Le pitch : comment raconter son histoire en quelques phrases
Posté : mer. juin 26, 2013 10:14 am
Ca discute pas mal pitch autour de moi en ce moment. J'ai retrouvé des notes que j'ai prises à la lecture de "Construire un récit" de Yves Lavandier. Voici en résumé ce qu'il en dit (n'hésitez pas à commander le bouquin, c'est une mine : http://www.clown-enfant.com/leclown/Con ... traits.htm) :
Le pitch signifie "lancement" en anglais. Un pitch, c'est important, ce n'est pas qu'un outil pour "vendre" une histoire, c'est aussi un outil d'écriture précieux qui permet à un auteur de construire une ligne directrice pour le récit et qui l'oblige à être synthétique, une qualité qui fait défaut à beaucoup d'auteurs.
Il y a deux types de pitches : le pitch dramatique (avec une question dramatique et un suspense) et le pitch trajectoriel (qui indique l'action entreprise par le protagoniste principal).
Un pitch dramatique standard contient forcément un protagoniste, l'essentiel de sa caractérisation et son objectif. (exemple : "un chanteur populaire tente de cacher sa bisexualité").
Dans un pitch, on ne séduite pas, on tente de séduire. On ne trouve pas, on cherche.
Le pitch dramatique ne doit pas répondre à la question dramatique (= la question que se pose le lecteur : « le héros parviendra-t-il à atteindre son objectif, et comment ? »), il doit lancer un suspense. La formule que Lavandier préfère c'est "Se bat pour...". Un bon pitch donne envie. Il fait donc état d'une action difficile.
On peut aussi y trouver :
- un incident déclencheur
(exemple : Dénoncé sur France Culture par un compositeur, un chanteur populaire se bat pour cacher sa bisexualité").
- Une idée des obstacles (exemple : Un chanteur populaire se bat pour cacher sa bisexualité auprès de sa femme catéchiste")
- l'arène (un décor signifiant) (exemple : Dans la Turquie des années 1960, un chanteur populaire se bat pour cacher sa bisexualité").
Ce qu'on ne doit pas y trouver selon Lavandier : des noms, des éléments trop vagues, trop de détails.
Pour résumé, la formule standard du pitch dramatique c'est : "Dans telle arène, à la suite de tel incident déclencheur, tel personnage se bat contre tels obstacles pour atteindre tel objectif".
Comment concevoir son pitch quand on a déjà plein de pistes ? Avec l'épreuve de la poubelle. Il faut faire des choix, réduire le sujet à l'essentiel et trouver le conflit central. Le conflit central est à la fois le conflit le plus fort et le plus présent dans l'oeuvre, et celui qui donne une idée de l'action principale.
Un pitch doit résumer l'action et non le sens du récit, ni l'intention de l'auteur, ni le résultat final. "Suite à la mort de son cochon d'Inde, un enfant apprend le sens de la vie" n'est pas un bon pitch car il ne rend pas compte de la dynamique concrète de l'oeuvre. Il décrit plus un résultat (en plus très abstrait) que la façon dont le protagoniste y parvient.
Concernant le pitch trajectoriel : la différence avec le pitch dramatique, c'est que le pitch trajectoriel dévoile le résultat. Il donne une idée de ce que l'auteur a envie de traiter. Il caractérise un peu plus le protagoniste.
Pourquoi faire une différence ? Car Lavandier distingue le récit d'intrigue et le récit de caractère : le récit d'intrigue met l'accent sur l'action et les objectifs conscients, le récit de caractère s'intéresse au portrait et à la trajectoire psychologique du personnage. La plupart des récits mélangent intrigue et caractérisation mais certains penchent beaucoup plus du côté du récit d'intrigue, d'autres beaucoup plus du côté du récit de caractère. Exemples de récits d'intrigue (Retour vers le futur, 24 heures chrono), exemples de récits de caractère (Cyrano de Bergerac, Hamlet, Un jour sans fin).
Pour faire un pitch trajectoriel, il faut déterminer l'état de départ du personnage principal et son état d'arrivée (ex : dans le film Alice, l'héroïne passe de futile et névrotique à dévouée aux autres). La trajectoire du personnage est souvent d'ordre psychologique. L'une des fonctions symboliques du récit est de nous montrer la voie pour changer et de préférence pour grandir. C'est d'ailleurs la raison principale pour laquelle le plus bel obstacle est l'obstacle interne, souvent un défaut moral, physique ou psychologique du protagoniste.
