[A] La gratuité, ça se paie?

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Beorn
Bond, Alexander Bond
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Beorn »

Excuse-moi, Farah, mais ton post n'était-il pas destiné au fil d'à côté, sur le gore ? :?:
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Lùani
Connaît la recette pour faire des pitchs savoureux, mais a un roman à terminer
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Lùani »

Je suis aussi de ceux qui pensent que rien n'est gratuit. Tout paragraphe écrit doit être au service de l'intention de l'auteur.
Si l'auteur veut un roman d'action, alors il truffe son roman de scènes d'action. Même si certaines sont annexes, ne servent pas directement à l'intrigue, elles participent à l'élan qui donnera son rythme à la lecture. Il y aura des descriptions, bien sûr, il en faut forcément pour l'ambience, les sensations, mais une longue envolée descriptive en plein milieu (façon Proust, avec des phases de vingt lignes) surprendra certainement le lecteur. Il risque de se sentir trahi et de reposer le livre.
Depuis quand, surtout dans un roman, une scène ou un passage doit être "utile" à l'intrigue? On écrit ce qu'on veut, que je sache...

Là, je voudrais ajouter ma nuance personnelle. Une scène ou un passage peut être inutile à l'intrigue, mais tout de même servir l'intention de l'auteur : ajouter à l'athmosphère, ajouter à la caractérisation, faire évoluer les liens entre les personnages... Mais le risque, s'il y a trop de tours et de détours qui n'apportent rien, c'est de faire décrocher le lecteur.
Après, il y a des auteurs qui ne se gênent pas pour faire des digressions interminables. S'ils arrivent à garder le lecteur accroché malgré cela, c'est que le lecteur y trouve son compte. Le seigneur des anneaux comporte plein de scènes qui ne servent pas à l'intrigue, mais qui développent le monde et font profiter de sa richesse. (Je ne sais plus où j'ai lu que le véritable personnage principal du SdA n'est ni Frodon, ni la compagnie, mais bien la Terre du Milieu dans son ensemble. Et que tout ce qui me paraissait inutile et lent dans le récit servait en fait à caractériser ce personnage si particulier.)
Citer:
Les descriptions: servent-elles l'intrigue? Sont-elles absolument nécessaires?
Oui et re-oui. Les descriptions permettent au lecteur de se situer dans le monde de l'auteur, de visualiser les lieux et les personnages, de percevoir une ambiance. Grâce aux descriptions, il est possible de faire passer tout un tas d'information de façon bien plus juste qu'en les énonçant.
Je dirais tout de même que toute description doit cacher une intention. Sinon elle est vraiment inutile.
Je peux avoir plein de bonnes raisons de décrire une rue :
- faire sentir une atmosphère (glauque, joyeuse, triste)
- faire voyager le lecteur si c'est une rue étrangère représentative d'un lieu inconnu/exotique.
- faire de la caractérisation de personnage. Si c'est là qu'à grandit un personnage, le rire des enfants ou les ordures dans le caniveau peuvent en dire beaucoup sur son passé.
- distiller des infos utiles à l'action future ( voyez bien comme il n'y a pas de cachettes par ici, repérez bien où sont les plaques d'égout)
Mais ce n'est pas la peine, à mon avis, de décrire dans un luxe de détails pointus une bonne vieille rue de ville française, avec ses parc-mètres, ses voitures, ses boutiques, etc...
Ca, je trouve que c'est franchement inutile, ça n'apprend rien au lecteur qui a sans doute déjà vu une rue banale, à moins d'écrire pour le lecture de dans 300 ans, qui trouvera ces détails formidablement instructifs. Il suffit de décrire en quoi cette rue est différente de toutes les autres rues de France. Et si elle est vraiment toute pareille que les autres, la description ne s'impose pas, elle va barber le lecteur.
(Je ne parle pas de la description d'un environnement qu'il faut se représenter pour comprendre, mais de détails superficiels et anodins, genre des vêtements.)
Les vêtements peuvent aussi apprendre beaucoup de chose sur ceux qui les portent. Où, si on est dans un roman dépaysant ou historique, participer à la mise en place de l'univers.

Après, ce n'est que mon avis. Comme je suis trèèès lente au niveau écriture, j'ai besoin de rester centrée sur l'essentiel, sinon je n'avance pas.

Edit : grillée et re-grillée... Bref, je suis d'accord avec Beorn et d'autres avant. (Quand je vous dis que je suis lente)

NB

Re: La gratuité, ça se paie?

