La mare aux nénuphars

Bonjour à tous,

Suite aux retours de mon alpha-lectrice, je constate un manque cruel de pauses descriptives dans mon roman. Mon alpha m'a parlé d'un univers trop "ethéré". En gros, je me consacre quasi exclusivement à mes personnages, leurs émotions, les dialogues, etc. ainsi qu'aux scènes d'actions SAUF QUE le lecteur n'a pas le temps de souffler et de se projeter quelque part. Mon univers manque de "matérialité", de "physique", de "tangible", en somme. D'ailleurs, les BL de mes extraits ont parfois soulevé des questions hyper concrètes auxquelles je n'avais pas de réponse.
La raison est simple : 1) je hais les longues descriptions 2) je suis donc nulle dans ce domaine 3) si j'ai beaucoup de facilité à investir la peau de mes personnages, j'ai beaucoup plus de mal à me projeter dans l'espace.

Me voilà donc en quête de trucs et astuces pour 1) visualiser et créer des lieux concrets 2) les décrire de façon synthétique mais percutante, éviter les pavés descriptifs mais pouvoir en quelques lignes évoquer les petits détails qui font vrais et concrets.

Je suis preneuse de tous tuyaux (tubas ?) à ce sujet, alors merci par avance à tous ceux qui sauront m'expliquer un peu comment ils procèdent

Bonjour à toi !
Alors déjà, je pense que l'on a chacun·e nos forces et non faiblesses en écriture. En être conscient c'est déjà le premier pas pour mener nos textes plus loin.
Je souffre d'aphantasie et donc, je suis donc incapable de former des images mentales dans mon cerveau/d'imaginer, donc j'ai développé tout un tas de stratégie pour que ce que je conceptualise puisse prendre vie.
Déjà, si toi aussi tu ne "vois" rien quand tu essaie d'imaginer quelque chose, eh bien, je suis désolée mais visualiser des lieux te seras très peu possible à moins de passer de longues heures à faire des exercices et ce n'est pas garanti que ça fonctionne. Toutefois, ce n'est pas parce que l'on fonctionne différemment que ce n'est pas possible de faire des (bonnes) descriptions.

Ma première astuce, elle tombe un peu sous le sens mais, c'est de faire des recherches. Par exemple, si tu t'inspire de lieux qui existent ou bien de lieux qui sont issus d'autres média (jeux vidéos, films…), tu peux te faire une collection de photos, de vidéos de ces endroits. Mettons que tu désires t'inspirer de la ville de Colmar, tu peux aller sur Pinterest pour collecter le plus de photos possible mais aussi aller sur Instagram pour retrouver des photos de la ville. Tu peux aussi aller sur Youtube : il y a beaucoup de gens qui font des vidéos de balades, sans paroles, en 4K. Si tu t'inspires de lieux fictifs, tu peux avoir la même démarche : par exemple, si je recherche la ville de Zanarkand du jeu vidéo Final Fantasy X, je trouverais des images mais aussi des let's play qui pourront me donner des idées de l'ambiance, des détails etc.
En ayant ces supports je peux choisir ce qui attire mon attention, ce qui me semble pertinent/intéressant pour mon histoire et m'en inspirer pour formuler des descriptions.

Ma deuxième astuce, c'est de faire appel aux sens. Dans les romans on utilise beaucoup la vue, qui est pour beaucoup LE sens dominant. Toutefois, il y a plein d’informations que l'on tirer / déduire à partir d'autres perceptions. Une forêt, ce n'est pas que les arbres que l'on voit. C'est aussi le bruit des oiseaux, les odeurs, ce que l'on peut toucher voir même goûter.
En reprenant cet exemple de la forêt, c'est un lieu qui change en fonction des saisons. En automne, marcher dans les feuilles mortes, le bruit que ça fait, l'odeur que ça dégage, ce n'est comme y marcher en été où les parfums ne sont pas les mêmes et où le sol est peut-être plus sec.
Pour parler d'une ville, on peut éventuellement penser qu'en été, le système des eaux usées se fait plus prégnant qu'en hiver mais aussi que son visage change en fonction de la météo. Par exemple, la pluie, ce n'est pas juste de l'eau qui tombe du ciel : ça fait du bruit, ça a une odeur, ça a des conséquences sur la vie, aussi qui ne se déroule pas comment pendant un jour de beau temps.

