[A] Truby : La faiblesse morale du héros

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Tristeplume
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Tristeplume »

Célia, Beorn : la notion qui est importante, je trouve, c'est la fait que le héros par ses actes fasse souffrir autrui et que ça puisse lui poser des questions existentielles.
Mais je reste persuadé que faire souffrir autrui ne relève pas forcément d'un acte mauvais ou d'une question de morale.

Quand je dis à ma gamine qu'elle peut toujours se brosser pour avoir une Nintendo DS à son anniv', qu'elle part pleurer dans sa chambre en clamant haut et fort que la vie est injuste, oui, je la fais souffrir.
Quand je décide de séparer des gamins de leurs parents, je sais pertinement que je vais les faire souffrir, les uns et les autres.
Dans les deux cas, cela me pose des questions mais absolument pas en terme de morale mais en terme de conception éducative dans un cas et de l'application des lois de protection de l'enfance dans l'autre.

En fait, je dois être trop résolument laïque et j'essaye d'appliquer la loi de 1905 à la création littéraire. :mrgreen:
— Malach, avez-vous entendu ça ? Je suis, je cite, "drôle, tourmenté, incompris".
— Je ne vois pas en quoi c'est flatteur.
— Mon cher, cela veut dire que je plais aux femmes !
— Décidemment, je ne les comprendrai jamais.

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Beorn
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Beorn »

Tristeplume a écrit :Célia, Beorn : la notion qui importante, je trouve, c'est la fait que le héros par ses actes fasse souffrir autrui et que ça puisse lui poser des questions existentielles.
Mais je reste persuadé que faire souffrir autrui ne relève pas forcément d'un acte mauvais ou d'une question de morale.

Quand je dis à ma gamine qu'elle peut toujours se brosser pour avoir une Nintendo DS à son anniv', qu'elle part pleurer dans sa chambre en clamant haut et fort que la vie est injuste, oui, je la fais souffrir.
Mais on est bien d'accord.
Pour le "moral need" de Truby, le simple fait de faire souffrir ne suffit pas, il faut que cette souffrance ne soit pas méritée (inutile, condamnable).
Quand on punit un enfant qui a fait une bêtise, on ne commet pas un acte mauvais, car cette souffrance n'est pas condamnable. Elle fait partie du boulot de parent et elle est utile à l'enfant. Du moins ce sera la "morale" de la majorité des gens.

Dans un film de guerre, un soldat qui tue un ennemi n'est pas condamnable, car ce n'est de sa faute. C'est la guerre, la situation le dépasse.

Si on reprend Mac Cane dans Piège de cristal, le fait qu'il cogne/abatte/étrangle/fasse sauter en mille morceaux les terroristes n'est pas perçu comme "immoral" car il est traqué par eux, ce sont des tueurs et le spectateur moyen ne se dit à aucun moment : "il commet un acte immoral".
En revanche, quand il parle durement à sa femme au début, on se dit : "ça c'est vilain".
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Ellie
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Ellie »

Si on reprend Mac Cane dans Piège de cristal, le fait qu'il cogne/abatte/étrangle/fasse sauter en mille morceaux les terroristes n'est pas perçu comme "immoral" car il est traqué par eux, ce sont des tueurs et le spectateur moyen ne se dit à aucun moment : "il commet un acte immoral".
Mouais... Je trouve quand même McClane un peu limite à des moments. Par exemple, tuer quelqu'un en se défendant, c'est une chose, foutre un bonnet de noel sur le cadavre et le renvoyer dans l'ascenseur avec un mot pour énerver les méchants, c'est déjà un peu différent :D

Après là où je crois que j'ai du mal avec la logique «bien/mal», c'est que je trouve que dans la fiction tu peux pas juste parler des actes des personnages et que ça dépend aussi de la forme du récit, de comment c'est présenté, etc. Pour prendre un exemple caricatural, je vais pas juger Obélix de la même façon que je jugerais un autre personnage qui se ferait traiter de gros et répondrait par de la violence physique démesurée dans une oeuvre plus réaliste. De la même façon, je vais trouver les Inglourious Basterds sympathiques malgré leurs actes de torture alors que Jack Bauer beaucoup moins alors qu'il en fait moins, parce que c'est pas du tout la même mise en scène, que c'est moins premier degré, etc.