Message par NB »

En fait, une scène qui paraît gratuite, c'est peut-être davantage une scène qui semble artificielle dans le récit : elle ne fonctionne pas (ou pas entièrement). On sent trop la "patte" de l'auteur, par exemple.

Une scène peut paraître gratuite sur le moment et prendre son sens plus tard, mais si elle ne trouve pas de justification, d'explication, ou de "ah c'est là qu'il voulait en venir", il reste une impression d'inutilité. C'est dommage.

Pour moi, c'est un effet raté de l'auteur.

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sherkkhann
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par sherkkhann »

Je pense que ça dépend du genre littéraire. Si l'auteur annonce clairement la couleur " La vie de Madame X " là on s'attend à des scènes quotidiennes, on achète le livre pour ça. Par contre (je me prend comme exemple, loin de moi l'idée de généraliser) dans un récit fantasy/sf/fantastique, une page ou l'auteur décrit une journée banale et non justifiée ensuite, honnêtement je m'en tape :wow: et c'est un critère pour me faire reposer le livre et ne plus dépenser d'argent pour lire cet auteur. Après c'est sur, il y a toujours des temps morts, mais je pense que même eux doivent servir à quelque chose.

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Celia
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Celia »

Une journée "banale" peut très bien se justifer dans un récit de l'imaginaire :
- si le héros vit avec des créatures monstrueuses, le montrer comment il s'en accomode au petit-déjeuner est une manière de présenter ton monde ;
- si le héros est maître d'un château et a une femme et plusieurs maîtresses ainsi qu'une foulée d'enfants légitimes et de bâtards, montrer comment il se comportent avec les une et les autres pendant la pause de dix heures (celel du premier goûter) est une manière de présenter ton monde.
- si le héros a une puce implantée dans l'oeil gauche, montrer comment il l'utilise quand il regarde son film du mardi soir est une manière de présenter ton monde.
Il n'y a pas d'"action" dans le sens "déroulement de l'intrigue", mais cela obéit à un grand précepte qu'il est bon de rappeler ici : show, don't tell. Montre tes personnages en train de vivre, même si leur vie est banale, parce que cela jouera sur la façon dont le lecteur les comprendra.
Il y a de temps en temps des passages "non justifiés", mais ce sera une faiblesse de l'auteur à mon sens, plus qu'une justification du "le banal c'est chiant".
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Nyaoh
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Nyaoh »

Ce qui me frappe en vous lisant, c'est que quelque part je ne crois pas que vous divergiez tant que ça dans vos avis. Même Asia M qui a lancé le débat et défend... C'est tout une histoire de nuances et pas d'opposition non ?

Asia M disait qu'en tant que créateur on fait bien ce qu'on veut comme on veut... Mais elle exprime aussi la différence entre scène vide ou inutile et scène qui participe au récit. Je n'ai pas lu Tolkien j'ai pas d'avis dessus, mais j'ai très souvent entendu des critiques sur le rythme du récit. Pourtant c'est un livre qui a plus que marqué et une référence du genre. On peut donc se dire que même sur des classiques publiés "utile" et "inutile" ça se débat âprement en fait. Le livre peut avoir de l'intérêt pour autant, être édité même... C'est quand même vrai pour plein de livres je trouve. Sauf que je pense à deux livres précis, autour de moi les gens ont décrochés. Ils ont pas pu passé les 50/100 première page ou l'auteur c'est fait plaisir et a fait son récit en gardant une longue mise en place. Alors quelque part l'auteur peut mordicus y voir une justification qui n'y est pas. Il peut aussi diviser dans son choix, certains aimeront sans se poser de questions, d'autres non...

Si on regarde de nombreux conseils sur les bétas on peut dire "Ah bon ?!" je pense à un livre que j'ai fini il y a peu, bourré d'adverbes. Pourtant on les déconseillent aussi. C'est une histoire de mesure, peut-être y être attentif et soupesé chacun, ignorer les bétas si on les pensent injustifiés... Comme ce sont des extraits en plus des choses échappent sûrement, alors qu'en lisant tout le livre on voit l'ensemble du puzzle tout s'emboite et est logique. Les scènes qui semblent gratuites et ne le sont plus.

