Astère a écrit :J'ai fait le test.
J'ai pris un de mes bouquins préférés dans la bibliothèque : Le rivage des Syrtes de Julien Gracq (pour lequel ce dernier a quand même refusé le prix Goncourt !). Je tombe sur un dialogue de sept répliques : cinq comprenaient des incises avec le verbe "dire" ! Et ce n'est pas un cas isolé. Evidemment, l'intérêt du livre réside dans son atmosphère, ses descriptions envoûtantes, pas vraiment dans les dialogues. A la limite, je pense que leur platitude relève de l'intention de l'écrivain. Ceci dit, j'ai quand même été surpris. Et même hors des dialogues, le nombre de trucs qui seraient relevés lors d'une beta normale est impressionnant : verbes faibles, participes présents et adverbes, etc.
En fait, je pense que des extraits isolés de certains auteurs reconnus pourraient susciter des betas "féroces".
D'un côté, ça décomplexe en tant qu'auteur. Ceci dit, ça devrait nous faire aussi relativiser nos grilles de lecture en tant que beta-lecteurs, non ?
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Pour moi, ce que ça montre c'est qu'on peut avoir un bon texte malgré les fameux verbes faibles, adverbes et participes présents
Mais je pense que ça se voit aussi dans les bêtas : les relever pour les relever, ce n'est pas vraiment une bêta ; ce qu'il faut c'est repérer les endroits où le texte dérange à la lecture, et trouver pourquoi...
Moi ça m'a fait ça avec Alexandre Dumas (Joseph Balsamo) : c'est bourré de répétitions. Et pourtant, l'écriture est extrêmement fluide et agréable à lire. Comme quoi, les répétitions, ce n'est rédhibitoire que si ça gène à la lecture.
(Par contre, y a certains livres publiés où une bêta n'aurait pas fait de mal, même des plus connus. Quand j'ai lu le tome 1 de
L'Epée de vérité, j'avais bien envie de passer un bras dans le livre pour tirer les oreilles de l'auteur ou du traducteur sur un certain nombre de formulations
)
De toute façon, une bêta est personnelle. Jamais un texte ne sera parfait, pour la bonne et simple raison que ça dépendra de chaque lecteur, et même de l'état d'esprit de chaque lecteur (ça ne vous est pas arrivé de relire un texte que vous avez bêta lu, mais longtemps après ? Souvent, on se dit "mais pourquoi j'ai relevé ça ? ça gêne pas en fait !" ou "tiens, cette phrase est bancale, mais je l'avais pas relevée ?". C'est pas que notre façon de bêta-lire a changé entre les deux ; c'est qu'on n'est pas dans le même état d'esprit et donc, on ne perçoit pas le texte pareil.
Du coup, c'est normal qu'on trouve à redire même sur une formulation de Victor Hugo
(Et j'vous dis pas toutes les phrases de Flaubert qui se feraient gronder par une bêta-lecture un peu mécanique : le gugusse adore commencer des phrases par "Et"
Pourtant, "Et Frédéric, béant, reconnut Sénécal", c'est une phrase géniale.
)
Je plussoie Taky pour certaines traductions. Mais ça dépend aussi lesquelles ; je sais pas si vous connaissez
L'ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon. Je l'ai lu en espagnol et j'ai trouvé ça franchement mal écrit. Pourtant, personne dans mon entourage n'a eu cette sensation - c'est qu'ils avaient lu la version traduite. J'avais eu des échos du traducteur qui confiait qu'il avait eu du mal avec certains passages, parce que c'était bourré de répétitions. (Remarquez, en Espagne ça a été aussi un best-seller, mais tout de même, je pense que la traduction l'a amélioré !
)