Oh le beau sujet.
- Salut, je m'appelle Tristeplume.
- Bonjouuuur Tristeplume !
- Ouais, ouais, bonjour. Je suis là, au club des rôlistes anonymes, pour vous raconter mon expérience et vous montrer comment il est possible de sortir de l'enfer du JdR. Donc voilà. Pendant 20 ans j'ai pratiqué le JdR. Comme beaucoup, j'ai commencé par de petites doses de DD. C'était soft, pas trop violent. Surtout qu'à l'époque, ce n'était pas facile de se fournir et y avait peu de personnes avec qui partager ce vice. Puis il y a eu l'Oeil Noir. Un JdR disponible dans n'importe quelle grande surface. J'étais jeune, innocent et j'y ai passé tout mon argent de poche.
- Oooooooh...
- Mais ce n'était que le début de la descente aux enfers. Il commençait à y avoir de plus en plus de JdR différents et même des JdR français. J'ai même croisé la route de Croc...
- Vade retro satanas !
- Ouais. Je voulais tous les goûter, c'était plus fort que moi. Au début, j'croyais que seul le médiéval fantastique était à mon goût. Mais comment résister à du Star Wars, à du Cyberpunk ? Là, j'ai vraiment plongé. Création du club de mon lycée, tous les week-ends sacrifiés au JdR, scénarios écrits pendant les cours de français, personnages griffonés dans mon cahier de math. Je m'intéressais à peine aux filles et mes aventures sentimentales furent toutes des désastres. Vous comprenez... "Un ciné, ce week-end ? Beeen...
- ...y a mon grand-père qui vient de décéder." ?
- Oui. Entre autres. Toute la famille y est passée. Même le chien et les poissons rouges. Bref. J'étais accroc et je ne me rendais compte de rien. Je suis même passé aux JdR les plus durs. Rolemaster...
- Pauvre Tristeplume !
- Des fiches de persos de 5 pages... Des centaines de compétences. Des milliers de sorts. Le rêve... Même cela ne suffisait plus et j'en inventais d'autres comme "Faire coucou à la foule pendant un saut périlleux" ou "T'as une tâche, pistache". J'avais beau explorer tous les univers mis à notre diposition mais ils ne me contentaient plus et j'en vins à les concevoir moi-même.
- Waouh....
- Et là, j'ai tenté le pari impossible. Concilier mon addiction et une classe prépa. Autant vous dire que ce fut un échec cuisant. Du côté de la classe prépa. Un instant de lucidité me fit comprendre cette erreur et j'allas alors m'inscrire en Fac. A Jussieu.
- Les salles d'étude au sous-sol ?
- Oui. Et l'oeuf-cube et le relais Descartes à deux pas. En pleine frénésie de Vampire et de Magic. J'étais au coeur de la tempête. Le JdR, ce n'était plus seulement le week-end mais maintenant toute la semaine. J'étais bien, en sécurité, entouré de gens accrocs comme moi, qui me comprenaient et me respectaient. D'ailleurs, ces nazes me respectaient tellement que je passais mon temps à maîtriser. Mais c'est une autre histoire. Bref, je crois qu'à cette époque, j'ai vraiment sombré corps et âme dans cet enfer.
- Mais comment t'en es tu sorti, Tristeplume ?
- L'armée. Y avait plus que ça à faire. Dix mois de sevrage forcé. A La Réunion. Derrière le bar de la base. Au soleil. Entouré de jolies autochtones séduites par mon bel uniforme blanc de marin. Ce fut dur mais je survécus. A mon retour, je m'y suis remis. Mais à petites doses. Faut dire que je devais travailler aussi. J'ai appris à maîtriser mon addiction. J'ai découvert aussi qu'il y avait une vie en-dehors des caves et chambres enfumées. Puis petit à petit, j'ai décroché. Ma femme m'a beaucoup aidé même si elle n'a jamais condamné ce penchant pervers. Puis les enfants, l'éloignement de mes compagnons de débauche,... et voilà. Cela fait maintenant presque 8 ans que je n'y ai plus touché et je le vis plutôt bien. D'autant que j'ai trouvé un excellent palliatif...
- Oh ? Lequel ?
- L'écriture. Maintenant je passe mes nuits à élaborer des histoires, des personnages, des univers. Je partage ma passion de l'écriture et de la béta-lecture avec des grenouilles,
- Des grenouilles ???
- Ouais, c'est un nom de code, vous ne pouvez pas comprendre. Et je n'ai pas le droit d'en parler sinon Super Grenouille va encore m'affubler d'un sous-titre bidon. Bref, j'ai découvert cette nouvelle passion qui sommeillait en moi depuis des années. Mais je commence à m'inquiéter. Là, je suis au taf, et ça fait vingt minutes que j'écris des bêtises... Mince... y a un club des grenouilles anonymes ?
(désolé, je sors
)
(en fait non, je reviens, mais pour répondre à la question
)
Bien sûr que mon expérience rôlistique m'influence puisque elle a nourri mon imaginaire, de la même manière que les lectures. Je n'ai jamais eu la tentation de "raconter" une partie de JdR mais en revanche, ces parties constituent une source d'inspiration.
Le point sur lequel le JdR a vraiment eu un impact positif, c'est au niveau de mes personnages et du fait de les rendre "vivants", d'avoir des persos de caractère, atypiques.
Le défaut, c'est que je ne conçois mes persos principaux que comme des héros. De fait, je me mets moi-même une forme de carcan.
Le côté négatif c'est aussi qu'après avoir bouffé des tonnes d'aides de jeu, écrit des pages et des pages de background... j'ai une flemme monumentale de m'y remettre.
Et c'est pourtant ce que je dois faire pour DWYBO.