Oui, les phases du deuil sont une bonne base pour montrer une progression sur des sentiments complexes, ayant trait au désespoir.
Le désespoir a été le fond de commerce de pas mal de mes textes (dont le roman que je pense retravailler
), et j'ai exploré beaucoup de choses très différentes.
A mon avis, tout dépend du style que tu utilises pour le reste de l'histoire, et du caractère de ton personnage. Il n'y a pas deux manières d'être désespéré. Comme l'ont souligné d'autres personnes, certains sont dans le déni, d'autres dans la compensation etc. Ce que tu as l'air d'évoquer est une sorte de descente aux enfers. Dans la descente aux enfers, un motif le plus fréquent, c'est le côté sables mouvants : plus tu te débats, et plus tu t'enfonces. Plus tu essaies de t'en sortir, et plus l'impasse t'écrase. C'est éventuellement un procédé que tu peux utiliser pour ton personnage s'il est du genre, en temps normal, à lutter : tu peux développer toutes ses ultimes tentatives de lutte contre lui-même, contre le monde. Et accentuer les obstacles infranchissables que lui assènent le monde ou sa propre rationalité. Jusqu'à ce qu'il se trouve, en quelque sorte, piégé en lui-même.
Je ne sais pas quelle est l'étape d'après "où il se sent basculer dans la folie" mais c'est, au fond, l'étape la plus importante, car c'est peut-être elle qui conditionne tout le processus qui l'anticipe (va-t-il craquer ou pas, en fait ? S'il doit craquer, il faut le préparer, s'il se reprend, il faut aussi le préparer. Les dynamiques sont différentes. S'il doit craquer, le plus payant est de le montrer en pleine confiance, en ascension avant de le briser complètement, pour créer le choc. S'il doit se reprendre, le montrer lentement descendre au fond fond du gouffre pour lui donner une petite pichenette qui l'aide à remonter à la dernière minute, c'est payant. C'est beaucoup une affaire de dynamique et d'énergie.)
Après, le style : si tu utilises un style très introspectif ou si tu es plus dans l'action dans le reste du texte... détermine énormément le traitement du désespoir. Le style introspectif peut tendre vers la poésie – pour susciter le "magma" de la pensée ou au contraire le "néant" de la pensée du personnage déchiré par un dilemme impossible. Si tu es dans l'action dans le reste du texte, voire dans une focalisation externe, les choses ne pourront se traduire que par l'action, voire la réaction de ton personnage face à ce qui lui arrive – du plus anodin ou plus terrible. Tu peux jouer sur le "changement" par rapport à une routine que tu avais installée (dans telle situation, normalement, il se comporte comme ça ; or là, les choses sont bouleversées, donc il ne réagit plus pareil, il ne fait plus les mêmes choses, il ne parle plus de la même façon). Plus le désespoir est violent, plus tu peux jouer sur un changement radical du personnage dans sa façon d'être et d'agir.
Bon voilà, je baratine, mais le sujet m'intéresse beaucoup, je dois dire.