Beorn a écrit :Ah oui, je vois ce que tu veux dire et c'est un point intéressant.
Dans ce cas précis, l'humour n'est pas extérieur au personnage. Ce n'est pas un narrateur qui le rapporte ou un autre personnage qui nous fait rire de Tyrion : au contraire, on est dans l'auto-dérision, c'est à dire une forme d'expression interne du personnage.
Ce n'est pas comme si on riait de lui, de façon extérieur : c'est lui-même qui rit (jaune).
Je ne sais pas si je suis clair. Mais dans ce cadre-là, il n'y a pas vraiment de distanciation avec le personnage, on reste dans ses propres émotions, dont le rire fait partie. C'est peut-être une parade à l'effet de distanciation, en effet.
Oui, il y a une différence entre un personnage qui fait de l'humour et le traitement humoristique du narrateur.
Le premier cas est bien plus fréquent et peut prendre place dans n'importe quel roman, même les plus sombres.
Cela-dit, l'humour du personnage s'exerce aussi aux détriments des autres acteurs du roman. Quand Tyrion se moque de son frère ou de sa soeur, il peut provoquer une distanciation du lecteur. D'ailleurs, à cause de Tyrion, je ne vois en Jaime qu'un crétin de bas étage.
Bon, par ailleurs, le rire crée pas forcément de la distanciation.
Mais c'est juste un écueil possible à avoir en tête, je crois.
Clairement. L'équilibre est difficile à trouver car tourner un personnage en ridicule, par exemple, peut avoir des conséquences irréversibles.
De ma petite expérience, le traitement humoristique ne déroge pas aux règles de cohérence qu'on doit utiliser pour n'importe quel roman. Un personnage peut être tourné en ridicule mais ça doit respecter la cohérence de ce perso, sa logique de fonctionnement, son caractère et sa personnalité.
Par exemple, si on a une grosse brute dont le crédo est "si la violence ne résoud pas les problèmes c'est que tu n'as pas tapé assez fort", on ne pourra pas le faire apparaître déguisé en petit rat de l'opéra pour ruser. Même si l'image est drôle (cf Fantasia), ça ne colle pas avec la logique du perso et ça risque effectivement de le descréditer aux yeux du lecteur. Après, on peut parvenir à cette scène mais faudra vraiment bien l'amener.
C'est là où le traitement humoristique s'avère aussi contraignant que n'importe quel type de traitement.
On peut avoir tendance à penser que "ouais, je fais de l'humour, c'est le vase ouvert à toutes les gouttes d'eau", or ce n'est pas du tout le cas.
Pour moi, l'humour, c'est quand même faire rire ou sourire. Effectivement, on y parvient par un décalage. Cependant, le décalage peut avoir d'autres effet que de faire rire : il peut aussi servir à provoquer la surprise, la curiosité, etc.
Faire rire ou sourire, certes, mais pas seulement. L'humour noir, le cynisme, l'insolence, la transgression, etc... peuvent susciter tout un panel d'émotions, du dégoût à la compassion, de la colère à la révolte.
Pour prendre l'exemple des humoristes, Bigard, Coluche, Desproges et Bedos font de l'humour mais les effets en sont tous très différents.
Je n'ai lu que quelques-uns de ses romans et je ne suis pas un sépcialiste. Aurais-tu un titre en particulier ?
Je te conseille les ch'tits hommes libres. Je ne sais pas s'ils sont profonds, touchants ou ménageant un grand suspens mais ils sont excellents.
Au final, j'ai quand même l'impression que les livres qui soient intéressants et qui fassent vraiment rire, comme ceux de Pratchett, sont rarissimes et si vous en connaissez en SFFF, je suis très preneur. :]
Ils sont très rares, oui. Y a les livres écrits par Zelazny-Scheckley.
Scheckley tout seul est excellent.
Frédéric Brown, nouvelles et romans (le célèbre : Martians go home !) est aussi très bon. C'est drôle et intelligent. Certaines de ses nouvelles de SF sont énormes. Malheureusement, j'ai paumé mes reccueils et c'est vieux, j'aurai donc du mal à te donner des titres précis.
Sinon, Jack Vance avec Cugel et Rhialto.
— Malach, avez-vous entendu ça ? Je suis, je cite, "drôle, tourmenté, incompris".
— Je ne vois pas en quoi c'est flatteur.
— Mon cher, cela veut dire que je plais aux femmes !
— Décidemment, je ne les comprendrai jamais.