Sur mon projet du moment, j'ai fait le choix de ne pas avoir une trame classique, je dirais qu'il y a une découverte de monde puis une seconde trame, mais qui s'emboite pour moi dans la découverte du monde. C'est un fil conducteur de plus, (plus classique avec une enquête quasiment), je l'ai mis au début un peu par peur que le lecteur s'ennuie, sans méchant, quête et autre. Sauf que finalement je trouve que ça découle du récit, montre une difficulté et autre aspect de ce que vit mon héroïne.
J'ai donc vraiment à travailler les intrigues secondaires, le rythme du récit aussi. Des scènes de découverte "active", d'autre "passive" ou le perso est spectateur. Des scènes que je vois comme "calme" avec juste deux personnages qui parlent, se découvrent... Alors si on se dit mais on s'en fout de les voir jouer à ça ?? Ou de faire une fête ou... Sauf que de mon point de vue le fil de ces scènes contrebalance les scènes d'action et participe à la cohérence. Elles pourraient ne pas y être, mais ne me semble pas gratuites. On jongle tous avec ça... A part les livres d'actions à fond les ballons ? Je sais pas ^^.
Pour ce qui est description de vêtements, certains aiment pas du tout. Voir chaque jour les vêtements du persos, je trouve que ça se justifie quand le personnage est une personne qui exprime son originalité, personnalité ainsi. Dans les Anita Blake au hasard :P j'ai toujours trouvé ça plus bof. C'est là presque par nécessité et fait sans âme (pour moi), ça m'ennuie à chaque fois alors que dans d'autres livres j'adore !

Pour ce qui est du côté "créateur tout puissant"... déjà créer c'est extraire du néant quelque chose... Euh c'est pas facile et pas courant si on y réfléchit. On part toujours de pleins d'éléments qu'on assemble, revoient. 80% du temps non ? Comme je l'ai déjà mis sur d'autres posts, on écrit pas que pour soi mais pour être lu c'est un moyen de communication différé. Emetteur/récepteur tout ça :P. On tiens donc bien compte du lecteur forcément je crois. Si on ne fait qu’émettre et que pour caricaturer on ne respecte aucune règle (ponctuation, grammaire, langue imaginaire)... Qui ça intéressera ? A part l'auteur super fier d'avoir fait un truc pareil lol.

Par contre je comprends ce que tu veux dire, on doit aussi se faire plaisir et ne pas écrire pour un moule préformaté en suivant toutes les remarques bêtement comme une machine. Le style qui marche, le genre, en lisant dix bouquins à succès en prenant des notes et hop on régurgite. Forcément ça ne marchera pas ! Et de grands succès de l'édition sortent parfois de nulle part. Sinon autant écrire pour Harlequin, y a des codes bien précis et ça doit pas être compliqué. Des fois l'auteur imposera sa singularité, certains y sont parvenus mais ils sont à la limite entre auteur/artiste non ? Ça devient quasiment une volonté à part, comme la beat génération à la Kerouac, les surréalistes avec Breton... Non ? Pas une voie facile quoi.

J'ai élargi le débat ou je suis HS ? Mmmh :oops: :lol:
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Milora
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Milora »

Je n'ai rien d'intéressant à apporter au débat, j'avais juste envie de dire que j'étais d'accord avec vous : toute scène a son utilité, même si cette utilité n'est pas forcément de servir l'intrigue.

Au risque de verser dans le milorocentrisme, je rencontre un problème sur ce point avec mon "roman" (je sais pas si c'est un roman, c'est juste une histoire qui semble de plus en plus longue au fur et à mesure que je l'écris xD). Mes personnages doivent aller de A à B, en traversant quelques péripéties. Sauf qu'ils n'arrêtent pas de... tergiverser. Se chamailler, prendre la pourdre d'escampette, entrer en contact avec des gens du coin... Tout ça, c'était pas du tout prévu. Alors, étant donné que ça permet de poser le caractère des personnages, je les laisse faire pour l'instant. Mais j'ai un peu l'impression que je pourrais retirer 15 bonnes pages (sur les 40 actuelles), que ça ne changerait pas grand chose à l'intrigue de base, même si ça permet de camper les personnages. Je pense que j'attendrai d'avoir des bêtas pour savoir si couper dans le tas.
C'est bien la première fois qu'un truc pareil m'arrive, d'avoir l'impression d'écrire des scènes inutiles !
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sherkkhann
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par sherkkhann »

Je suis d'accord avec toi Célia. Quand je disais journée banale, je pensais quand rien justement ne justifie la journée banale.

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Farah DOUIBI
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Farah DOUIBI »

Beorn a écrit :Excuse-moi, Farah, mais ton post n'était-il pas destiné au fil d'à côté, sur le gore ? :?:
C'est juste ! Je m'embrouille avec les deux sujets.
Petites grenouilles oranges, s'il vous plait :mage:

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Asia M
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Re: La gratuité, ça se paie ?