Du coup j'ai l'impression que la notion de «faiblesse morale» dépend quand même pas mal de la narration, et perso en tant que lectrice je pense que dans une certaine mesure ça pourrait marcher sur des trucs que je considère pas immoraux dans la vraie vie mais qui sont présentés comme telles dans l'oeuvre, parce que c'est une autre perspective, un autre univers, bla bla tout ça.

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Beorn
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Beorn »

Mouais... Je trouve quand même McClane un peu limite à des moments. Par exemple, tuer quelqu'un en se défendant, c'est une chose, foutre un bonnet de noel sur le cadavre et le renvoyer dans l'ascenseur avec un mot pour énerver les méchants, c'est déjà un peu différent :D
Ben, honnêtement, je doute que beaucoup de spectateurs considèrent cela comme un acte immoral, au sens où ils ne vont pas le condamner.
Après, chacun juge selon ses propres convictions qui ne sont pas nécessairement celles du spectateur/lecteur moyen.
Ellie a écrit :De la même façon, je vais trouver les Inglourious Basterds sympathiques malgré leurs actes de torture alors que Jack Bauer beaucoup moins alors qu'il en fait moins, parce que c'est pas du tout la même mise en scène, que c'est moins premier degré, etc.
Oui, mais comme je l'ai dit je ne sais plus où, la faiblesse morale ne rend pas forcément le héros antipathique, au contraire. La morale du personnage et l'empathie qu'il dégage sont deux choses qui n'ont pas de rapport.
J'avais pris l'exemple de Dr House et de Tintin plus haut : Dr House est sans doute beaucoup plus attachant alors que c'est un vrai salaud.
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Beorn »

Ellie a écrit :perso en tant que lectrice je pense que dans une certaine mesure ça pourrait marcher sur des trucs que je considère pas immoraux dans la vraie vie mais qui sont présentés comme telles dans l'oeuvre, parce que c'est une autre perspective, un autre univers, bla bla tout ça.
Dans une certaine mesure, oui.
Un barbare comme Conan qui massacre des gens à tour de bras dans ses combats, on trouve ça plus normal que, mettons, un employé de banque. ^^

Mais dans une certaine mesure seulement.
Par exemple, s'il est tout à fait "ordinaire" qu'un Romain viole une esclave qu'il vient d'acheter (ses amis, ses enfants, les juges de son temps, même sa femme n'y trouvera probablement rien à redire), je pense qu'aucun lecteur ne peut lire ce genre de scène sans juger aussitôt que c'est un immonde salaud. Et ceci avec un jugement moral de notre époque à nous.
De même, si Conan massacre des gens sans raison, ses actes seront aussitôt connotés comme mauvais, même si dans son clan à lui, c'est ordinaire.
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Eschylle
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Re: La faiblesse morale du héros

Message par Eschylle »

desienne a écrit :je ne vois pas de faiblesse morale à Ripley
Si si, c'est une demeurée. Retourner dans le vaisseau pour aller chercher le chat... franchement.
Cela prouve simplement qu'elle est une deux-pattes héroïque et intelligente !!! Et que tu es un deux-pattes ayant un déficit moral abyssal !!! (Je te rappelle que je suis un chat et que je ne laisserai pas impunies de telles remarques !) :fairemal:

Blague à part... :mrgreen:

Je suis d'accord que le déficit moral de Ripley est son côté psycho-rigide... mais j'aimerais revenir au fil du sujet qui est "la faiblesse morale du héros" (selon John Truby). Et je reconnais avoir reçu une grosse claque quand j'ai assisté à ses Master Class à la Sorbonne en janvier 2011. D'où mon intérêt pour cette discussion...

j'aime bien l'exemple de Frodon, et je rappellerai qu'à la fin, il ne veut plus jeter l'anneau dans le volcan pour le détruire et que c'est parce que Golum veut le récupérer que l'anneau y tombe... ce qui tendrait même à dire que Golum est la personnalisation de cette faiblesse morale !

Les séries américaines des années 2000 ont développés les personnages en complexifiant leurs personnalités (par exemple le héros de The Shield qui est un enfoiré, un assassin, mais aussi un bon père et un défenseur de la loi...)
Mais ce qui fait la qualité d'un personnage n'est pas celui-ci en tant que tel mais son interaction avec les autres personnages. L'exemple de Han Solo et Dark Vador qui sont attachants par contraste et relation avec le "fantomatique" Luke est significatif.

