La mare aux nénuphars

Salut,

j'envisage de commencer un projet tournant autour de personnages non-humains, probablement des souris dans un univers med-fan.
Inspirations pour vous donner une idée : Rougemuraille, mouseguard, bois-Duncton,...

Avez-vous des conseils à donner pour réussir à présenter un tel concept ?

Merci !

Est-ce que tu peux détailler tes inspirations ?
Personnellement, en univers médiéval animiste, je ne connais que De Capes et des crocs (que je n'aime pas spécialement) et la série des Donjons. Deux BD donc. Je serai très intéressée par les ouvrages que tu cites, et que j'avoue ne même pas connaître de nom...

Voilà quelques liens explicatifs :
Rougemuraille : un des plus connus : des aventures de cape et d'épée, un peu de religion, et beaucoup de gastronomie.
Mouseguard : des souris qui luttent pour survivre dans un univers hostile. Inspi : les trois mousquetaires et les templiers
Bois Duncton on dirait du Jane Austen, mais avec des taupes. Ca creuse, ça bouffe des vers, ça se reproduit !

Non en fait, ce que je pense qui pourrait t'aider et ce que je te demandais, c'est de décrire toi-même ces influences : pourquoi ? Qu'est-ce que tu y trouves, toi ? Comment abordes-tu ces personnages anthropomorphiques ? Comment les vois-tu ? En humains ou en animaux ? Les deux ? Comment ?
A partir du moment où l'on s'interroge sur ses influences (ou ses lectures tout cours), on arrive à trouver des trucs, des outils, des façons de voir qui se retrouvent aussi, plus ou moins, dans ses propres écrits.

Je ne connais pas Mouseguard.

Mais Rougemuraille et le bois Duncton me paraissent être deux façons d'envisager des persos animaux très différentes. Pour Rougemuraille, il me semble que les personnages sont très humains (sauf en apparence) avec très peu de caractéristiques de leurs espèces (genre : le roman de Renart, ou les fables de la Fontaine).
Tandis que les animaux du Bois Duncton sont eux beaucoup plus proches de leur modèle que d'humains.
Entre les deux, il y a par exemple certaines espèces des Fedeylins de NB (mention +++ aux "araignées") ou la série jeunesse Silverwing (Silverwing, Sunwing, Firewing, Darkwing) de Kenneth Oppel (des chauves-souris génétiquement modifiées mais conservant beaucoup des caractéristiques de leurs ancêtres)

Tu penses aller dans quel sens ?

Perso, j'ai écrit une novella où l'un des deux personnages principaux est un chien errant (l'autre est une jeune femme comptable). Pour le chien, ses soucis, sa façon de voir les choses, ses perceptions (l'odorat est son sens dominant), je me suis beaucoup inspiré de l'éthologie des chiens de traîneaux (vivants en meute, pas acculturés) et de celle des loups.

Edit : grillée par Célia (mon post complète le sien, je pense)

Héhé je savais que vous m'apporteriez des conseils utiles.

Au départ de mes inspirations, ce qui m'intéresse dans le genre, c'est de combiner le caractère classique du med-fan avec la nature même des animaux. En gros : les animaux restent des animaux, mais éveillés à l'intelligence égale à un humain (plus ou moins). C'est donc un mix de mes influences.
Ce serait en fait une race de souris issue d'une famille ayant vécu dans le laboratoire d'un magicien et ayant acquis l'intelligence (et certains des pouvoirs magiques) suite à l'exposition prolongée à la magie. Leurs descendants sont repartis dans la nature et ont colonisé certains lieux reculés.

Ce qui me fait peur, et ce pour quoi j'ai besoin de conseils, c'est la façon d'approcher le genre pour que les gens n'ayant pas l'habitude de tels récits puissent s'y retrouver et suivre l'action sans trop se sentir perdus. J'avoue être un peu perdu : avoir une approche subtile pour que le lecteur découvre par lui-même la nature "différente" des héros, ou bien y aller à grosses bottes (dans un trou dans le sol vivait une souris-mage) ?

Évidemment, tous les autres conseils pour ce projet un peu déviant sont les bienvenus. Certains ont déjà réagi au quart de tour, ça fait plaisir !

