La_louve a écrit :Tiens c'est intéressant ça, parce que justement je confondais sans doute les deux. Donc le fait de rajouter un élément type sciure de bois modifie le processus de décomposition par rapport au cas où seules les "matières" se retrouvent ensemble
Je veux bien détailler, je pense que ce n'est pas hors sujet et que ça peut aussi aider Spider qui pose la question initiale.
Je vais tâcher de faire simple. Grosso modo on a deux voies de réduction des déchets organiques : sans oxygène, et avec. La première est plus ancienne parce qu'elle existait avant l'apparition de la vie aérobie sur terre, lorsque l'atmosphère était encore largement composée de gaz qui sont toxiques pour nous (plus d'infos, voir vénus). Ensuite des bactéries ont commencé à libérer de l'oxygène qui comme son nom l'indique est un puissant oxydant. Il est toxique pour les bactéries qui vivaient dans le milieu précédent, et donc elles se sont réfugiées dans les milieux protégés de l'oxygène, en général eux qui sont stagnants et humides (fond marins, marais, sous-sol). Actuellement ces formes de vies sont minoritaires sur Terre puisqu'il y a tellement de producteurs d'oxygène que l'atmosphère en contient une forte proportion en permanence.
Nos déjections (et celles des autres animaux), naturellement, sont décomposées
sur le sol, dans un milieu aérobie. Les matières sèches assez vite, les UV détruisent les microbes rapidement. En séchant ça libère de la vapeur d'eau et du CO2, qui sont tous deux inodores. Et donc ça marche très bien, tant que la population des animaux en question est raisonnable (quand on se balade dans la nature, on ne trouve pas facilement les crottes des animaux). Sinon, il y a trop de matière au même endroit et on passe en milieu anaérobie : plus assez d'oxygène pour nourrir les décomposeurs, qui cèdent la place à ceux qui vivent sans oxygène. Eux aussi décomposent, sauf qu'ils produisent du méthane (odeur de pet, et gaz inflammable) et du sulfure d'hydrogène (odeur d’œuf pourri, et grande toxicité - voir les marées vertes sur le littoral) et éventuellement ammoniac aussi (odeur de vieille urine - toxique aussi). Bref c'est la super classe.
Dans le modèle des latrines, comme on concentre une grande quantité d'effluents dans un trou non ventilé, les processus aérobies cessent très vite, ils ne peuvent avoir lieu que sur la surface, quand tout le reste est anaérobie. D'où les nombreux inconvénient du système.
Dans une litière, on mixe les effluents avec de la matière carbonée sèche (paille, feuille, sciure etc.). Cette dernière absorbe assez vite l'humidité, et stocke une grande quantité d'oxygène, tout en apportant les matières carbonées nécessaires pour que les décomposeurs fassent leur job (sans ça, ils ont trop d'azote et stoppent leur développement). Dans la version toilette sèche mais à compost, le but est de surtout éviter que le processus ne devienne anaérobie, pour qu'il reste dans l'aérobie, mais en environnement contrôlé. Du coup les matières sont transformée en compost, en humus, en tous points comparable à celui de la forêt, mais de manière beaucoup plus rapide que si on avait laissé faire en laissant tout par terre. Donc il n'y a pas d'odeurs.
Mais de loin on peut confondre les deux puisque dans un cas comme dans l'autre il n'y a pas de chasse d'eau. Et l'image des latrines fait évidemment mauvaise presse aux toilettes sèches modernes, alors que ces dernières sont infiniment plus efficaces que le système des chasses d'eau (parce que celui-ci en noyant nos effluvant les conduit évidemment vers le processus anaérobie, c'est pourquoi les stations d'épuration sont si parfumées).
En résumé très grossier : latrines = marécage et production à terme de tourbe + gaz toxiques. toilette sèche = sol forestier et production à terme d'humus + gaz neutres.
J'avoue que je n'ai toujours pas trouvé pourquoi est-ce qu'il a fallu des siècles pour s'apercevoir de la différence, chez nous. Nos ancêtres avaient tout le nécessaire pour faire du compostage efficace plutôt que des latrines déplorables. Le mystère demeure.
La_louve a écrit :Et si l'on considère du fumier qui mélange excréments et paille, à quel modèle est-ce que ça répond
A priori on est sur du compostage, mais tout dépend de la manière dont le fumier est géré : trop de matière humides, pas assez de carbone et hop, on retourne illico vers l'anaérobie. Bon comme ce dernier pue horriblement, ce n'est normalement pas trop difficile de voir si le compostage marche correctement ou pas. Si ça sent mauvais, c'est que ça ne va pas.
tomate a écrit :A la campagne, c'était plutôt un siège percé au fond du jardin (les écolos y reviennent).
Justement non
![Clin d’oeil ;)](./images/smilies/icon_e_wink.gif)