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Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mar. nov. 29, 2011 9:44 pm
par Elikya
En tant que spécialiste de l'évitement et des ellipses dans mes textes, je ne peut que comprendre ton expérience ^^
:merci: Je crois que revenir sur cette scène m'a fait beaucoup progresser.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mar. nov. 29, 2011 9:45 pm
par Celia
Elikya a écrit :
En tant que spécialiste de l'évitement et des ellipses dans mes textes, je ne peut que comprendre ton expérience ^^
:merci: Je crois que revenir sur cette scène m'a fait beaucoup progresser.
Mais c'est bizarre parce que je ne mets que peu de limites au niveau violence ou gore ou détails glauque. C'est sur d'autres sujets que j'ai du mal à regarder mon texte en face.
Vaste débat ^^

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mar. nov. 29, 2011 9:59 pm
par tigrette
Ce sujet me touche très particulièrement :

Avant tout, pour évoquer le personnage de Claudia (j'adore AnneRice ) ( et aussi celui du vampire enfant de Let me in), j'ai trouvé qu'Anne Rice a réussi le tour de force de d''évoquer le paradoxe d'une âme adulte dans un corps d'enfant d'une manière magistrale. Ce qui l'aide, c'est le caractère spécifique de l'amour vampiresque tel qu'elle l'a défini.
Qu'est-ce qui fait l'enfant ? L'esprit ou le corps?

Pour en revenir à mon expérience personnelle, je traite de l'inceste (involontaire) freres/ soeur dans mon livre jeunesse. Une de mes premières lectrices a été choqué par l'idée même de la réalisation de cet inceste, alors que je ne m'étais même pas rendu compte dans le fil de l'action que cela pouvait choquer (c'est un roman jeunesse). Du coup, j'ai viré certaines scènes.

Un deuxième aspect qui me vient à l'esprit, c'est : comment va réagir mon entourage à ce que j'écris ? c'est quelque chose qui m'a longtemps bloqué dans mon écriture. Me livrer aux yeux des miens.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mar. nov. 29, 2011 10:08 pm
par Roanne
Ca me rappelle un détail, un truc tout bête, une remarque de l'une de mes bêta.

Je mentionne après une scène de fesses que le couple nettoie les traces de ses ébats.
Elle m'a noté "Là, ça casse un peu le côté sexy de la scène, même si c'est vrai.". Ce n'est pas très glamour en effet...
Mais c'est réaliste. Du coup, en mon âme et conscience, je conserve. D'autant plus que c'est juste suggéré, je ne me perds pas dans les détails scabreux.
A la réflexion, ce commentaire m'a surtout prouvé que j'avais évité les détails pas toujours terribles de la réalité (alors qu'ils peuvent être très drôles, tout dépend comment on les présente). L'autocensure commence par là, avant même d'atteindre des problématiques plus "larges".

Tigrette : je crois que c'est de ça dont on a le plus peur, le regard des autres, surtout de nos proches.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mar. nov. 29, 2011 10:36 pm
par Booz
Je rejoins assez Célia à propos de son expérience. Je suis totalement impudique en ce qui concerne la violence/gore/glauque/sexualité/etc. dans mes textes ; par contre, dès que je commence à parler de famille, c'est là cata : j'essaye d'en montrer un minimum parce que c'est un sujet qui me touche énormément et je n'arrive pas à en parler comme je le voudrais.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mar. nov. 29, 2011 10:40 pm
par Tristane Suzette
Pas le temps d'intervenir sur le fil, mais :merci: d'avoir ouvert le sujet.
Tout ce que vous dites est très intéressant !

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 9:52 am
par Zela
J'ai peu de temps moi aussi, mais ce fil est passionnant ! Et, ce ne sera pas aussi constructif que tout ce que vous avez pu dire précédement, mais je me rend compte en vous lisant que je ne donne pas tout au lecteur. Ce sera mon prochain axe de relecture.
En revanche je rejoins Tigrette : je m'autocensure sur certains passages en pensant à ce que mes proches risquent d'en penser, par exemple pour les scène de sexe.
Du coup, je contourne en suggérant plutôt qu'en détaillant.
D'une manière générale je trouve que suggérer peut parfois être plus fort que montrer et ça permet de contourner la pudeur ( sur certains sujets).

Je me dis que la beauté n'est jamais lisse et parfaite, au contraire, alors je me force au fil de mes relectures d'écorcher un peu plus les personnages, de noircir l'histoire. Le fait de le faire par touches, petit à petit, m'aide à dépasser ma pudeur.
tout ça ressemble beaucoup à de la peinture pour moi ^^

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 10:25 am
par Elikya
C'est marrant, je ne pense jamais à mes proches ou à ma famille quand j'écris. Je viens de réaliser que je n'écris pas du tout pour eux. J'écris pour moi et pour des lecteurs inconnus. Bon, certains sont moins inconnus que d'autres, ils ont même tendance à barboter dans une certaine mare.