Message par Asia M »

:merci: pour toutes vos réponses! Juste une précision car je crois n'avoir pas été claire sur un point: mon but n'était pas d'opposer les scènes/passages utiles aux scènes/passages gratuit-es, comme s'il fallait choisir. Mon opinion est justement qu'il n'y a a priori même pas lieu de les distinguer... Qu'il est fallacieux, en gros, d'utiliser l'argument de l'utilité/inutilité pour justifier le ratage de tout un passage (on ne parle évidemment pas des mots, expressions ou phrases, voire paragraphes au sein d'une scène/description qui peuvent effectivement être inutiles et lourds car répétitifs/redondants/sous-entendus/etc).
Melanie a écrit :Comment je m'organise, j'enchaine généralement les scènes efficaces, où l'intrigue avance, et les scènes de calme. Les premières pour donner au lecteur une avancée et pas l'impression qu'il tourne en rond et les deuxièmes pour qu'il se repose un peu et pour moi que je m'amuser.
C'est exactement ce que j'essaie de faire aussi! ;)
Celia a écrit :Les descriptions ne sont pas utiles : depuis quand ? Si tu ne décris pas l'endroit où tes personnages vivent, où une action se passe, tu vas perdre le lecteur. Pire, tu vas rendre sans doute tes actions incompréhensibles.
Mais... mais... :roll: Je ne peux que me citer moi-même pour répondre cela:
(Je ne parle pas de la description d'un environnement qu'il faut se représenter pour comprendre, mais de détails superficiels et anodins, genre des vêtements.)
(Je ne veux pas dire non plus que les vêtements sont forcément anodins... Je parle justement d'exemples où ils le sont.)
Bergamote a écrit :Ce n'est pas la première fois que j'entends une "critique" sur la froideur des bêta. Parce qu'en gros c'est ça.
Euh... procès d'intention? :? Je suis nouvelle en beta, personne n'a jamais fait de beta de mes textes, et aucune des betas que j'ai lues sur le forum jusqu'à présent ne m'a particulièrement donné l'impression "fonctionnaliste" que je décrivais ici (qui m'est venue, très précisément, en lisant le fil sur le gore et celui sur le lexique).

C'est dommage, car du coup, à peu près tout ce que tu a écrit m'a paru hors sujet... en tout cas pas de mon domaine d'expérience.
Farah DOUIBI a écrit :Je pense que ce qui peut jouer, c'est la loi ^^
Ah, tiens, c'est intéressant, ça... :lect: Donc serait "gratuit" a priori ce qui est à la fois tabou et non justifié? (Car seule une justification bien solide permettrait de surmonter exceptionnellement le tabou.)

Cela me fait penser à un article très intéressant pour ceux qui lisent en anglais: par Joanna Russ sur le word "fuck", que l'on peut lire ici. Je suis sûre que beaucoup d'entre nous s'accorderaient avec elle... Ce qu'elle dit, au fond, est que le problème de l'obscénité pour elle-même n'est pas d'être obscène, mais de ne compter que sur son obscénité pour avoir le moindre intérêt/sens (de faire donc, finalement, impasse à la créativité véritable).
Spoiler: montrer
One of the great advantages in the disappearance of obscenity might be -- and I would like to see it happen -- a revival of the grand and beautiful art of cursing -- NOT blasphemy, NOT unimaginative, repetitive boring obscenity but real cursing -- the invoking of misfortune in the most vivid and colorful way possible. William Tenn has a lovely story about Jewish cursing. This takes real skill. One of my favorites is: may you inherit a hotel in Miami with a hundred rooms and may you have a heart attack in every single room! Or: may your nose drop off and your feet turn green and may your wife make you cocu with fishmongers!
Partance a écrit :Cette question me rappelle aussi le genre de questions que posent les gens qui pensent qu'analyser un livre, un film ne sert à rien... (un de mes combats préférés xD)
Je pense précisément que si l'on analysait la plupart des livres/films, on se rendrait compte que tout aurait pu être fait autrement (ce qui ne veut pas dire que la façon choisie n'est pas bonne ou judicieuse), et qu'on aurait pu écrire une nouvelle ou un court-métrage s'il ne s'était agi que de raconter l'histoire.
Elikya a écrit :L'auteur écrit ce qu'il veut. Le lecteur lit ce qu'il veut. La question qui se pose est donc : souhaites-tu être lue ? Si oui, tu écris pour les autres et il faut susciter le plaisir du lecteur.
Le plaisir du lecteur n'est pas proportionnel à l'efficacité de la résolution de l'intrigue (en tout cas le mien ne l'est pas). Comme le disait très justement Melanie, on aime parfois se reposer et/ou s'amuser! :)
Oui et re-oui. Les descriptions permettent au lecteur de se situer dans le monde de l'auteur, de visualiser les lieux et les personnages, de percevoir une ambiance.
Là, je ne suis pas du tout d'accord. On peut écrire un roman avec des description très minimales (voire presque pas), ou bien avec de très longues ; chacun son style, les deux sont également compréhensibles et plaisants pour les lecteurs. La preuve qu'il n'y a aucune nécessité quant à "ce qu'il faut écrire" (ou "ce qu'il ne faut pas écrire"). Bien sûr, cela donnera deux romans très différents: tout ce que je dis est que cela ne donnera pas forcément un roman et un non-roman, ou bien un roman publiable et un roman raté.
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Jean-Claude Dunyach
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Jean-Claude Dunyach »