Pour construire le pitch trajectoriel, il faut mettre sur la route du personnage qui doit changer des conflits qui le poussent dans ce sens. Ce sont des conflits qui s'attaquent à l'un des traits de caractère de l'un des personnages. Comme exemple, : "face à tel conflit, un personnage avec tel trait de caractérisation apprend à acquérir le trait de caractérisation inverse". Ce qui suppose que l'auteur connaisse la réponse et donc la fin du roman
Dans la liste de Schindler, Schindler passe d'intéressé à juste.
Dans Oedipe roi, Oedipe passe d'aveugle à lucide
Dans Citizen Kane, Kane passe de tout-puissant à conscient de son impuissance.
La trajectoire du personnage est souvent d'ordre psychologique. Yves Lavandier rappelle que l'une des fonctions symboliques du récit est de nous montrer la voie pour changer, et de préférence pour grandir. Passer de pauvre à riche ou de vivant à mort sont des évolutions importantes pour le personnages mais peu signifiantes pour le spectateur (lecteur dans notre cas).
C'est la raison pour laquelle le plus bel obstacle interne est souvent un défaut moral, physique ou psychologique. C'est plus intéressant de voir l'évolution d'un personnage s'il est par exemple corrompu au départ puisque là, il a des chances de grandir et d'évoluer.
Donc la formulation du pitch trajectoriel : "Tel personnage avec tel trait de caractérisation apprend à acquérir le trait de caractérisation inverse".
Attention, nous dit Lavandier : le personnage ne change pas du tout au tout, il ne devient pas quelqu'un d'autre, il se transforme sur un trait de caractère et un seul.
En tant qu'auteur vous avez vos préférences entre le récit d'intrigue ou de caractère. Lavandier explique schématiquement que le travail de l'auteur d'un récit d'intrigue consiste à placer des obstacles sur la route de l'objectif et des sous-objectifs. Tandis que le travail de l'auteur d'un récit de caractère est de faire vivre au protagoniste des conflits (internes ou externes) qui le poussent dans ses retranchements et l'obligent à changer, prendre conscience et faire un choix.
Voilà, voilà, j'espère que cela vous sera utile
Le pitch signifie "lancement" en anglais. Un pitch, c'est important, ce n'est pas qu'un outil pour "vendre" une histoire, c'est aussi un outil d'écriture précieux qui permet à un auteur de construire une ligne directrice pour le récit et qui l'oblige à être synthétique, une qualité qui fait défaut à beaucoup d'auteurs.
Il y a deux types de pitches : le pitch dramatique (avec une question dramatique et un suspense) et le pitch trajectoriel (qui indique l'action entreprise par le protagoniste principal).
Un pitch dramatique standard contient forcément un protagoniste, l'essentiel de sa caractérisation et son objectif. (exemple : "un chanteur populaire tente de cacher sa bisexualité").
Dans un pitch, on ne séduite pas, on tente de séduire. On ne trouve pas, on cherche.
Le pitch dramatique ne doit pas répondre à la question dramatique (= la question que se pose le lecteur : « le héros parviendra-t-il à atteindre son objectif, et comment ? »), il doit lancer un suspense. La formule que Lavandier préfère c'est "Se bat pour...". Un bon pitch donne envie. Il fait donc état d'une action difficile.
On peut aussi y trouver :
- un incident déclencheur
(exemple : Dénoncé sur France Culture par un compositeur, un chanteur populaire se bat pour cacher sa bisexualité").
- Une idée des obstacles (exemple : Un chanteur populaire se bat pour cacher sa bisexualité auprès de sa femme catéchiste")
- l'arène (un décor signifiant) (exemple : Dans la Turquie des années 1960, un chanteur populaire se bat pour cacher sa bisexualité").
Ce qu'on ne doit pas y trouver selon Lavandier : des noms, des éléments trop vagues, trop de détails.
Pour résumé, la formule standard du pitch dramatique c'est : "Dans telle arène, à la suite de tel incident déclencheur, tel personnage se bat contre tels obstacles pour atteindre tel objectif".