Alors le truc de cacher la nature du héros pour faire la surprise au lecteur, ça ne marche pas (enfin la plupart du temps)
Le but de ton roman, c'est de raconter une histoire, pas de jouer aux devinettes. Et le but de ton histoire c'est de montrer comment des souris vont dominer le monde (enfin plus ou moins ^o^)
Ce que tu peux lire (ou relire) je pense, c'est Oms en série, de Stefan Wul, où les animaux de compagnie sont des hommes dans un monde de géants, notamment pour voir comment l'auteur usent de certains différences biologiques (notamment les espérances de vie)
Les "gens" sont très habitués à ce genre de récit, parce que l'anthropomorphisme est présent partout depuis l'enfance, dans les contes, dans les fables, dans les films d'animation (on laisse ici un souvenir très ému pour Bernard et Bianca) Personnellement, je ne pense pas que cela soit un obstacle.

Ce qui me fait peur, et ce pour quoi j'ai besoin de conseils, c'est la façon d'approcher le genre pour que les gens n'ayant pas l'habitude de tels récits puissent s'y retrouver et suivre l'action sans trop se sentir perdus. J'avoue être un peu perdu : avoir une approche subtile pour que le lecteur découvre par lui-même la nature "différente" des héros, ou bien y aller à grosses bottes (dans un trou dans le sol vivait une souris-mage) ?

Tu veux dire que le lecteur comprenne bien que ce sont des animaux, sans que tu le mentionnes explicitement ?

J'ai jamais essayé, donc j'ai pas de conseils à proprement parler. Mais j'ai lu cette année Firmin, autobiographie d'un grignoteur de livres : c'est l'histoire d'un rat qui, nourri par le papier du sous-sol d'une librairie, a des aspirations d'humain. Il me semble que l'auteur ne dit quasiment jamais que Firmin est un rat (certes, y a les illustrations, lol), mais ça se voit tout de suite. D'une, la situation qu'il décrit ne peut être que difficilement humaine (la mère qui se cache dans les sous sols d'une librairie pour accoucher de plein de petits, l'escalade sur les bibliothèque, etc.). De deux, au bout d'un certain temps il fait intervenir quelques descriptions de lui-même (quand il découvre un miroir). Mais Firmin pense presque comme un humain (un humain naïf), il décrit avec des mots humains, pense avec des concepts humains. Tout en restant un rat. (Bon, ça fait trop longtemps que je l'ai lu pour que je puisse décomposer davantage le procédé, mais ça me semble assez proche de ce que tu cherches à faire).
A noter que ce livre n'est pas du tout de la SFFF, donc une bonne partie des lecteurs ne sont pas des habitués des récits avec des êtres pensants non-humains.
Bon, après, moi j'ai pas aimé le livre parce que je l'ai trouvé super triste et déprimant (c'est angoissant, cet espèce d'esprit humain coincé dans un corps de rat qui ne cherche qu'à communiquer et qui est incompris de tout le monde...), mais ça peut peut-être constituer une piste de plus... C'est tout court en tous cas.

Dans mon adolescence j'ai lu les 50 tomes d'animorphs, une série ou des ados se transformait en animaux. Un des aspects les plus intéressants était que ces animaux n'étaient pas de simples corps, ou régimes alimentaires : ils amenaient leur lot d'instinct. Les Animorphs devaient gérer ces instincts. L'animal est moins contrôlé par sa conscience. Les animaux-proies, comme par exemple un lézard dans le tome 1, étaient généralement les plus difficiles à contrôler, car en cas de danger la peur submergeait l'esprit de l'humain, par exemple. Certains dans le groupe sont devenus accros aux transformations en dauphins, à cause de la joie profonde qu'ils y ressentaient, l'envie de jouer qui effaçait tous leurs problèmes.

Bref ! Outre que c'est une super série, elle pose la question des différences psychologiques que tu peux choisir de mettre, ou pas, entre un personnage humain et un personnage animal !

