y a pas de méthodes universelle en narration, mais que chacun doit trouver les outils qui lui parlent au mieux.
Doubar a écrit : ↑jeu. juil. 22, 2021 2:38 pm
Je suis déjà passé par ici en sous-marin et j'ai lu (que dis-je ! dévoré) plusieurs articles de ton blog.
pour ton retour Doubar.
Et génial si j'ai pu te faire découvrir Lionel Davoust !
Doubar a écrit : ↑jeu. juil. 22, 2021 2:38 pm
Les deux articles sur les archétypes sont intéressant, mais j'ai un peu de mal à faire le lien entre les différentes combinaisons de mission de vie/rapport au monde et le personnage qui leur correspond. Par exemple pour la combinaison social/groupe = orphelin.e, j'avoue que je vois pas bien le rapport
Je respecte le fait que ça puisse être utile pour la caractérisation, mais je trouve aussi qu'il y a un côté un peu "artificiel".
Peut-être prend-tu trop à la lettre le "nom" de chacun des archétypes ? (C'est juste une hypothèse, je ne suis pas 100% sûre d'avoir bien cerné ce qui te pose problème.
)
Les noms des archétypes ne sont que des étiquettes pour les distinguer rapidement, que Jung a donné en fonction des archétypes narratifs qui incarnaient le plus souvent ces traits de caractère dans les histoires. Mais contrairement aux archétypes narratifs qu'on peut parfois trouver sur certains sites d'écriture (lae héro.ïne, lae messager.e, lae mentor, etc.), les archétypes de Jung ne sont pas des archétypes de "fonction", mais de "caractère". C'est pour ça que j'ai indiqué à chaque fois d'autres noms qui pourraient leur correspondre, pour montrer qu'ils peuvent s'incarner de différentes façons (et ces noms ne sont pas limitatifs).
Pour reprendre le cas de l'orphelin.e, ce nom est associé à cet archétype parce qu'en littérature, beaucoup de personnages orphelins répondent à cet archétype (à commencer par Harry Potter, par exemple). Cependant, ça ne veut absolument pas dire que tout personnage orphelin doit forcément appartenir à cet archétype, ou qu'un personnage répondant à cet archétype doit forcément être orphelin. C'est d'ailleurs pour ça que je lui préfère le nom de "réaliste", qui me semble plus généralisable. L'important dans cet archétype, c'est que les personnes qui l'incarnent cherchent à s'accomplir en se connectant aux autres et pour eux, cette connexion passe par l'appartenance à un groupe. Si un.e orphelin.e incarne facilement cet archétype, c'est parce qu'il est facile de se dire qu'une personne qui a perdu ses parents (et n'a pas eu la chance d'avoir une famille de substitution) va avoir un désir profond de nouer des liens et d'appartenir à un groupe soudé (i.e. la famille de substitution). Mais si je prends le cas d'Ewilan, qui est aussi une "orpheline" (c'est en tout cas ce qu'elle pense au début du roman) recueillie par une famille pas du tout aimante (donc un point de départ très similaire à celui de Harry Potter), elle ne répond pourtant pas du tout à l'archétype de l'orpheline. Elle est au contraire l'incarnation de la créatrice et de la leader en devenir.
C'est pour ça que, pour ma part, je ne trouve pas les archétypes "artificiels". Parce qu'ils me parlent, je n'ai jamais eu l'impression qu'ils m'enfermaient dans quelque chose de défini, mais qu'au contraire ils me permettaient des déclinaisons infinies et extrêmement riches.
Mais comme je le disais dans mes réponses à nothoi et Elikya, je pense que tout outil va nous paraître donner des résultats artificiels dès lors qu'il ne nous parle pas, voir permet de réaliser quelque chose sur laquelle on est en fait naturellement très à l'aise (et du coup un outil devient alors contre-productif, puisqu'il sera toujours moins performant qu'un talent naturel si on peut l'exprimer ainsi).
Là où je pense qu'il peut rester utile toutefois (je parle de n'importe quel outil narratif, de manière générale), c'est pour une analyse a posteriori. Pour se rendre compte de ce qu'on a fait instinctivement, afin d'entériner cette force dans notre attirail d'auteurice.
(Mais là, c'est peut-être mon archétype "sage" qui parle, avec son besoin de tout comprendre et intellectualiser.
)