Le problème, c'est qu'il n'existe pas de réponse à l'interrogation d'Asia. Ou plutôt, il en existe autant que de lecteurs...
Pour le lecteur que je suis, chaque texte réussi que je lis m'a donné le sentiment de sa nécessité - pas seulement de son utilité, ou de son intérêt, mais bien de sa nécessité, de son urgence à être là. L'auteur a pu s'étendre, écrire lent, décrire minutieusement (j'adore Proust et Flaubert) ou au contraire enchaîner les scènes rapides, c'est son problème. Moi, en tant que lecteur, je ne veux pas avoir à sauter des pages parce que je ne vois pas l'intérêt de ce que je lis. Je veux ne pas avoir de doutes, être scotché, comme on dit.
Le truc, bien sûr, c'est que nous sommes tous des lecteurs différents - entre mon épouse et mes deux enfants, qui lisent autant que moi, les discussions passionnées sont nombreuses - et par conséquent nous avons chacun notre idée de ce qu'est une bonne histoire bien racontée. Et de ce qui est une perte de temps.
Cela dit, il arrive souvent qu'un livre fasse l'unanimité entre nous, mais pour des raisons différentes... L'armée furieuse, le dernier Fred Vargas, a plu à ma chère et tendre pour des raisons quasiment opposées aux miennes. Elle trouvait inutile, ou pas spécialement intéressant, ce qui me passionnait, par contre, elle découvrait des trucs auxquels je ne pensais pas en première lecture. C'est un livre que nous relirons tous deux.
Et ça me fait me dire qu'en tant qu'auteur, il faut que j'essaie de mettre autant de raisons que possible d'intéresser le lecteur dans chaque passage. Que je trouve non pas un argument, mais plusieurs, pour le convaincre que cette scène est indispensable. Que je rende mes descriptions suffisamment intrigantes, belles, frappantes, ou chargées d'émotions pour que la question de leur nécessité ne se pose plus.
Bref, Asia, l'auteur que tu es est libre de ses choix, il n'y a pas de "bonnes" et de "mauvaises" scènes a priori. Tu n'es contraint que par le contrat de lecture que tu passes avec ton lecteur. Et il existe des tas de façons d'intéresser celui-ci, à toi de les employer à bon escient, et de préférence simultanément.
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Bergamote »

Hehe c'est le problème des mots écrits hors roman, on n'entend pas la voix qui les écrit :D Il n'y avait aucun procès d'intention et je suis désolée si tu t'es sentie agressée :)

Si j'ai pensé que ton sujet rejoignait les remarques que l'on peut faire sur les bêtas c'est parce qu'elles y collaient quasi parfaitement. Cela ne va pas plus loin que cela. ^^

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Draugadan
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Draugadan »

Bonjour à tous,

Je comprends ce qu'a voulu dire Asia M par le biais de ce sujet de discussion – du moins je crois –, et je partage, dans le fond, son avis.

Ce que l'on constate dans la plupart des réponses à sa question, c'est que l'idée selon laquelle tout, dans un roman, devrait se trouver au service de l'intrigue, revient souvent. Or il me semble qu'un livre ne se résume pas seulement à l'histoire qu'il raconte ; dès lors, je ne vois pas de quel droit celle-ci le tiendrait sous son joug.