Je plussoie les collègues sur l'importance d'exploiter la part animale du personnage. A mon sens, ça ne sert à rien de mettre en scène des animaux si on les fait se comporter exactement comme des humains.
Mais il n'y a pas que le comportement et l'instinct qui sont intéressants à étudier et à récupérer, il y a aussi leurs habitudes de chasse, leur habitat, et ce que j'aime beaucoup, c'est mettre en scène leurs réactions quand ils sont privés de ce qui leur est naturel ou lorsque les évènements les empêchent de se livrer à leur nature primaire. On peut aussi envisager l'influence de la domestication et du contact de l'homme, ce qu'ils comprennent et ce qu'ils réfutent.

Enfin bref, le sujet est vaste, alors autant bien le baliser avant de bâtir les personnages.

De ma modeste expérience, les trucs sympas à faire (et qui plaisent en général aux lecteurs) se sont les détails précis de la vie quotidienne (ex : les héros vont se prendre un petit ver en sortant du boulot ). A voir selon ce que tu veux faire, mais l'univers à l'échelle des héros peut prendre une place importante (quasiment la place d'un personnage, en fait).
J'ai tenté de faire ça dans mes fedeylins (il paraît que j'y arrive pas trop mal). J'ai aimé le retrouver dans le Bois Duncton que j'ai lu après.

Ce que j'aime dans ce genre de récits, c'est la culture différente de la nôtre et les termes détournés, qui ne sont finalement pas si difficiles à visualiser (ex : dans le Bois Duncton, la religion autour de la Pierre, ou les "hiboux hurlants" qu'on comprend être des voitures...)

En ce qui concerne les souris et les rats devenus intelligents à la suite d'expériences de laboratoire, je te conseille la lecture de "Madame Brisby et le secret de Nimh", classique de la littérature jeunesse. On en a également fait un dessin animé sorti en salle en 1982.
Le livre insiste sur la différence de proportions, le côté "gigantesque" des objets humains de la vie courante et le côté "terrifiant" de petites bêtes comme les chats et les hibous. ça fiche vraiment les jetons aux enfants.

Pour répondre à ta question, la façon dont tu devras exploiter le côté animal des personnage dépendra aussi du lectorat auquel tu destines ce texte.
Si c'est un roman pour enfants / jeunes ados comme Rougemouraille, le côté "mignon" des animaux sera peut-être plus à développer (surtout si tu choisis des souris), mais si ce sont des adultes, le côté sexuel et sauvage devra sans doute être plus présent. Évidemment, ce sont des tendances, rien n'empêche de mélanger les deux, quel que soit le public.

Celia a écrit :Est-ce que tu peux détailler tes inspirations ?
Personnellement, en univers médiéval animiste, je ne connais que De Capes et des crocs (que je n'aime pas spécialement) (...)

... ça se voit que tu n'aimes pas car ce n'est pas DU TOUT médiéval !

C'est gavé de références XVIIème siècle, c'est une vraie éloge des films de cape et d'épée.
Et ce n'est pas tout à fait animiste puisque seuls 3 personnages sont des animaux (le loup, le renard et le lapin).
L'ensemble des autres personnages sont soit des humains soit des *bip* (spoiler, gasp, il vaut mieux que je ne dise rien).

Oui je sais, mais c'est la références qui m'est arrivée immédiatement. Et je ne supporte pas les dialogues à rallonge dans la BD

Beorn a écrit :En ce qui concerne les souris et les rats devenus intelligents à la suite d'expériences de laboratoire, je te conseille la lecture de "Madame Brisby et le secret de Nimh", classique de la littérature jeunesse. On en a également fait un dessin animé sorti en salle en 1982.

Je connaissais le film, mais pas le livre, merci du tuyau.

Je pense me diriger vers un lectorat jeune ado/ado, un peu comme "la guerre des clans" mais en insistant sur le côté "société" et le relationnel. C'est vrai que c'est important de décider à quel degré ils sont sur l'axe humain/animal. Surtout que je compte avoir les humains en toile de fond dans le récit.


D'autres avis que celui (excellent) de Beorn sur les différences de ton et de sujets en fonction du lectorat ? Je n'ai pas envie de tomber dans le gnangnan comme Rougemuraille où ils font des fêtes à gâteau tout le temps, mais je ne veux pas aller aussi loin dans l'aspect naturaliste de Bois Duncton, où ils ne pensent qu'à se reproduire et éloigner leurs voisins à coups de griffes...