Il y a aussi une évolution des récits et des héros, dans ces séries. La critique des héros positifs des années 60-70 a amené des héros des années 2000 comme Dexter, dont la morale est pour le moins ambiguë... et comme c'est ce qui marche, c'est ce qui est représenté comme référentiel... Les spectateurs enfants ou ados d'aujourd'hui n'ont rien à voir avec ceux des années 70, 80 ou 90. Ils ont une culture de l'image sans commune mesure. Et donc une distance par rapport aux fictions télévisées ou cinéma que n'avaient ou n'ont pas nécessairement ceux de ces années-là...

Par rapport au "moral need", Truby, lors de sa master class, donne un exemple assez clair :
Dans Vertigo (Sueurs froides), dès la première scène, Scottie, le héros, parce qu'il a le vertige, est "responsable" de la mort d'un policeman. Ce n'est pas un sale type pour autant. Il se sent coupable mais ça ne l'empêche pas de se faire piéger par la suite et ce n'est qu'à la fin qu'il comprendra et réussira à se confronter à son déficit moral...

Le "moral need" comme beaucoup des concepts que présente Truby est un outil. Il parle aussi des sept étapes fondamentales pour structurer un scénario... mais comme il le dit lui-même, il n'y a pas de recette. Il a développé ces "outils" parce qu'il a constaté que c'était ce qui était vital dans un scénario...

Je crois que ce concept de "moral need" est, certes, très américain, mais qu'il a une utilité pour des raconteurs d'histoires dans le développement de leurs personnages. Car cela concerne le combat intérieur que se livre le personnage à lui-même pour avancer dans la vie. Et dans les obstacles qui se dressent devant lui.

Et je ne crois pas que cela puisse être rendu de façon manichéenne (bien/mal), l'exemple de Vertigo est emblématique en ce sens. Cela signifie juste que, dans un domaine, le personnage ne parvient pas à transgresser des blocages intérieurs (qui l'enferment) et que cela peut l'empêcher de porter secours à autrui (de s'ouvrir au monde extérieur) et donc causer un désastre (sans que personne puisse l'en accuser sinon lui-même).

Je trouve ce sujet pasionnant.
Être et rêver, peut-être...

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desienne
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par desienne »

Dans les œuvres qui marchent très bien, qu'elles soient littéraires ou bien audio-visuelles, il reste quand même un détail frappant.
Outre la tendance actuelle aux méchant héros et aux héros assombris, pervertis, il reste que de grands personnages se caractérisent par un fossé énorme et souvent contradictoire entre leur faiblesse montrée et leur activité.
Walter est dealer et aussi prof de chimie de talent.
Dexter est tueur en série et un méticuleux policier scientifique
Annakin Skywalker est un tueur vengeur et un grand chevalier jedi
Dans the shield, le héro est un tueur et un flic, défenseur obstiné de la loi
Nurse Jackie est une junkie dépendante et est aussi une infirmière dévouée
etc...
On peut multiplier les exemples. On notera que tous excellent dans chacune des catégories.

Je me demande si :
1. Le potentiel s'élève à mesure que le fossé se creuse, c'est à dire qu'on obtient un maximum de tension dès lors que les bornes + et - sont opposées ou éloignées et ce dès le départ (faut-il d'ailleurs bien marquer le coup dès les premières scènes ?)
2. Tout ceci est très classique : dr Jekyll et mister Hyde serait le premier héros post-moderne ? la faiblesse relevant un peu du complexe de Frankenstein de l'expérimentation devenue incontrôlable (le contrôle étant bien l'un des problème lié à la faiblesse).
3. À opposer ainsi les pôles, est-ce qu'on perd en crédibilité ? en subtilité ?
4. À l'inverse et un peu à l'image de la fiction française, créons-nous des héros trop lisses, sans intérêts, en arrondissant les bornes ?

Je me posais la question, de pure forme, sur les 7 péchés capitaux, puisqu'ils reviennent assez souvent :
l’envie, l’orgueil, la paresse, la gourmandise, la colère, la luxure, la jalousie.
Beaucoup de personnages les reprennent. S'ils les reprennent, c'est que ça fonctionne.