Tout cela pour dire que ma pudeur d'auteur ne vient pas du regard qu'un autre pourrait porter sur ce que j'ai écrit. Elle vient de mon inclination pour la facilité, du désir de me protéger moi-même.

Et oui Jean-Claude, je rougis en me regardant dans le miroir, même si personne d'autre n'est dans la pièce. Ce n'est pas toujours facile de me regarder en face.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 10:36 am
par Celia
Elikya a écrit :C'est marrant, je ne pense jamais à mes proches ou à ma famille quand j'écris. Je viens de réaliser que je n'écris pas du tout pour eux. J'écris pour moi et pour des lecteurs inconnus. Bon, certains sont moins inconnus que d'autres, ils ont même tendance à barboter dans une certaine mare.

Tout cela pour dire que ma pudeur d'auteur ne vient pas du regard qu'un autre pourrait porter sur ce que j'ai écrit. Elle vient de mon inclination pour la facilité, du désir de me protéger moi-même.

Et oui Jean-Claude, je rougis en me regardant dans le miroir, même si personne d'autre n'est dans la pièce. Ce n'est pas toujours facile de me regarder en face.

+42 pour tout, y compris le rougissement (non en fait je ne rougis pas, j'évite de regarder le miroir ^^)

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 11:01 am
par Roanne
Celia a écrit :+42 pour tout, y compris le rougissement (non en fait je ne rougis pas, j'évite de regarder le miroir ^^)
Pareil pour le miroir, par contre je n'ai pas la chance d'Elikya par rapport au détachement vis-à-vis des tiers. Et je sens que ça va être coton côté famille (de mon côté à moi en tout cas) si un jour j'édite et qu'ils font le rapprochement. M'enfin, j'ai une famille spéciale, aussi. Puis je suis prête à parier qu'il n'y en a pas deux qui réagiront pareil.
Spoiler: montrer
Mon frangin me conseillera encore de me faire soigner, je suppose... ^^
Je m'excuse, je m'aperçois que je fais dériver le sujet, qui est surtout dédié au traitement des sujets difficiles, voire tabous, et à la façon dont on les gère (ou plutôt qu'on ose / n'ose pas les gérer). Pour le moment ça va, car je ne suis pas directement concernée, mais je suivrai vos échanges de près au cas où ça arriverait un jour.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 11:21 am
par pingu
Il y avait un sujet à propos de l'entourage et de l'écrivain. Je ne sais pas s'il est toujours quelque part.
Spoiler: montrer
Je crois que (il ne s'agit que d'une réflexion personnelle, peut-être complètement à côté de la plaque) pour parvenir à "s'en fiche du" (passer outre le/prendre du recul par rapport au /ne pas se laisser engluer par le) regard "inquisiteur" du tiers (souvent familial) soit vilain soit qui veut (est persuadé) bien faire (même résultat), il peut être utile de considérer son activité artistique comme non cessible ni aliénable, hautement personnelle. Même si le texte lu par le lecteur lui appartient tel qu'il l'a compris, celui que tu as écrit t'appartient tel que tu l'as écrit, et celui-là est inattaquable (je pense que ce n'est pas parce que c'est lisible (ou voué à être, dans le cas d'une publication visée) par tous (n'importe qui ouvrant le livre) que c'est public (au sens de sous contrôle d'un "état" qui serait l'entourage familial ou "amical" (j'utilise des guillemets parce que dès lors, ceux-là ne sont plus à mon sens des amis)).
(Je ne parle pas des critiques de bêta-lecture, qui sont des remarques pertinentes de collègues, qui d'ailleurs laissent l'auteur maître et juge et ne sont jamais envisagées, ni d'une part ni de l'autre, comme coercitives.)

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 11:23 am
par Nyaoh
(Siana c'est vrai qu'on se croise avec cet AT ^^, Chocolaa je vais aller voir ton projet ! Je suis en plein dedans aussi et ta vision du sujet à l'air intéressante !)

