J'ai deux exemples à te proposer, issus de deux films où les scénaristes utilisent cette façon de cacher les choses :
- Dans "Love Actually" (oui on est loin de la SFFF), un personnage badine avec sa secrétaire. C'est mignon tout plein... jusqu'au moment où on apprend que le monsieur est déjà marié. Le spectateur doit faire un choix moral, et très vite. Les deux personnages (le patron et la secrétaire) qu'il avait appréciés au départ, subissent son jugement. Et les scénaristes sont arrivés à leur but : susciter l'amertume d'une histoire d'amour qui n'est pas socialement acceptable (d'autant que le personnage de la femme trompée est extrêmement attachant aussi)
- Dans "Old Boy" (qui touche plus directement à ton problème)
Le personnage principal est amené par son ennemi, à tomber amoureux et à coucher avec sa propre fille, sans qu'aucun des deux ne le sache. La vérité qui éclate constitue la vengeance de cet ennemi. Le spectateur subit la détresse du héros parce que, comme lui, il a été floué (ce qui n'est pas le cas du premier exemple où les deux persos étaient au courant de la situation de départ) Le scénariste, ici, atteint aussi son but : susciter la gêne extrême du spectateur en montrant que le héros, qui accédait à une rédemption en trouvant l'amour, s'est en fait complètement fourvoyé ; le choix fait à la fin du film (le héros choisit d'être hypnotisé et d'oublier que sa compagne est sa fille) ne rassure pas le spectateur, tout en lui indiquant que finalement, de toutes les solutions, l'oubli était peut-être la moins pire. Et encore.
Tu t'engages dans un terrain qui est glissant et risqué. Mais je pense que ces deux exemples te montrent que, si c'est bien fait, la révélation peut amener le lecteur à se poser des questions, sans forcément y trouver une solution.
Donc techniquement, c'est possible.
Moralement, cela dépend de toi. Ces questions que le lecteur va se poser, il faut que toi aussi tu te les poses. Et il s'agit là moins de technique d'écriture, que d'interrogation morale, comme ça pourrait être le cas pour décrire une scène dite extrême, ou parler d'un ancien nazi. Comment savoir si on franchit la limite ? Je pense que tous les auteurs borderline ou qui écrivent des textes difficiles se posent cette question.
De plus, il faut aussi savoir que ce rendu dépendra aussi de la sensibilité du lecteur qui te lira.