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Celia
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Celia »

Je reprends l'avis de desienne, que je partage assez, avec un personnage qui, a priori, est bien moins cassant et extrême que ceux qu'il a cité, mais pour lequel cette description des pôles opposés fonctionne parfaitement : Alicia, l'héroïne de The Good Wife. En privé, elle doit tout cacher, systématiquement (ses sentiments face au parjure et aux parties de jambe en l'air de son mari, l'emprisonnement de son mari, leur séparation, son propre amant), c'est une femme de glace. Le fait est qu'Alicia est avocate et qu'elle passe sa vie à décortiquer et exposer la vie des gens qu'elle défend.
Et ça marche, alors qu'au départ, la situation paraît bien moins excitante que celle de dealers, de tueurs ou de policiers sans foi ni loi.
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Elikya
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Elikya »

En tout cas, ce que dit Desienne me fait beaucoup réfléchir au fait que tout est lié dans une histoire, y compris les forces et les faiblesses des héros, qui forment deux faces de la même pièce de monnaie. C'est très intéressant, merci.

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Beorn
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Beorn »

desienne a écrit :Je me demande si :
1. Le potentiel s'élève à mesure que le fossé se creuse, c'est à dire qu'on obtient un maximum de tension dès lors que les bornes + et - sont opposées ou éloignées et ce dès le départ (faut-il d'ailleurs bien marquer le coup dès les premières scènes ?)
2. Tout ceci est très classique : dr Jekyll et mister Hyde serait le premier héros post-moderne ? la faiblesse relevant un peu du complexe de Frankenstein de l'expérimentation devenue incontrôlable (le contrôle étant bien l'un des problème lié à la faiblesse).
3. À opposer ainsi les pôles, est-ce qu'on perd en crédibilité ? en subtilité ?
4. À l'inverse et un peu à l'image de la fiction française, créons-nous des héros trop lisses, sans intérêts, en arrondissant les bornes ?
Tiens, c'est une idée intéressante, je n'y avais pas pensé.
Tu vas beaucoup plus loin que Truby. Je pense que son "moral need" n'a pas nécessairement à être aussi puissant, mais c'est une réflexion que je note.
Mais bien sûr, ce n'est pas universel, ce n'est qu'un type de personnage et d'histoire.
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Eschylle
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Eschylle »

Ce que vous exprimez ici me fait penser au grotesque chez Hugo qui provoquait le même effet en construisant un "bouffon / père très protecteur" (Triboulet dans Le Roi s'amuse), un "grand seigneur anglais / monstre de foire" (Gwynplaine dans L'Homme qui rit)... et les exemples sont multiples chez lui... au XIXème siècle. Voilà aussi pourquoi ses pièces fonctionnent toujours aussi bien : le sentiment y est puissamment exprimé, avec ses contradictions... Voilà pourquoi L'Homme qui rit est un roman qui, à mon humble avis, restera comme un chef-d’œuvre, même s'il est présenté comme "roman philosophique"...

Le relief provoque l'intérêt. Vous citiez Dark Vador et Han Solo par rapport à Luke Skywalker. Ils sont mis en valeur par le contraste avec le héros...

Ce que dit aussi Truby, c'est que l'auteur a un devoir moral quand il écrit, à commencer par lui-même. Et quand Truby dit "moral", il ne veut pas dire "moralisateur" ! L'un de ses leitmotiv est qu'il faut écrire d'abord pour soi, pour progresser soi-même. Il lie, je crois, "moral need", au sens donné à sa vie. Que chacun recherche. Et qui provoque parfois de grosses crises quand se pose chez l'être humain (le deux-pattes de base) la question de sa vie et donc du sens qu'il lui donne. C'est là que se situe son "moral need", je crois... Il importe donc d'inventer pour nos personnages un "moral need" qui nous touche particulièrement, dit-il.
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Beorn »