Ma troisième astuce, c'est de s'ancrer dans le "vrai" car, au final, en tant qu'auteurices nous sommes des menteurs : nous faisons croire sur des pages et des pages à un beau mensonge et les meilleurs mensonges sont basés sur du réel. Même si l'on écrit de la SFFF, il y a des choses qui sont "universelles" et on peut en jouer.

Quant à comment écrire de bonnes descriptions sans en faire des tartines immangeables, je pense que tout peux se résumer dans le choix des mots : avoir un vocabulaire précis permet de cerner les choses plus aisément. Par exemple, si on parle d'un endroit où il faut chaud et humide, autant dire qu'il est moite. Si on a extrêmement chaud, que c'est irrespirable, on peut utiliser le mot "touffeur".
Si on apprécie d'en faire, on peut aussi faire quelques métaphores pour mieux appuyer son idée/son propos.

Voilà, j'espère que ça pourra t'aider ! c:

C'est un vaste sujet, mais voici quelques pistes :

- Décrire dans l'action, avec des verbes d'action : personne n'aime les pavés descriptifs de nos jours, donc il vaut mieux éviter les pauses descriptives. L'astuce c'est d'insérer des éléments de description dans l'action.
=> Exemple issu de mon challenge :
Je n'écris pas :
"Il y avait une porte blanche, avec des moulures et des poignées dorées. Un rai de lumière passait dessous, et on entendait des voix de l'autre côté."
J'écris :
"Un rai de lumière dessinait les contours de la porte blanche. Emma scrutait les moulures et les poignées dorées, ses oreilles se tendaient vers les voix distinguées qui s’élevaient de l’autre côté, sa peau percevait la chaleur qui régnait à l’intérieur. Elle se sentait attirée comme un papillon par un lys carnivore."

- Utiliser les cinq sens, et pas seulement la vue. L'odorat est souvent un sens négligé par les auteurices débutants. Pour rendre les descriptions moins éthérées, je te conseille aussi d'utiliser le toucher, et de rendre ton monde plus matériel grâce aux textures.

- Te baser sur des généralités et rajouter un détail percutant : une chambre est une chambre, une épée est une épée, une voiture est une voiture... tu n'as pas besoin de les décrire par le menu, mais tu dois ajouter un détail percutant qui s'imprime dans la mémoire du lecteur. Souvent, ce détail est marquant parce qu'il est original, mais surtout parce qu'il caractérise un personnage important.
=> Exemple de la chambre : des rangées d'étagères couvertes de livres anciens, une barre pour faire des tractions, des miettes de pizzas devant un clavier d'ordinateur lumineux, une bestiole sur un coussin ou dans une cage... ce genre de détail nous en dit beaucoup sur l'occupant de la chambre, en quelques mots.

- Utiliser une métaphore parlante : parfois, une métaphore est plus parlante qu'une description minutieuse. Au lieu de décrire que la chambre d'une personne est en bazar, tu peux écrire : "on aurait cru qu'une bande de cambrioleur venait de retourner ses affaires."

- L'inévitable show don't tell : il s'agit de décrire les sensations des personnages, au lieu de dire un sentiment. Décrire la peur, décrire la joie, et dans l'exemple suivant décrire la faim. (Désolée de me prendre moi-même comme exemple, alors que je ne suis pas une référence, mais je n'ai pas le temps de chercher mieux ailleurs).
=> Exemple de tell : "— Regardez-les, Madame. Ils ont très faim."
=> Exemple de show : "— Regardez-les, Madame. Ils ont raclé jusqu’aux derniers grains de farine pourrie au fond d’la huche. Ils mendient des croutons de pain au boulanger qui cuisine vos gâteaux et vos brioches. Leurs gosses ont mangé les fruits verts, à s’en rendre malade, pour se remplir l’estomac. Les tout ptits s’ont même plus la force de pleurer."

Les deux grenouilles précédentes ont déjà donné des réponses très complètes, du coup, j’ai juste un petit « truc » à ajouter pour ma part, si ça peut aider

Comme le disait Elikya, personne n’aime les pavés descriptifs (je me demande encore comment Au bonheur des dames à pu être un succès un jour… désolée Émile !).
Et ça rejoint ce à quoi je pense : quand dans l’IRL tu pénètres dans un endroit, aussi riche soit-il (mettons une cathédrale tient), tu ne relève pas tous les détails. Ton attention est inconsciemment attirée par quelques uns en particulier. Pour certains ce seront les vitraux, pour d’autres les peintures, d’autres encore les voûtes, etc.
Donc je me dis que pour un narrateur c’est la même chose, en fonction de qui il est et de ce qu’il aime, son attention, et donc tes descriptions, s’orienteront davantage vers un détail ou un autre, mais pas sur l’intégralité indigeste.

Ah comme je te comprends ! Je déteste les longues descriptions. Je me rappelle la fois où sur une de mes plus longues descriptions on m'a dit que c'était trop court.

Je vais rejoindre un peu ce qui a été dit, mais mon astuce, c'est de rendre ça intéressant. Le plus souvent pour moi ça passe par le regard du personnage, surtout au début. Par exemple, j'ai une scène où mon héroïne revient dans son visage natal : je décris le village en me servant de ses souvenirs, du style "elle avait souvent marché seule dans ces terreuses" (bon je schématise c'est pas ça ma phrase, mais je suis sur téléphone). Dans le même genre, je me sers de la description pour poser une ambiance ou un regard : jak une scène de description de ville toujours qui me sert à poser la pauvreté des habitants d'un quartier. J'ai un passage où je décris la chambre d'un personnage, je me suis demandée "quels éléments dans sa chambre vont traduire sa personnalité ou apporter de nouvelles informations sur lui".

Si ce n'est pas possible (soit que ce soit lourd, soit qu'il n'y ait rien de particulier au lieu), je vais plus m'attacher sur des détails. Comme dit Elikya, une chambre, c'est une chambre, mais il peut y avoir un détail intéressant, ou pas, tu peux dire que c'est une chambre qui n'est meublé que du strict nécessaire par exemple.

Autre chose : décrire en mouvement. Je le fais souvent pour les persos mais ça marche aussi pour les lieux. Par exemple, au lieu de dire "le couloir comportait de nombreux tableaux" je vais écrire "Paul marchait le long d'un couloir orné de luxueux tableaux". Comme ça tu décris sans couper l'action.

Salut Marion,

En plus de tous les bons conseils donnés plus haut, comme tu sembles avoir tendance à te focaliser sur les personnages et leurs actions, pourquoi ne pas user de la figure de personnification pour tes descriptions ?
C'est personnellement une technique que j'aime beaucoup car elle est très expressive. En revanche, il faut voir si elle peut s'intégrer à ton récit car elle se remarque vraiment beaucoup et donne vraie une couleur au texte.
Pour finir je vais essayer de te donner un exemple (même si là, à froid et hors contexte c'est plus dur pour moi, donc déso si c'est pas très quali).

La demeure se trouvait face à eux, grise, sale, lugubre. Son huis défoncé, gueule ricanante et édentée, arborait le rictus du défi. "Oserez-vous pénétrer en mon sein, couards que vous êtes ?" raillait la masure. À l'étage, ses paupières fatiguées, cernées de lierre et de crasse, grinçaient de vieillesse autant que de fourberie. Derrière ces volets sinistres, la maison les observaient et se gaussait. Car à travers ses prunelles brisées et coupantes, on pouvait remarquer qu'une lueur rougeoyante, le reflet de sa malveillance, dansait tel un petit démon vicieux.

Voilà, j'espère que ça te parle.

Merci beaucoup pour tous vos conseils, je vais me pencher sur tout ça. Je me dis qu'en commençant par dessiner les endroits, ça sera plus facile de les décrire ensuite !