Bizarre, je ne me sens vraiment pas concerné par cette problématique, et encore moins par le problème d'auto-psychanalyse ou d'implication personnelle trop importante.
Ou bien je suis bien trop pudique avec moi-même pour me l'avouer.
Faudrait vraiment qu'on me mette le nez dedans au détour d'une béta-lecture parce que si je m'auto-censure, ça doit vraiment être inconscient.
Après, il y aussi le fait de savoir trouver les mots pour aller au fond des choses. Par exemple, je ne sais pas exactement quelle sensation ça fait de faire de la brasse dans une marre d'araignées. On peut ne pas se sentir capable d'expliquer les séquelles d'un viol. Pour le coup, un peu de pudeur n'est pas de trop pour éviter de sombrer dans le ridicule, le caricatural voire le mensonger.
Je pense aussi qu'il y a une certaine tolérance à avoir par rapport à un souci de réalisme qui dépend du ton, du contexte et du genre du roman.
Après tout, on oeuvre dans l'imaginaire.
Donc pour moi, suivant le roman, il n'y a pas forcément de soucis à avoir un héros qui massacre à tour de bras sans avoir le moindre problème de conscience ou qui se remet à gambader comme un lapin après avoir été piétiné par un troupeau de dindes en furie.
L'essentiel est de respecter la logique du roman, du personnage et des situations. Si on est au clair avec ça, le texte devrait être suffisemment creusé sans que les tabous constituent un frein.
Perso, pour ce que ça vaut, je me suis exercé il y a quelques années à écrire des textes "extrêmes", juste pour voir (et sans souci de qualité) : horreur, porno, torture, point de vue d'un pédophile, celui d'un terroriste ou d'un ogre qui revendique l'hypocrisie de la civilisation, d'un amoureux bafoué (c'était facile ça
) etc.
Une fois qu'on s'est dit "je le fais", ça vient tout seul (je ne dis pas que c'est réussi, je dis juste qu'il n'y a pas de soucis de pudeur).
Le tout effectivement, comme le dit JCD, c'est de se rendre compte de l'utilité et de la nécessité d'en arriver là.
Tonton a écrit :Pour prendre un exemple dans La Pucelle, pour ceux qui l'ont lu :
Jéhanne trouve un bébé abandonné. Par devoir et comme personne d'autre ne s'en soucie, elle le ramasse en espérant le refourguer au plus vite à quelqu'un de plus compétent. Elle se sent complètement désemparée.
Puis, petit à petit, puisque qu'elle ne trouve personne d'autre, elle s'attache à lui et commence à se considérer comme responsable de lui.
Et pour ce qui est d'aller jusqu'au fond de son idée : comme on est en fantasy, la magie existe et Jéhanne se met à faire du lait (ce qui est essentiel pour que le bébé survive). Ecrire une scène où elle lui donne le sein était pour moi une manière d'aller au bout du raisonnement.
Tout comme mon Malach, fils de Moloch !!!
Même si le bébé est une jolie femme d'une bonne centaine d'années et qu'il la prend en charge parce qu'elle est son seul moyen de retrouver ses bottes.
Bon, j'ai quand même pas fait pousser des seins à Malach (faut pas déconner non plus
) mais il va jusqu'à lui changer ses couches (cf ce que j'ai écrit plus haut), ce qui n'est pas rien.
Trop fier je suis, y a un point commun entre Malach et La Pucelle !
— Malach, avez-vous entendu ça ? Je suis, je cite, "drôle, tourmenté, incompris".
— Je ne vois pas en quoi c'est flatteur.
— Mon cher, cela veut dire que je plais aux femmes !
— Décidemment, je ne les comprendrai jamais.