Puisqu'il est bon de donner des exemples, j'évoquerai Madame Bovary (pour la simple raison que je l'ai lu tout récemment), où de nombreuses descriptions, longues et détaillées, s'inscrivent certes dans l'intrigue, mais ne trouvent pas tant leur intérêt dans ce qu'elles lui apportent (très honnêtement, pas grand-chose) que dans leur forme même. Flaubert les a composées avec une telle maîtrise de la langue, une telle précision dans le vocabulaire, un tel art dans les images, que leur lecture seule suffit à me combler ; à dire vrai, l'histoire eût été fade – ce qui n'est pas le cas –, je ne lui en eusse pas voulu, tant ses mots m'ont enchanté.

Je remarque aussi qu'aucuns ont évoqué le fait que l'auteur, s'il veut être lu, doive écrire (dans une certaine mesure) en fonction du lectorat. Mais si cela l'oblige à adapter, épurer, simplifier, amputer, augmenter, réorganiser – ou désorganiser, selon le point de vue –, voire uniformiser son roman, alors son oeuvre ne lui appartiendra plus tout à fait : il l'aura exprimée autrement et ne sera lu qu'à travers le filtre de son époque. La question est donc, dans ce cas : vaut-il mieux défigurer son livre, policer sa plume, mais avoir une chance d'être publié, ou lui rester fidèle et essuyer le refus de tous les éditeurs ? Je penche pour la deuxième option ; à mes yeux, la première revient à s'abâtardir, et je ne verrais plus alors d'intérêt à ce qu'on me lise.

On n'écrit pas un roman pour atteindre un objectif, mais parce que l'on en ressent l'envie, voire même, le besoin. Une fois achevé, on peut s'en détacher définitivement – c'est d'ailleurs ce que préconise Hugo dans sa préface à Notre-Dame de Paris –, ou bien le retravailler toute sa vie car on ne s'en satisfait jamais, peu importe, du moment que tout ceci reste une démarche personnelle. Que d'autres trouvent quelque intérêt à le lire, tant mieux ! voilà assurément un bonheur pour tout écrivain, qui partage ainsi un peu de son âme avec d'autres gens ; mais que son livre ne connaisse jamais d'autre regard que le sien n'enlèvera rien à son expérience de création, ni ne devrait engendrer quelque frustration que ce soit.

Vous vous direz peut-être : "en voilà un qui se console comme il peut du fait qu'il n'a pas été publié" ; je vous répondrai, tout d'abord, "pas encore !", car j'ai l'esprit badin, mais aussi, plus sérieusement, que je me suis toujours tenu à la ligne de conduite que je viens d'exposer, sans autre espoir que de finir un jour ce que j'ai entrepris, et de commencer à coucher sur papier toutes les idées que j'ai à l'esprit.

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Milora
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Milora »

J'ai pas relu tout le fil de discussion avant de répondre, alors je garantis pas d'être dans le sujet ou de ne pas avoir fait de redites avec ce qui a été écrit jusque là :lol:
*Mil, flemmarde*
Draugadan a écrit :Ce que l'on constate dans la plupart des réponses à sa question, c'est que l'idée selon laquelle tout, dans un roman, devrait se trouver au service de l'intrigue, revient souvent. Or il me semble qu'un livre ne se résume pas seulement à l'histoire qu'il raconte ; dès lors, je ne vois pas de quel droit celle-ci le tiendrait sous son joug.