Pour l'avis de la famille je sais pas... ça ne me guide pas, mais quand mon compagnon me dit "ton style est trop comppliqué là ! droit au but !" j'ai toujours du mal à définir si je me plante ou si je dois m'écouter, il a un peu trop d'impact sur moi lol ^^ Par contre pour la famille, je crois que tant pis pour eux si il se choque parce qu'un nom de lubrifiant connu passe dans mon texte, qu'ils s'en achètent ça passera mieux (une blaguounette pour alléger tout ça :P)... Mais je n'écris pas de sujet vraiment tabou (pour l'instant) si je joue avec l'âge d'un perso et sur un sujet un peu délicat. J'écrirais une scène particulièrement poussé, je sais pas moi de sado-masochisme, peut-être que je serai plus dans mes petits souliers. Après mes proches ne lisent pas tout ce que j'écris ils prennent pas ce temps.
Par contre j'ai décidé y a quelque temps d'écrire sous un pseudo pour plusieurs raisons, mais aussi parce que j'ai bossé en maison de retraite que j'en ai tiré une ou deux nouvelles un peu grinçantes et que ça ne peut pas être le même nom du coup. Ça ne peut pas.

La seule autre nouvelle ou j'ai bossé sur un sujet difficile, c'était sur la maltraitance ou la première partie relatait un peu par le menu des journées quotidiennes qui virent à l'horreur et ensuite je basculais sur le point de vue du personnage, pour ne pas m’appesantir deux heures sur une personne qui défonce la tête de son conjoint et qui s'éclate à faire ça. Je voulais un peu de réalité cru, parce que même dans certains films c'est quasiment "romancé" ça me dérange, mais après plus comprendre l'impact sur la femme en question.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 11:30 am
par Roanne
pingu a écrit :Il y avait un sujet à propos de l'entourage et de l'écrivain. Je ne sais pas s'il est toujours quelque part.
Tout à fait, c'est pour cela que je me suis auto-modérée.

Je trouve en tout cas que ton intervention est juste et apporte au sujet, donc je l'ai trouvée très intéressante.

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 1:12 pm
par pingu
J'y ai un peu repensé et je me suis dit que, si on part du principe que cette pudeur involontaire peut éventuellement être néfaste à un texte, on se demande donc comment s'en débarrasser (et éventuellement se débarrasser de la brûlure inquisitrice de l'estimation normative (bien/mal) et personnaliste (au sens de qui se livre à des attaques personnelles, pas au sens d'égoïste - quoique...) de l'entourage se prenant (ou qu'on perçoit tel) (volontairement ou non) pour un "état" gouvernant la personne de l'écrivain et ses productions).

Bref, je me suis dit, donc, que prendre l'écriture comme une activité professionnelle (au sens de c'est un métier (qui me plaît et me passionne par ailleurs, ce n'est pas le propos) et non une expression directe de soi ; pas au sens de c'est mon emploi rémunéré qui me permet d'avoir des sous) permettait de mettre à distance son propre jugement (celui qui fait rougir devant le miroir) et celui des autres (ceux qui te regardent comme si c'était ton devoir de rougir face à ton miroir).

Par "non une expression directe de soi", j'entends se servir de sa vie (c'est notre matériau de base à tous, je crois, vu qu'en fait on n'a rien d'autre à disposition - j'inclus les lectures et films des autres dans cette "vie", bref, j'y mets tout - ce qu'elle est) sans se renier mais sans se vomir tout cru non plus. Bref, utiliser nos outils, avec recul et sagesse, avec professionnalisme, pour créer nos histoires.

Tout comme on fait pour les darlings, en vérité.
Le darling peut casser l'histoire : alors on l'ôte pour le bien de notre histoire.
L'antidarling (ou darling noir ? ^^) peut ronger l'histoire : alors on l'éradique en écrivant ce qu'il faut pour sentir que notre texte est "content".

En tout cas je le vois comme ça.
Ce qui rejoint ce qui a été précédemment dit, en fait, par plusieurs...

Re: De la pudeur involontaire de l'auteur

Posté : mer. nov. 30, 2011 8:13 pm
par Colcoriane
Spoiler: montrer
petite question un peu hors sujet : c'est quoi un darling ? Désolée, je débute... :oops:
En ce qui me concerne, il y a certaines choses que je me refuse à écrire, par principe. Hors de question de m'infliger une mauvaise conscience pour satisfaire mon lecteur. D'autant que je n'y aurais plus aucun plaisir.

Un domaine, en revanche, que je m'efforce de creuser, c'est la psychologie des personnages. Et en particulier les relations familiales. Il y a certains sentiments qui ne sont pas évidents à aborder - j'ai d'ailleurs tendence à les esquiver - mais j'essaie d'y revenir pour mieux les approfondir. Je ne sais pas si j'y arrive vraiment ^^

J'ai un peu l'impression de ne pas apporter grand chose de nouveau à la discussion... :roll: