Pierre Bottero... Déjà un classique de la fantasy !
Café littéraire avec Camille BRISSOT, Erik L'HOMME, Caroline WESTBERG
Lieu : Magic Mirrors 2
Samedi après-midi, 17 H. Je viens enfin d'arriver à Épinal après un périple qu'il serait trop long et hors sujet de détailler ici. Une fois mon char stationné, mon super sens de l'orientation — qui me permet de retrouver (presque) chaque jour le chemin de mon domicile — me mène en moins de deux (heures) au Musée d'art ancien et contemporain : j'y suis presque, je contourne l'obstacle par un pont qui enjambe la Moselle, voilà l'entrée du parc. Plus que quelques marmots à éviter à droite, quelques coups d'épées à esquiver à gauche, et je distingue des tentes, petites ou grandes, au fond, après les Magic Mirrors...
Au passage, un crochet par une conférence qui se termine ; Robin Hobb échange quelques derniers mots avec l'animateur. J'ai encore le temps avant le café littéraire consacré à Pierre Bottero : je m'octroie une pause à l'abri d'un wigwam teepeequement rectangulaire, dressé à quelques dizaines de mètres de là, vaillamment défendu contre les hordes de visiteurs par deux grenouilles en possession de tous leurs moyens. Un petit coucou à Dea installée derrière le stand de l'association Etherval, une petite bavette avec Takisys qui veille au grain derrière celui de Gandahar.
Allez ! Presque six heures, il est temps de regagner les miroirs magiques pour m'installer à l'unique conférence que j'aurai eu la possibilité d'écouter pour ma première aux Imaginales.
Ça commence...
Erik L'Homme s'installe à l'extrémité de l'arc de chaises où s'assoient à leur tour Camille Brissot et Caroline Westberg, puis l'animatrice Solène Dubois. Tous les trois ont eu une relation différente à Pierre, trop tôt disparu. Trois histoires différentes qui me rappellent ma propre expérience ratée avec Pierre : lorsque j'ai découvert A comme Association (par mes enfants), j'ai immédiatement décidé de contacter cet écrivain magnifique qui habitait à quelques kilomètres de notre maison. Mais la triste postface du Subtil parfum du soufre devait m'apprendre que jamais je ne rencontrerais Pierre dans la vie réelle...
Heureusement, les disparus vivent presque plus à travers les êtres chers qui leur survivent et les font rayonner de mille éclats, d'une multitude de points de vue. Erik L'homme évoque ainsi ce qu'il qualifie devant nous de plus heureuse période de sa vie d'écrivain, grâce à sa rencontre avec Pierre, grâce à leur association dont il précise les trois sens qu'on peut y mettre. La collaboration entre eux deux, d'abord, bien sûr. Le rapprochement entre les deux maisons d'édition, ensuite, Gallimard Jeunesse et Rageot. Erik explique en effet qu'il était hors de question, pour Pierre comme pour lui, de "passer" chez l'éditeur d'en face. Le projet nécessitait donc une édition de concert, alternée, de chacun des volumes. Le dernier sens du mot Association est largement explicité dans le récit lui-même, l'association des deux héros.
Camille Brissot nous conte ensuite ses débuts dans l'écriture, et sa décision spontanée d'écrire à Pierre Bottero afin de lui demander d'être le lecteur dont elle a besoin pour progresser sur un premier roman. Surtout, la réponse non moins spontanée de celui qui acceptera de devenir peu à peu un mentor pour la jeune auteure. L'histoire belle et simple d'une rencontre vraie qui la conduira à la publication de son premier roman de jeunesse, chez le même éditeur que Pierre. Une collaboration conviviale, mais sans concession dès qu'il faut parler correction de texte... Camille décrit très simplement et de façon émouvante cette partie structurante de sa vie d'écrivain, où la disparition de celui qui est devenu un ami marque très clairement deux moitiés : un avant et un après...
Enfin, avec un art consommé pour captiver son auditoire, Caroline Westberg nous raconte ses premiers contacts téléphoniques avec Bottero, sa maîtrise du silence au bout du fil. Des circonstances dignes d'un vaudeville où quiproquo et coups de théâtre le disputent au rocambolesque et à l'humour badin. Mais toujours dans la bonne humeur ! Éditrice chez Rageot, Caroline sera plus tard subjuguée par le premier volet de La Quête d’Ewilan : la semaine de Noël lui sufffira pour le lire, alors qu'elle avait mis plus de trois mois à recontacter Pierre au sujet de son envoi précédent... Flammarion avait été plus rapide, alors, devançant son confrère et concurrent, pour être la première maison à publier Bottero. Quand Pierre et Caroline se rencontrent enfin véritablement autour de son tapuscrit, cette fois-ci, c'est au tour de Flammarion de rechigner avant de prendre une décision, hésitation qui fera basculer Pierre chez son nouvel éditeur, pour une longue aventure éditoriale avec Caroline Westberg, elle qui pourtant ne prisait pas tellement l'heroic fantasy, se déchargeant pour la lecture de ce genre de romans sur ses collègues plus spécialisés. Caroline, avec son humour et ses mots d'enfant rêveuse, nous communique les sentiments contraires qui l'ont assaillie à cette époque, tout à tour lectrice captive pleine d'émerveillement et professionnelle en proie au questionnement.
Je ne peux malheureusement pas vous relater la fin de cette conférence car j'ai dû m'en arracher — littéralement ! — pour me rendre à l'Assemblée Générale des Tremplins qui se tenait plus loin.
Il n'est décidément pas facile de faire ce genre de choix...