Puisqu'il est bon de donner des exemples, j'évoquerai Madame Bovary (pour la simple raison que je l'ai lu tout récemment), où de nombreuses descriptions, longues et détaillées, s'inscrivent certes dans l'intrigue, mais ne trouvent pas tant leur intérêt dans ce qu'elles lui apportent (très honnêtement, pas grand-chose) que dans leur forme même. Flaubert les a composées avec une telle maîtrise de la langue, une telle précision dans le vocabulaire, un tel art dans les images, que leur lecture seule suffit à me combler ; à dire vrai, l'histoire eût été fade – ce qui n'est pas le cas –, je ne lui en eusse pas voulu, tant ses mots m'ont enchanté.
Oui oui, mais parce que dire que tout doit être utile dans un roman, ça ne veut pas dire que tout doit être utile directement à l'intrigue. Flaubert était quand même assez particulier vu qu'il voulait écrire un roman sur rien, lol. Mais même là, c'est pareil. Dans tout roman qui se respecte, le lecteur ne doit pas penser "tiens, j'aurais pu couper entre la page 386 et la page 402 que ça n'aurait rien changé". Même si tout n'est pas lié à ce que tu appelles l'intrigue, tout sert à quelque chose : planter les personnages, le décor, le style de l'auteur... Si on prend l'exemple d'un roman basé sur la trame d'une quête, ce n'est pas parce que les personnages font fausse route ou parce qu'il y a des passages qui ne sont pas consacrés à la quête que ces moments-là seront inutiles. C'est pour ça que la frontière est ténue, c'est une question de feeling de l'auteur, je pense. A mon avis, dès que le lecteur se dit "ce passage ne sert à rien", c'est que ça va pas (même si ledit passage avait un sens pour l'intrigue, d'ailleurs !)
Par exemple, dans La Chartreuse de Parme, y a carrément des digressions qui n'ont pas vraiment d'incidence sur la suite du roman (je me souviens plus trop trop, mais toute l'histoire avec la comédienne). Mais le lecteur ne se dit pas "ça, ça sert à rien, là". Il est embarqué dans l'histoire, et ces passages donnent au livre son côté bigarré et plein de péripéties...
Draugadan a écrit :Je remarque aussi qu'aucuns ont évoqué le fait que l'auteur, s'il veut être lu, doive écrire (dans une certaine mesure) en fonction du lectorat. Mais si cela l'oblige à adapter, épurer, simplifier, amputer, augmenter, réorganiser – ou désorganiser, selon le point de vue –, voire uniformiser son roman, alors son oeuvre ne lui appartiendra plus tout à fait : il l'aura exprimée autrement et ne sera lu qu'à travers le filtre de son époque. La question est donc, dans ce cas : vaut-il mieux défigurer son livre, policer sa plume, mais avoir une chance d'être publié, ou lui rester fidèle et essuyer le refus de tous les éditeurs ? Je penche pour la deuxième option ; à mes yeux, la première revient à s'abâtardir, et je ne verrais plus alors d'intérêt à ce qu'on me lise.

On n'écrit pas un roman pour atteindre un objectif, mais parce que l'on en ressent l'envie, voire même, le besoin. Une fois achevé, on peut s'en détacher définitivement – c'est d'ailleurs ce que préconise Hugo dans sa préface à Notre-Dame de Paris –, ou bien le retravailler toute sa vie car on ne s'en satisfait jamais, peu importe, du moment que tout ceci reste une démarche personnelle. Que d'autres trouvent quelque intérêt à le lire, tant mieux ! voilà assurément un bonheur pour tout écrivain, qui partage ainsi un peu de son âme avec d'autres gens ; mais que son livre ne connaisse jamais d'autre regard que le sien n'enlèvera rien à son expérience de création, ni ne devrait engendrer quelque frustration que ce soit.
Si j'ai bien compris ton message, tu voulais dire que si à toi, auteur, tel élément te plait, peu importe que ça ne plaise pas au lecteur, parce que tu ne vas pas modifier ta façon d'écrire pour plaire au plus grand nombre. Or, si je te suis bien vu le thème du fil de discussion, se brider pour se limiter à l' "utile", c'est sacrifier aux volontés du plus grand nombre de lecteurs. C'est bien ça, ou je suis à côté de mes bottes de sept lieues ?

Ben je pense qu'il y a une différence entre penser à une figure du lecteur, abstraite, qui donne sa raison d'être au texte (dès lors qu'on n'écrit pas pour soi même, et le fait même d'être sur un forum d'écriture montre que les membres n'ont pas pour but d'écrire uniquement pour eux-mêmes), et penser à un lectorat précis, que ce soit telle tranche des acheteurs du livre ou simplement le plus grand nombre.
Je ne sais pas si je m'exprime clairement. Mais l'acte d'écrire est indissociable de l'acte de lire (c'est uniquement avec les deux morceaux de ce puzzle qu'existe le livre. Sinon, il n'existe que pour l'auteur, et ok, ça peut être un choix, mais c'est pas un roman au sens propre, c'est un écrit personnel qui n'a pour visée que de s'exprimer). Quand on écrit, on est obligé de prendre en compte le Lecteur. Avec un L majuscule parce qu'il n'est pas identifié. C'est x ou y qui lira le livre.
Ça me semble être très différent de prendre en compte les lecteurs, réels, les vrais gens qui liront le livre et qu'on voudrait cibler. Si on prend ceux-là en considération, alors oui, il y a le risque de tomber dans le travers que tu dénonces. Personnellement, je préfère me dire que si les gens n'aiment pas telle histoire, soit elle est ratée, soit c'est juste qu'à moi elle me plait mais pas aux autres. Dans le premier cas, c'est quand on voit que les effets qu'on voulait créer chez le Lecteur ne sont pas réussis (ex : il fallait qu'il prenne le narrateur en pitié mais en fait tout le monde le déteste). On peut alors essayer de se corriger jusqu'à arriver à ce que ça rende comme on le voulait.
Dans le deuxième cas, les effets visés réussissent, mais le texte ne plait toujours pas. C'est à cause des lecteurs, qui ne l'ont pas aimé. Ils peuvent être un petit groupe (les gens à qui on a fait lire le texte ne l'aiment pas), ou la majorité des lecteurs (si on soumettait à un éditeur, l'éditeur refuserait parce qu'il n'y aurait pas de lectorat). A mon sens, c'est dans ce deuxième cas-là, que s'opère le choix dont tu parles : corriger le texte pour plaire aux lecteurs ou le garder pour moi parce que c'est comme ça que je l'ai voulu ?
(moi aussi, je penche pour la deuxième solution, mais ça reste un choix).