Comment concevoir son pitch quand on a déjà plein de pistes ? Avec l'épreuve de la poubelle. Il faut faire des choix, réduire le sujet à l'essentiel et trouver le conflit central. Le conflit central est à la fois le conflit le plus fort et le plus présent dans l'oeuvre, et celui qui donne une idée de l'action principale.
Un pitch doit résumer l'action et non le sens du récit, ni l'intention de l'auteur, ni le résultat final. "Suite à la mort de son cochon d'Inde, un enfant apprend le sens de la vie" n'est pas un bon pitch car il ne rend pas compte de la dynamique concrète de l'oeuvre. Il décrit plus un résultat (en plus très abstrait) que la façon dont le protagoniste y parvient.
Concernant le pitch trajectoriel : la différence avec le pitch dramatique, c'est que le pitch trajectoriel dévoile le résultat. Il donne une idée de ce que l'auteur a envie de traiter. Il caractérise un peu plus le protagoniste.
Pourquoi faire une différence ? Car Lavandier distingue le récit d'intrigue et le récit de caractère : le récit d'intrigue met l'accent sur l'action et les objectifs conscients, le récit de caractère s'intéresse au portrait et à la trajectoire psychologique du personnage. La plupart des récits mélangent intrigue et caractérisation mais certains penchent beaucoup plus du côté du récit d'intrigue, d'autres beaucoup plus du côté du récit de caractère. Exemples de récits d'intrigue (Retour vers le futur, 24 heures chrono), exemples de récits de caractère (Cyrano de Bergerac, Hamlet, Un jour sans fin).
Pour faire un pitch trajectoriel, il faut déterminer l'état de départ du personnage principal et son état d'arrivée (ex : dans le film Alice, l'héroïne passe de futile et névrotique à dévouée aux autres). La trajectoire du personnage est souvent d'ordre psychologique. L'une des fonctions symboliques du récit est de nous montrer la voie pour changer et de préférence pour grandir. C'est d'ailleurs la raison principale pour laquelle le plus bel obstacle est l'obstacle interne, souvent un défaut moral, physique ou psychologique du protagoniste.
Pour construire le pitch trajectoriel, il faut mettre sur la route du personnage qui doit changer des conflits qui le poussent dans ce sens. Ce sont des conflits qui s'attaquent à l'un des traits de caractère de l'un des personnages. Comme exemple, : "face à tel conflit, un personnage avec tel trait de caractérisation apprend à acquérir le trait de caractérisation inverse". Ce qui suppose que l'auteur connaisse la réponse et donc la fin du roman
Dans la liste de Schindler, Schindler passe d'intéressé à juste.
Dans Oedipe roi, Oedipe passe d'aveugle à lucide
Dans Citizen Kane, Kane passe de tout-puissant à conscient de son impuissance.
La trajectoire du personnage est souvent d'ordre psychologique. Yves Lavandier rappelle que l'une des fonctions symboliques du récit est de nous montrer la voie pour changer, et de préférence pour grandir. Passer de pauvre à riche ou de vivant à mort sont des évolutions importantes pour le personnages mais peu signifiantes pour le spectateur (lecteur dans notre cas).
C'est la raison pour laquelle le plus bel obstacle interne est souvent un défaut moral, physique ou psychologique. C'est plus intéressant de voir l'évolution d'un personnage s'il est par exemple corrompu au départ puisque là, il a des chances de grandir et d'évoluer.
Donc la formulation du pitch trajectoriel : "Tel personnage avec tel trait de caractérisation apprend à acquérir le trait de caractérisation inverse".
Attention, nous dit Lavandier : le personnage ne change pas du tout au tout, il ne devient pas quelqu'un d'autre, il se transforme sur un trait de caractère et un seul.
En tant qu'auteur vous avez vos préférences entre le récit d'intrigue ou de caractère. Lavandier explique schématiquement que le travail de l'auteur d'un récit d'intrigue consiste à placer des obstacles sur la route de l'objectif et des sous-objectifs. Tandis que le travail de l'auteur d'un récit de caractère est de faire vivre au protagoniste des conflits (internes ou externes) qui le poussent dans ses retranchements et l'obligent à changer, prendre conscience et faire un choix.
Voilà, voilà, j'espère que cela vous sera utile