Eschylle a écrit :Et je reconnais avoir reçu une grosse claque quand j'ai assisté à ses Master Class à la Sorbonne en janvier 2011. D'où mon intérêt pour cette discussion...
Aaaaaah ! Je t'envie abominablement ! ^^
Eschylle a écrit :Mais ce qui fait la qualité d'un personnage n'est pas celui-ci en tant que tel mais son interaction avec les autres personnages. L'exemple de Han Solo et Dark Vador qui sont attachants par contraste et relation avec le "fantomatique" Luke est significatif.
Oui, tout à fait.
Eschylle a écrit :Par rapport au "moral need", Truby, lors de sa master class, donne un exemple assez clair :
Dans Vertigo (Sueurs froides), dès la première scène, Scottie, le héros, parce qu'il a le vertige, est "responsable" de la mort d'un policeman. Ce n'est pas un sale type pour autant. Il se sent coupable mais ça ne l'empêche pas de se faire piéger par la suite et ce n'est qu'à la fin qu'il comprendra et réussira à se confronter à son déficit moral...
Voilà. C'est un excellent exemple de moral need qui ne fait pas un personnage antipahtique pour autant.
Eschylle a écrit :Et je ne crois pas que cela puisse être rendu de façon manichéenne (bien/mal), l'exemple de Vertigo est emblématique en ce sens. Cela signifie juste que, dans un domaine, le personnage ne parvient pas à transgresser des blocages intérieurs (qui l'enferment) et que cela peut l'empêcher de porter secours à autrui (de s'ouvrir au monde extérieur) et donc causer un désastre (sans que personne puisse l'en accuser sinon lui-même).
Oui !
Il évoque même le moral need du personnade trop parfait, ou trop enthousiasme, qui peut blesser les autres par son excès de qualités. ^^
Eschylle a écrit :Je trouve ce sujet passionnant.
:wow:
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Booz
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Booz »

Je viens de relire tout le fil et en cogitant un peu, je me suis aperçue que j'avais un problème : Vlad, le personnage de mon roman, eh bien, c'est un égoïste, manipulateur, cruel et prêt à tout pour arriver à ses fins, un vrai salaud avec juste ce qu'il faut d'enfance malheureuse pour que je l'aime bien. Il n'a pas d'amis, seulement des personnes qui peuvent lui être utile, il déteste sa famille, les rares personnes pour qui il éprouve un peu de respect son très secondaires et son attitude ne les influence pas. J'ai beau retourner le problème dans ma tête je ne vois vraiment pas comment Vlad peut avoir une faiblesse morale puisqu'il se fiche de toute les personnes touchées par ses actes, à part lui-même, du coup, dépasser cette faiblesse lui importe peu. Dans ce cas, est-ce que la faiblesse morale peut affecter le personnage lui même (dans le sens où, sa faiblesse, en touchant d'autres personnages, l'affecte à son tour car ça contraint sa quête).
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Aelys »

Moi je suis pas d'accord. Ton Vlad, de ce que j'ai pu lire, il n'est pas méchant par essence, il est méchant parce qu'il a vécu certains évènements comme des injustices à son égard et du coup, il s'est blindé et est devenu tel que tu le décris. Tu me l'as dit toi-même, Vlad, c'est pas juste un "méchant très très méchant", il a des raisons de l'être devenu, et pour moi, c'est ça sa faiblesse : c'est que si on creuse très, très loin sous sa cuirasse, il y a une immense souffrance de petit garçon qui aurait bien voulu qu'on l'aime comme son frère et qu'on le laisse faire ce qu'il aime (disséquer des corps ^^).
Et même s'il n'a pas envie de changer, c'est quelque chose qu'il a en lui, et qui modifie tous ses actes. Et qui lui retombe dessus parfois, lui met des bâtons dans les roues.
Mes derniers bébés : I.R.L., éditions Gulf Stream et Quelques pas de plus, éditions Scrineo
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Re: J. Truby La faiblesse morale du héros

Message par Dawood »

Je réagis directement à ton post, Booz, sachant que je ne connais pas ton Vlad et que je ne dispose pas des éléments avancés par Aelys :

Si ses propres actes et leurs influences sur les autres n'ont pas d'incidence morale sur lui, peut-être les actes des autres peuvent en avoir ? En agissant d'une certaine manière et par décalage avec ses propres actions, peut-être peut-il être touché par des tiers ou être sujet à quelques réflexions et introspections.
Bon, ce n'est qu'une piste.

Ensuite, ce que tu soulèves, à savoir ses actes qui entraînent des blessures chez d'autres qui vont le desservir pour arriver à ses fins, ça ne me parait pas relever de la morale. S'il se heurte à des problèmes pour parvenir à son but liés au mal qu'il sème, il ne subit aucune remise en question de sa moralité, à priori... il s'agit juste d'un problème pratique : en ne faisant pas souffrir celui-ci, ça m'arrange pour parvenir à mes fins.
Wyvern is coming.

(challenge à venir... :stylo: )

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