Ma parole, qu'est-ce que je suis bavarde. Où en étais-je ? Je suis partie bien loin, dites-moi.

Oui, donc. A mon avis, l'aspect utile/inutile (que je comprends avec les nuances dont je parlais plus haut), ça relève de ce qui touche le Lecteur, et pas les lecteurs. C'est une constante. Il ne faut pas ennuyer le Lecteur, il ne faut pas qu'il se dise qu'un passage ne sert à rien. Il faut qu'il ait le sentiment que tout est nécessaire, que tout s'imbrique bien. Ou plutôt il faut que, tant qu'il lit, il ne soit pas amener à discerner la structure de ce qu'il lit, et que donc tout lui semble logique et nécessaire...
Enfin, tout cela à mon avis, bien sûr !

Ciel, tapez-moi sur la tête pour que je me taise ! On ne m'arrête plus, ce soir.
Jour de pluie dans une cuisine (Le Mammouth éclairé)

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Asia M
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Re: La gratuité, ça se paie?

Message par Asia M »

Je crois que la variété des réponses que ce topic a suscitée, ainsi que la pertinence plus ou moins grande que j'ai pu leur trouver, tient à ma propre confusion dans le post initial... Voilà, j'ai lancé ce sujet comme une sorte de question, d'interrogation, et j'avais une intuition que je n'arrivais pas vraiment à expliquer ou à argumenter.

J'y ai réfléchi davantage depuis, et voilà deux remarques qui me sont venues:

1) À entendre la plupart d'entre vous, partisans de l'utile ou du nécessaire, tout est utile. Or si tout est utile, le mot même se vide de son sens... Si tout est utile, qu'il n'y a plus d'inutile, au fond il n'y a plus d'utile non plus. En généralisant l'idée d'utilité, finalement vous la diluez. L'utilité, c'est très différent de la raison d'être. Vous employez le terme "utile" dans une acception beaucoup plus étendue que celle qu'il a en réalité: je crois que vous confondez avec l'adjectif "bon".

2) J'ai fini par me convaincre (aussi à travers l'expérience d'écriture de mon Challenge) que le rôle de l'écrivain, c'est peut-être de spotter l'utile pour pouvoir le mettre dans son roman, mais c'est aussi de réussir en écrivant à rendre l'utile inutile. Le pire de tout, c'est quand l'utilité se voit. Quand on voit la béquille, la ficelle grossière dont l'auteur s'est servi parce qu'il en avait besoin. Un auteur doit donc avant tout masquer l'utile, lui donner une patine d'inutilité, de gratuité, de "c'est là parce que j'en ai eu la bonne idée"...

Exemple concret: dans le roman que j'écris pour le Challenge, j'ai jugé utile que l'héroïne aille visiter la tombe de son père mort... sinon, ça aurait eu l'air qu'elle n'avait pas de coeur, ou bien la mémoire trop courte. Sauf que je ne pouvais pas l'écrire tel quel, "comme elle avait aimé son père et n'arrivait pas à l'oublier, elle alla visiter sa tombe", livrer au lecteur pourquoi j'écrivais cela, sans lui donner de raison réelle de vouloir le lire... C'est barbant, la visite de tombes.

Alors j'ai noyé l'information utile (l'héroïne allant voir la tombe de son père) dans de l'inutile: hop! une petite introspection ici, un peu de décor là... ça fait toujours plaisir! Car voilà ce que veut le lecteur: pas de l'utile, mais du plaisir. Le plaisir, c'est le chocolat sur la crêpe: on n'en a pas besoin pour se remplir l'estomac, mais c'est ce qui fait que tout de suite, on a envie, parce que c'est bon, c'est beau...
Mon challenge 1er jet : Nocturne, Saison 2
Mon site d'auteure : S. J. Hayes
Mon blogue : Romanceville.net

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